Les pieds dans le plat ! Pour son deuxième congrès organisé à Lyon, la Fédération française des centres de soins non programmés (FFCSNP) avait convié le président de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) à s'exprimer sur l'émergence très dynamique de ces structures – dont l'appellation n'est pas réglementée et dont l'ouverture ne nécessite pas d'autorisation de la part des agences régionales de santé.
Lors de cet échange, le président de la FHP, Lamine Gharbi, n'a pas hésité à dire à la centaine de praticiens présents que, s'il comprenait « la lassitude et la fatigue des médecins à assurer les soins dans un service d'urgence H24 », il observait que de nombreux urgentistes quittent partiellement ou totalement leur activité en clinique pour rejoindre ces centres. Un mouvement de fond qui entraîne selon lui « une paupérisation » de l’offre de soins non programmée réglementée, en particulier dans les 122 services d'urgence privés, où exercent quelque 700 médecins libéraux.
« En Occitanie, où se trouvent mes cliniques, a-t-il précisé, il n'y a pas une semaine où l'ARS ne demande aux établissements de fermer quelques nuits par semaine [faute d’urgentistes, NDLR]. Pour moi qui me bats depuis trente ans afin que l'on puisse obtenir cette autorisation d'ouvrir des urgences 24 h/24, c'est difficile. » Avant d'avouer avec franchise : « Cette concurrence doit trouver une complémentarité et un équilibre. Sans quoi vous allez certes vous développer mais nous, nous allons disparaître ».
« On ne veut pas être concurrents »
À ces mots, le Dr Stéphane Bergzoll, urgentiste et cofondateur de huit centres de soins non programmés en Auvergne-Rhône-Alpes, a répondu : « On ne veut pas être concurrents. Notre rôle est de délester, et non de remplacer, les services d'urgence et les généralistes des soins qu'il n'est pas dans leur rôle d'assurer. Le paysage de la médecine d'urgence est dépassé, notamment à cause de la démographie médicale en baisse. J'ai 47 ans et nos jeunes confrères n'ont plus la volonté de faire ce que nous avons fait à l'époque », détaille-t-il.
Partie prenante de la discussion, le Dr Sébastien Adnot, médecin généraliste et secrétaire général de l'URPS médecins libéraux en région Paca, a quant à lui averti ses confrères sur les dérives relatives au renouvellement d'ordonnances dans ces centres, expliquant que les patients chroniques ont avant tout besoin du suivi de leur médecin traitant. « Ce point se trouve précisément dans notre charte éthique, a rétorqué le Dr Xavier Poble, ancien praticien hospitalier reconverti dans un centre à Saint-Étienne (Loire) et favorable à une plus grande réglementation de ces structures – une idée en cours d’examen au Parlement. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous souhaitons une reconnaissance des pouvoirs publics. Il est important que les patients sachent ce qu'est réellement un centre de soins non programmés et qu'il y ait un tri » entre le bon grain et l’ivraie.
Intervenant à la suite de cet échange entre la FHP et l'URPS Paca, le Dr Yannick Neuder, député cardiologue et rapporteur général du budget Sécu (PLFSS) pour 2025, s'est quant à lui affiché comme favorable au développement des centres de soins non programmés. « J'ai la chance d'en avoir quatre dans ma circonscription. Ils sont ouverts de 9 à 22 heures avec des week-ends couverts, ce qui a une vraie valeur ajoutée pour le territoire », a-t-il exprimé, appelant dans le même temps à « une complémentarité et un adressage réciproque à réaliser entre les cliniques et les CSNP ». Histoire d’apaiser un tant soit peu le débat.
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