Le top départ des « négos » a débuté mi-mai et, de l’avis des centres de santé, il était plus que temps. Cela fait en effet dix ans que l’accord national des centres de santé – qui régit les relations entre ces ex-dispensaires et l’Assurance-maladie – n’était pas revenu sur la table des discussions. Conclu en 2015, il avait été reconduit tacitement en 2020. À l’évidence, « il n’est plus adapté à l’évolution des pratiques des centres de santé », constate la Dr Hélène Colombani, cheffe de file de la Fédération nationale des centres de santé (FNCS, gestionnaires).
C’est encore moins le cas depuis la publication en février d’un rapport de l’Igas, sévère, sur l’« évaluation du modèle économique des centres de santé pluriprofessionnels ». Pour mémoire, bien que reconnaissant la contribution majeure de ces centres dans l’accès aux soins des plus précaires, le document épinglait leur manque de « productivité » et l’explosion des charges d’exploitation, fragilisant leur modèle économique.
La lettre de cadrage des ministres de la Santé, Catherine Vautrin et Yannick Neuder, envoyée mi-avril au directeur de la Cnam, Thomas Fatôme, dégage quatre orientations pour ces négociations : la simplification du modèle existant « pour le rendre plus performant et lisible » ; la définition « d’un modèle économique ajusté aux réalités structurelles et fonctionnelles des structures » ; le renforcement de l’implication des centres de santé (…) sur les territoires ; et l’amélioration de « l’accompagnement des centres de santé dans leurs missions ». Des axes de travail repris dans le document socle présenté par la Cnam, le 15 mai dernier.
Implantation géographique inégale
Lors de la première séance de cadrage, les partenaires ont d’abord partagé un état des lieux. En 2024, la Cnam recensait exactement 3 005 centres de santé conventionnés, ayant constaté une augmentation progressive du nombre de structures depuis 2016. Avec une accélération entre 2020 et 2022 (+ 29 %), puis un ralentissement en 2023.
L’Assurance-maladie relève ensuite la répartition géographique inégale des centres de santé, principalement concentrés dans les Bouches-du-Rhône, le Nord, le Rhône, et, pour leur grande majorité, en Île-de-France. En termes de typologie, ce sont les centres médicaux ou polyvalents (44 %) qui sont les plus nombreux, contre 42 % de centres dentaires et 14 % de centres infirmiers.

45 300 euros par centre rémunéré en moyenne
La Cnam a ensuite présenté un audit de la rémunération forfaitaire globale versée par ses services aux 2 671 centres de santé (CDS) éligibles ayant atteint leurs prérequis. Entre 2019 et 2024, cette enveloppe annuelle est passée de 50 millions d’euros à presque 121 millions (+143 %). En 2024, chaque centre de santé rémunéré a ainsi perçu « 45 300 euros en moyenne » (contre seulement 32 000 euros cinq ans plus tôt). Cette subvention atteint même 72 278 euros pour les centres de santé polyvalents.
Pour mémoire, les centres de santé doivent remplir des objectifs autour de divers indicateurs pour déclencher la rémunération au titre du bloc principal : accès aux soins, travail en équipe et système d’information. Un bloc complémentaire comprenant l’accompagnement des publics vulnérables et la démarche qualité vient s’ajouter à cette rétribution. À noter que le bloc système d’information représente à lui seul 34 % de la rémunération moyenne. Par ailleurs, environ un millier de centres sont éligibles aux rémunérations sur objectifs de santé publique (Rosp MT adulte et enfant) pour une moyenne de 7 800 euros par centre.
Concernant l’aide à l’emploi d’un assistant médical, la Cnam a versé aux centres concernés un montant de 12,6 millions d’euros depuis 2020 (elle comptabilise 224 contrats en cours pour 2024). En moyenne, on recense 1,1 ETP d’assistant médical par contrat. Des chiffres à rapprocher des « 7 240 contrats pour les médecins libéraux ».
Concernant cette fois l’aide à l’emploi d’une infirmière en pratique avancée (IPA), seulement 28 contrats ont été rémunérés en centre de santé depuis l’entrée en vigueur du dispositif (pour un total de 686 000 euros), ce qui relativise la portée de cette mesure dans ces structures.
Mieux accompagner les centres dès l’installation
Fort de ce contexte, la Cnam ambitionne de traiter plusieurs problématiques lors de ces discussions. La simplification et l’évolution du modèle de rémunération devront permettre de le recentrer sur les « missions caractéristiques » des centres (accès aux soins, publics fragiles, précarité, quartiers prioritaires, etc.) et de tenir compte « de la pluralité » de ces structures. Un des objectifs affichés est « la mise en place progressive de modes de rémunérations alternatifs » au paiement à l’acte, une demande partagée par les praticiens des centres de santé.
Pour ancrer davantage les centres dans les territoires, la « transposition » des dispositifs forfaitaires issus de la nouvelle convention médicale signée l’été dernier avec les médecins libéraux est aussi sur la table. La valorisation de l’engagement mesurable du centre de santé sur un territoire fragile fait également partie des discussions, de même que la prise en charge de publics particuliers (étudiants par exemple).
Enfin, la Cnam reprend à son compte la piste de l’Igas d’un plan d’accompagnement sur mesure par les caisses primaires « dès l’installation du centre de santé ». Objectif : assurer la montée en compétences des gestionnaires, limiter les déviances et les risques de déséquilibre économique.
La Cnam se donne jusqu’à fin août pour parvenir à un accord avec les gestionnaires des centres de santé. À défaut, c’est un règlement arbitral qui se substituerait à l’accord national.
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