« À partir du vendredi 13 octobre, la médecine libérale va s’arrêter pour donner un signal fort aux pouvoirs publics. La situation est tellement grave que nous prenons nos responsabilités », a assumé mardi dernier le Dr Philippe Cuq, coprésident de l'union Avenir Spé - Le Bloc. Le chirurgien libéral était désigné, face à la presse, comme porte-parole d'une intersyndicale réunissant les six organisations représentatives (CSMF, MG France, SML, FMF, UFML-S et Avenir Spé-Le Bloc) mais aussi les syndicats de jeunes et futurs médecins (Anemf, Isnar-IMG, Isni, Jeunes Médecins et Reagjir) et l'association Médecins pour demain. Mot d'ordre : l'arrêt d'activité à partir du 13 octobre, une façon de montrer que le système de santé risque de s'effondrer sans le secteur libéral.
Cette « unité » est « historique » dans un moment « capital », a-t-il expliqué. Après le fiasco des négociations avec l'Assurance-maladie l'hiver dernier, face à un PLFSS 2024 aux « moyens insuffisants » et une proposition de loi Valletoux « contraignante à chaque article », la profession entend parler d'une seule voix.
La crise et le chaos ?
À compter de ce « vendredi noir », « toutes les activités de consultation et d'actes techniques sont déprogrammées, a résumé le Dr Cuq. Les urgences seront transférées à l'hôpital public et les gardes arrêtées, sauf les urgences vitales ». « Ce qui change, c'est que les médecins s'arrêtent », a-t-il martelé, au risque de provoquer une « véritable crise sanitaire ». Lors de l'université de la CSMF, des cadres avaient assumé dans la même sémantique le nécessaire « chaos » pour faire passer le message que la médecine libérale, indispensable, doit être valorisée. Contrairement à 2022, aucune manifestation nationale n'est prévue.
Par ce coup de force, les syndicats grévistes portent deux principales revendications. D'abord, la reprise « urgente » des négociations, avec cette fois des « moyens suffisants » pour redonner du « souffle » à la médecine libérale. La revalorisation de 1,50 euro de la consultation de base est toujours vécue comme une « aumône », dans un contexte de flambée des coûts. La future convention « doit prendre en compte le sous-investissement depuis des années », résume le Dr Cuq.
L'autre revendication cible la proposition de loi du député Frédéric Valletoux (Horizons). Pour l'intersyndicale, ce « texte de bureaucrates » porte de nouvelles obligations en matière de permanence des soins ou d'exercice. Il faut transformer cette loi en un « texte de soutien à la médecine libérale », plaide l'intersyndicale. « Au lieu de dire que les libéraux vont devoir prendre des astreintes à l'hôpital, il paraît plus performant de maintenir dans les cliniques des lignes de garde et de les valoriser », clarifie le Dr Cuq.
Test
L'ampleur de cette mobilisation aura valeur de test. Contrairement à l'hôpital, les libéraux n'ont pas l'obligation de déposer de préavis de grève. Dans le Nord, le Dr Raphaël Dachicourt (Reagjir) est confiant. Les adhérents sont invités à envoyer des lettres recommandées à l'Ordre et à l'ARS pour les informer de leur arrêt d'activité. « Il y a des collectifs qui se montent et participent très activement », témoigne-t-il. Les ARS sont sur le pont depuis plusieurs jours et les réquisitions devraient se multiplier.
Selon le Dr Cuq, la mobilisation sera « forte » dans plusieurs régions et le nombre de grévistes « supérieur » aux effectifs syndiqués (soit 10 % environ des quelque 110 000 médecins libéraux). Dans ce bras de fer, insiste l'intersyndicale, la responsabilité des pouvoirs politiques est « majeure ».
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