Evolution du poids, carences en vitamines et micronutriments mais aussi malaises post-prandiaux sont les trois grands types de conséquences nutritionnelles de la chirurgie de l’obésité. La 51e Journée Annuelle de Nutrition et de diététique s’est focalisée sur les pièges du suivi nutritionnel après chirurgie gastrique.
90 % des chirurgies de l’obésité sont aujourd’hui en France des by-pass gastriques (BPG), opérations en majorité malabsorptives, « une solution qui nous semble le meilleur compromis entre efficacité, physiologie, risques et qualité de vie, le tout avec un long recul (40 ans) » estime le chirurgien Jean-Luc Boulliot (hôpital Cochin, Paris). Cette chirurgie est en plein essor en France (21500 opérations en 2009, soit le double par rapport à 2005), justifié par l’incidence croissante de l’obésité sévère et morbide (3,9 % de la population adulte en 2009) et son efficacité (- 70 % de perte de l’excès de poids à deux ans en moyenne). Une revue de littérature a en outre chiffré la guérison ou l’amélioration à 91 % du diabète, à 95 % des hyperlipidémies, à 87 % de l’HTA et à 95 % du syndrome d’apnées du sommeil.
Mais, en dehors de l’évolution pondérale, le BPG entraîne un second type de conséquences nutritionnelles : « des carences en vitamines et micronutriments, portant essentiellement sur le fer, la vitamine D et le calcium, et plus spécifiquement, la vitamine B12 », détaille le Pr Patrick Rizt (CHU de Toulouse). Cela a conduit la HAS à recommander en 2009 la supplémentation nutritionnelle systématique après by pass gastrique en post-opératoire immédiat (multivitamines, vitamines B1 et 12, D, calcium, fer) discutée au cas par cas pour les techniques d’anneau gastrique ou de sleeve gastrectomie. Un suivi clinique et biologique à long terme est indispensable après toute procédure de chirurgie de l’obésité.
Complications neurologiques
Plus graves, encore, la survenue de complications neurologiques. « Elles sont rares mais gravissimes et le plus souvent liées à des carences en vitamines du groupe B, explique le Dr Christine Poitou (la Pitié Salpêtrière, Paris). Un déficit en vitamine B1 fait courir le risque de séquelles irréversibles comme dans l’encéphalopathie de Gayet Wernicke, ou de polyneuropathies, parfois définitives. Les signes qui doivent alarmer sont une perte de poids rapide, des complications chirurgicales ou des pathologies intercurrentes, des vomissements, une dénutrition protéique, ainsi que des signes neurologiques d’apparition récente. Il faut alors traiter sans retard, sans même attendre la confirmation biologique de carences vitaminiques. » Des troubles de la sensibilité profonde, de l’équilibre, des paresthésies doivent faire penser à une carence en vitamine B12 à laquelle on attribue des scléroses combinées de la moelle survenant à distance d’un by-pass mais aussi des polyneuropathies. « Une atteinte neurologique peut de même être secondaire à des déficits associés en vitamines B6, B12 et cuivre, d’où la nécessité de traiter avec des suppléments spécifiques même en l’absence de dosages », insiste le Dr Poitou. Les déficits en vitamines D (risques osseux) et en fer sont à surveiller, les jeunes femmes en âge de procréer étant en majorité anémiées.