De médecin-major dans la marine à médecin général inspecteur dirigeant l’Institution nationale des Invalides, le parcours du général Rémi Macarez s’est construit à travers de multiples expériences hors du commun. Né en Algérie en 1961, il a démarré sa carrière comme médecin-major dans la marine en 1989 à Saint-Pierre-et-Miquelon et sur les bancs de Terre-Neuve pour assurer le soutien médical des pêcheurs. Parmi les affectations et les opérations extérieures qui ont suivi, la direction de l’hôpital militaire de Kaboul durant l’été 2011 l’a profondément marqué.
« J’étais allé deux fois en Afghanistan en 2007 et 2009 comme ophtalmologiste. Pour cette troisième mission, j’étais le chef d’une équipe multinationale dans un hôpital médico-chirurgical de l’Otan, avec l’anglais comme langue de travail. » Les troupes françaises et de l’Otan sont alors particulièrement sollicitées tandis qu’il dirige « une équipe régulièrement reconfigurée qui a pour mission de fonctionner “comme un seul homme” en cas d’afflux massif de blessés. Dans ce cas, il faut pratiquer une logique de triage tout en tenant compte des goulots d’étranglement au niveau du service d’imagerie ou des blocs opératoires. Ces contraintes, auxquelles s’ajoute la réévaluation régulière des blessés, nécessitent une parfaite coordination de l’équipe. Ce que connaissent bien les hôpitaux civils depuis les attentats terroristes et l’adoption de plans Accueil massif de victimes (Amavi) issus des partages d’expérience avec les hôpitaux militaires. » Partir en opérations extérieures, c’est aussi résoudre l’équation du taux d’occupation des lits pour perpétuer l’une des traditions fortes du service de santé des armées qui consiste à mettre les installations hospitalières au service des populations locales.
Au chapitre des expériences « humaines et managériales » les plus saillantes, le général ajoute tout d'abord celle de médecin chef de l’Hôpital d’instruction des armées (HIA) Clermont-Tonnerre – avec notamment la création d’un partenariat avec le CHU de Brest. Puis celle de médecin chef de l’HIA Percy à Clamart où il est arrivé six mois avant l'épidémie de Covid. « Être manager hospitalier, c’est en permanence gérer la complexité d’activités à risques liés aux soins avec la valence “gestion de crise sanitaire”. S'ajoutent dans les hôpitaux militaires les sollicitations opérationnelles qui impliquent d’autres contraintes en termes de ressources humaines, liées aux conséquences des départs en mission », souligne Rémi Macarez.
Management
En matière de management, le directeur de l’Institution nationale des Invalides depuis octobre 2022, a plusieurs convictions chevillées au corps : « L’écoute et l’attention portée aux équipes permettent de les emmener plus loin. Je veille également à toujours rappeler le rôle des acteurs de l’ombre, comme les agents des services hospitaliers qui réalisent le bionettoyage des chambres pour ne citer qu’un seul exemple. » Durant la crise sanitaire, le médecin chef avait d’ailleurs ouvert la cellule de crise à de nombreux métiers, y compris les assistantes sociales, « pour qu’un maximum d’acteurs connaissent le cap du navire », souligne-t-il.
Chacune de ses expériences professionnelles a par ailleurs forgé son approche du management. Plongeur dans la marine nationale, il apprend le sang-froid. Chirurgien ophtalmologique, il règle les problèmes sans jamais hausser la voix : « Les patients sont sous anesthésie locale et il ne faut surtout pas les angoisser. »
Ambitions
Si le général aime rappeler l’histoire de l’Institution nationale des Invalides – « une belle et noble maison créée par Louis XIV pour prendre soin des blessés de guerre » -, il a surtout à cœur de promouvoir et de développer les innovations de l’établissement dans le champ du grand handicap physique et psychique.
Le centre de réhabilitation post-traumatique, structure de 80 lits s'occupe de la rééducation fonctionnelle et la réhabilitation des blessés physiques et psychiques, militaires mais aussi civils. S'y développe par exemple depuis le printemps dernier un programme d’éducation thérapeutique du patient (ETP) dédié aux activités psychiques. « Ce programme se nomme “se reconstruire après la blessure ensemble”. Nous nous inscrivons dans un temps relativement long durant lequel le patient est acteur de la démarche. Le programme d’ETP a d’ailleurs été imaginé par le service de santé des armés, les soignants de l’INI et les patients. Vous remarquerez que nous préférons parler de blessure plutôt que de blessé, car toute personne fragilisée garde sa part d’identité et d’autonomie. Grâce à des séances individuelles et collectives, nous aidons les personnes souffrantes à repasser du “je” au “nous”, ce qui rejoint là aussi les valeurs militaires », détaille-t-il.
Le général Rémi Macarez cite ensuite l’expertise du centre d’études et de recherches sur l’appareillage des personnes en situations de handicap. Cette entité de l’INI concentre ses recherches sur le handicap moteur. Elle conçoit des fauteuils roulants de plus en plus perfectionnés, des lames de sport ou encore des prothèses bioniques qui utilisent l’intelligence artificielle. « Notre degré d’exigence est très élevé et j’aime également valoriser le banc d’essai de l’ensemble des dispositifs d’appareillage en amont de la décision de remboursement par l’Assurance-maladie. Cette mission, rattachée à notre centre d’études, profite à l’ensemble de la santé publique et illustre particulièrement bien le fait que les avancées médicales dans le cadre de notre défense profitent à la population générale ».
Enfin, le troisième centre accueille les militaires blessés de guerre, et les victimes civiles de guerre et d’attentats. Le général Macarez se retrouve donc à la tête de « trois entités interfacées et synergiques ». Elles n’échappent cependant pas aux tensions en ressources humaines qui affectent le monde de la santé.
« Il nous manque par exemple 20 % d’infirmières. Nous veillons à mieux faire connaître l’Institution mais en Île-de-France, le coût du logement et les temps de transport représentent de réels obstacles », conclut-il.
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