Presque deux décennies après leur introduction dans l'arsenal thérapeutique, les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) sont maintenant reconnus comme les médicaments les plus efficaces pour réduire la sécrétion acide d'origine gastrique. Cependant, le spectre thérapeutique ainsi que les mécanismes d'action intimes de ces produits n'ont pas encore fini d'être appréhendés. Explorer ces différentes facettes a été l'objet d'un symposium organisé par Altana Pharma et présidé par Juan R. Malagelada (Hospital Universitari Vall D'Hebron, Barcelone, Espagne) dans le cadre de la 11th United European Gastroenterology Week qui s'est déroulée à Madrid. Irvin Modlin (Yale University, New Haven, Etats-Unis) a tout d'abord rappelé le long cheminement qui a mené à l'individualisation du reflux gastro-oesophagien (RGO) et à sa prise en charge thérapeutique.
Considéré comme une affection très rare il n'y a qu'un siècle, avec moins de 200 cas rapportés dans le monde, le RGO est maintenant vu comme une maladie quasi endémique, 25 % de la population se plaignant de symptômes dus à un reflux. Le terme d'oesophagite a été introduit au début du XXe siècle par Winklestein qui avait également constaté la participation de l'acidité gastrique au processus morbide. Antiacides et inhibiteurs des récepteurs H2 ont alors été employés pour combattre les symptômes du RGO avant que les inhibiteurs de la pompe à protons ne fassent une entrée remarquée dans ce domaine. Parallèlement, l'approche chirurgicale a fait l'objet d'engouements fluctuants, les interventions endoscopiques demeurant pour l'instant encore expérimentales. La prise en charge du RGO pourrait bénéficier à l'avenir d'agents thérapeutiques d'action plus rapide et plus longue, augmentant la pression du sphincter inférieur de l'oesophage, voire capables d'agir sur les lésions oesophagiennes.
Améliorer la cicatrisation
Quoi qu'il en soit, le traitement pharmacologique aujourd'hui admis comme étant le plus sûr et le plus efficace s'appuie sur les IPP, afin de diminuer la sécrétion acide, de réduire les symptômes et d'améliorer la cicatrisation. George Sachs (UCLA, Los Angeles, Etats-Unis) a, quant à lui, souligné le fait qu'il existe un lien entre la structure, le type de liaison et la fonctionnalité des différents inhibiteurs de la pompe à protons. Ainsi, la durée de l'efficacité de ces agents est en rapport, d'une part, avec la demi-vie de la pompe qui est régulièrement régénérée par l'organisme mais aussi avec la stabilité des ponts disulfures formés entre les formes actives de ces molécules et certaines cystéines de la H+ K+ -ATPase, liaisons qui peuvent être détruites par des substances réductrices comme le glutathion. Plusieurs expérimentations menées avec le pantoprazole* ont, à cet égard, montré que, contrairement à d'autres IPP, il se fixe à deux cystéines, 813 et 822, situées dans le domaine de transport de la pompe à protons. En particulier, la fixation à la cystéine 822 qui se trouve au milieu de la membrane assure, non seulement l'efficacité thérapeutique, mais aussi une moindre sensibilité aux agents réducteurs. Cela expliquerait ainsi la longue durée d'action du pantoprazole par rapport à d'autres IPP, plus facilement déplacés de la pompe à protons.
Request : une échelle d'évaluation symptomatique du RGO
K. D. Bardhan (Rotherham District General Hospital, Royaume-Uni) a présenté un questionnaire spécifique destiné à l'évaluation des symptômes du RGO, utilisable au cours des essais thérapeutiques. On sait en effet que plus de la moitié des patients qui en sont atteints ont une endoscopie normale et que l'affection se caractérise par des symptômes très divers n'appartenant pas forcément à la sphère digestive. Le développement de Request a donc débuté par l'identification de 67 items symptomatiques qui ont ensuite été ramenés, dans une version courte, à sept dimensions : bien-être général, symptômes liés à l'acidité gastrique, symptômes gastriques/abdominaux supérieurs, nausées, troubles du sommeil, autres plaintes. Après vérification empirique et calculs psychométriques, Request a pu être validé. Il s'agit là d'un nouvel outil, simple, efficace et robuste pouvant être employé comme critère principal dans les essais thérapeutique du RGO. Enfin, G. Singh (Stanford University, Etats-Unis) a conclu en explorant les relations entre anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), IPP et inhibiteurs sélectifs de la COX-2. Il a notamment rappelé l'intérêt des IPP chez les patients recevant des AINS, voire des coxibs, chez certains patients à haut risque, en sachant que l'impact de l'éradication de H. pylori est encore mal connu.
Symposium organisé par Altana Pharma. 11th United European Gastroenterology Week, Madrid.
* Le pantoprazole est commercialisé par Altana Pharma sous le nom de Eupantol et par Sanofi-Synthelabo sous celui de Inipomp.
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