À ÉCOUTER Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, c’est un mal « spécifiquement français » et un poison « extrêmement dangereux ». Notre système de protection sociale se finance massivement à crédit (26 milliards d’euros fin 2013, 40 milliards fin 2014...), par des bons de trésorerie, et reporte sur les générations futures la facture croissante des consultations médicales, des prestations familiales ou des retraites actuelles. Pour la Cour, qui a remis cette semaine son rapport annuel sur la Sécu, il est urgent de « casser cette spirale de la dette », non pas par de nouvelles recettes (cette voie montre ses limites), pas davantage par des mesures d’austérité mais en mobilisant les « gisements d’économies considérables » qui résident en particulier dans l’assurance-maladie (notre dossier).
Mettre l’hôpital sous pression.
La Cour recommande de diminuer d’au moins 0,2 point chaque année le taux de progression de l’ONDAM (objectif national de dépenses d’assurance-maladie), soit 2,4 % pour 2014 et même 2,3 % pour 2015 et 2016, des objectifs historiquement bas. En pratique, elle suggère de mettre beaucoup plus fortement sous contrainte le système hospitalier (75 milliards d’euros de dépenses) et d’amplifier les efforts de gestion et de réorganisation des établissements, une pierre dans le jardin des ARS. Les sages suggèrent à cet effet de doper l’hospitalisation à domicile mais surtout de combler le retard conséquent en matière de chirurgie ambulatoire. « L’ONDAM hospitalier, peu transparent (...), est construit de telle manière que les établissements ne sont pas soumis au même effort que le secteur des soins de ville, en particulier en n’ajustant pas suffisamment les tarifs », assène Didier Migaud.
Cette année, les magistrats réservent également quelques flèches à la permanence des soins ambulatoire (700 millions d’euros), un dispositif jugé coûteux, et aux dépenses d’analyses médicales (6 milliards d’euros). La Cour avait ciblé les transports sanitaires en 2012, les médicaments en 2011, l’imagerie médicale et les soins dentaires en 2010, avec des résultats inégaux. Quant au marché de l’optique, il n’est ni transparent, ni régulé, ni concurrentiel.
Comme à chaque exercice, la Cour sera jugée un brin « donneuse de leçons » par des acteurs qui estiment déjà faire des efforts. Didier Migaud s’en tire par une pirouette. « Notre rapport est alarmant mais aussi très encourageant... car il montre bien que des économies sont possibles ».
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