En débouchant dans le boulevard du Montparnasse depuis la rue du Cherche-Midi, le promeneur se retrouve désormais nez à nez avec… un western blot géant. Ces lignes successives, caractéristiques de la migration de protéines sur un gel, étaient on ne peut plus appropriées pour habiller la façade de l’institut de recherche Imagine dédié aux maladies génétiques inauguré la semaine dernière au sein de l’hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP).
Sa particularité ? Concentrer en un même endroit 23 équipes de recherches, dix plateaux techniques et une consultation des maladies rare transférée depuis l’hôpital Necker vers le vaste hall aéré du rez-de-chaussée. « On a à la fois l’expertise clinique et l’expertise biologique et le lieu où l’on peut mener les recherches », s’enthousiasme Le Pr Alain Fischer, un membre fondateur qui occupe la chaire de médecine expérimentale au College de France.
Cette proximité spatiale et la présence de méthodologistes et de statisticiens doivent accélérer un passage entre recherche de traitements et expérimentation clinique que d’aucuns jugent trop poussif. Le Pr Arnold Munnich, qui dirige le département de génétique de l’hôpital Necker, se souvient en effet qu’entre « la découverte du gène responsable de l’achondroplasie et les essais de phase deux et trois que nous menons en ce moment, il s’est écoulé 20 ans ! »
Deux tiers des malades n’ont pas de diagnostics précis
Mais pour respecter ces promesses, les chercheurs d’Imagine vont avoir besoin de fonds, et de nouveaux outils de diagnostics. Selon Arnold Munnich, « sur 20 000 malades français atteints de maladies génétiques rares, 15 000 n’ont pas accès à un diagnostic précis ». Le budget de l'institut est de 40 millions par an, dont 30 sont déjà assurés par les fonds apportés de manière pérenne par l'Inserm, l'université Paris-Descartes, le CNRS et l'AP-HP) et 6,5 millions par le Programme investissement d'avenir. Les 3,5 millions restant doivent être assurés par des partenariats industriels et le mécénat. Le gouvernement fournit déjà 65 millions, une enveloppe gonflée par le classement récent en institut hospitalo-universitaire. Le comité exécutif d’Imagine compte sur les collectes de fonds et les accords avec l’industrie pharmaceutique pour mettre la main sur les 33 derniers millions.
Sous nos pieds les poissons zèbres
Le Dr Patrick Revy et son équipe travaillent sur des maladies génétiques rares causées des défauts de réparation de l’ADN et des télomères. Ils ont quitté un petit pavillon à Necker pour rejoindre leurs nouveaux locaux. « L’avantage principal d’Imagine, c’est la place ! », souligne-t-il. « Beaucoup d’équipes viennent de locaux vétustes et peu pratiques. Il y a aussi le fait que nous ayons accès facilement à des plates-formes technologiques. » Les chercheurs peuvent en effet utiliser, à très bas coût, une animalerie souterraine, dont un grand aquarium en cours de montage pour les poissons zèbres, et des outils d’ordinaire peu disponibles comme des séquenceurs très haut débit. La dernière acquisition en date : l’ImageStream, une sorte de fluorocytomètre dans lequel les chercheurs peuvent photographier et faire des mesures de fluorescences de cellules individuelles.
De nouvelles collaborations en vue
La proximité d’autres équipes ouvre aussi la voie à d’avantage d’échanges. Le Dr Revy doit entamer une collaboration avec le Pr Yanick Crow, un spécialiste du syndrome d’Aicardi-Goutières, une neuroinflamation d’origine génétique, venu tout droit de Manchester pour travailler au sein d’Imagine. « L’année dernière, il a décrit un nouveau gène impliqué dans cette maladie, qui intervient aussi au niveau de la régulation des télomères, ma spécialité. Nous allons essayer d’identifier le comportement des télomères des cellules des patients qu’il a identifiés. »
Article mis à jour le 27 juin 2014
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