L'EPIDEMIE DE fièvre Q survenue en vallée de Chamonix en 2002 est venue rappeler que la présence de foyers de fièvre Q chez les ruminants pouvait avoir des conséquences sur la santé humaine. Entre juin et novembre 2002, 89 cas humains de fièvre Q confirmés sérologiquement ont été recensés dans la région. La maladie, symptomatique chez 71 personnes, a nécessité une antibiothérapie de longue durée chez 9 malades appartenant au groupe dit « à risque » (femmes enceintes et personnes avec valvulopathie). Une enquête cas-témoins réalisée auprès des malades par l'Institut de veille sanitaire a permis d'identifier un facteur de risque principal, le contact rapproché avec des petits ruminants. A la suite de cette épidémie humaine, la Direction générale de l'alimentation a interrogé l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) sur l'évaluation des risques pour la santé publique et les mesures à prendre dans les élevages de ruminants.
Pendant dix-huit mois, un groupe de travail composé d'experts, de membres d'organisations professionnelles et d'un représentant de la Direction de l'alimentation s'est réuni. Son rapport a servi de base aux recommandations que vient de remettre l'Afssa aux ministres chargés de l'Agriculture, de la Santé et de la Consommation.
Cependant, les conclusions de l'agence diffèrent de celles du groupe de travail, notamment en ce qui concerne les recommandations pour la santé humaine. En effet, le groupe préconise des mesures de dépistage en fonction de différents groupes de population : population générale, sujets en contact direct étroit et habituel avec les ruminants (éleveurs, vétérinaires, personnels d'abattoirs), populations à exposition rurale, directe ou indirecte (voisins des exploitations, adeptes du tourisme vert, visiteurs de fermes pédagogiques).
Ces mesures comporteraient, dans les deux derniers groupes, le dépistage systématique des valvulopathies et la pratique d'une sérologie de la fièvre Q chez toutes les femmes enceintes appartenant à l'un de de ces deux groupes. L'Afssa considère que, en ce domaine, devrait être sollicité l'avis « d'instances telles que l'InVS ou la section "Maladies transmissibles" du Conseil supérieur d'hygiène publique de France », plus compétente à « discuter collégialement l'intérêt en santé publique des différentes stratégies de dépistage en population humaine pour un agent infectieux de cette nature », précise son directeur, Martin Hirsch.
Informer les médecins.
Le rapport souligne toutefois la nécessité d'une meilleure information des médecins (fiche disponible sur le site du Centre national de référence des rickettsie : http///ifr48.free.fr/recherche/labo/rickettsies.html). Le diagnostic devra être évoqué devant tout un syndrome pseudo-grippal (fièvre, myalgies, arthralgies, asthénie), une pneumopathie, une hépatite modérée ou une fièvre isolée non expliquée, surtout dans un contexte d'exposition à des ruminants ou un contact avec un animal ayant mis bas.
Le lait, voie de contamination mineure.
Le document souligne également la complexité du problème et les difficultés de maîtrise de l'infection à Coxiella burnetti, compte tenu du manque de données épidémiologiques précises sur la séroprévalence ovine, caprine et bovine de la fièvre Q en France et des limites des outils de diagnostic actuellement disponibles. Si la prévalence en population humaine est sous-évaluée, il est avéré que la plupart des contaminations proviennent des ruminants domestiques (ovins, caprins, bovins). Le principal risque d'exposition des populations humaines, outre le contact direct avec des animaux infectés, est la voie aérienne. La voie alimentaire, plus aisée à contrôler, ne correspond en fait qu'à un mode de contamination mineur.
Contrairement au groupe de travail, qui juge qu'il ne paraît « ni souhaitable ni justifié de préconiser des mesures d'application générale pour le lait cru », l'Afssa propose la mise en place d'un plan d'assainissement visant à identifier tous les élevages infectés et excréteurs. L'agence estime nécessaire « d'affirmer nettement que ne peut être autorisée la mise à la consommation humaine de lait cru provenant de troupeaux infectés et identifiés comme excréteurs ». Elle recommande, entre autres, la pasteurisation (basse à 72 °C pendant 15 secondes) des laits provenant d'élevages infectés et de ne pas faire consommer de lait cru et de produits à base de lait cru aux personnes fragilisées (patients porteurs de valvulopathies cardiaques, patients immunodéprimés et femmes enceintes).
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