La plus curieuse description qu’on ait jamais eu du père Adam est certainement celle de la célèbre visionnaire Antoinette Bourignon, morte en 1680, dans « La Vie continuée de Mademoiselle Bourignon » :
« Adam, le premier homme, dont le corps était pur et plus transparent que le cristal, tout léger et volant pour ainsi dire ; dans lequel et au travers duquel on voyait des vaisseaux et des ruisseaux de lumière qui pénétraient de dedans en dehors par tous ses pores, des vaisseaux qui roulaient en eux des liquides de toutes sortes ; très vives et toutes diaphanes, non seulement d’eau, de lait, mais de feu, d’air et d’autres…
« Il était de stature plus grande que les hommes d’à présent ; les cheveux courts, annelés, tirant sur le noir, la lèvre de dessus couverte d’un petit poil ; et, au lieu des parties bestiales que l’on ne nomme pas, il était fait comme seront établis nos corps dans la vie éternelle, et que je ne sais si je dois dire : il avait dans cette région la structure d’un nez, de même forme que celui du visage ; et c’était là une source d’odeurs et de parfums admirables. De là devaient aussi sortir les hommes dont il avait tous les principes en soi, car il avait dans son ventre un vaisseau où naissaient de petits œufs et un autre vaisseau plein de liqueur qui rendait ces œufs féconds… Et cet œuf, rendu fécond, sortait quelque temps après par ce canal hors de l’homme, en forme d’œuf et venait peu après à éclore en homme parfait ».
Adam, d’après Mademoiselle Bourignon, était donc hermaphrodite et dépourvu d’organes sexuels mâles, remplacés par un nez. Un grand nombre de théologiens ont, en effet, prétendu que toute l’humanité future devait être contenue dans le premier homme, les œufs s’emboîtant comme les étuis d’un tuyau de lorgnettes. D’après eux, Adam ne pouvait avoir de nombril puisqu’il était créé sans placenta, ni cordon. Quand au nez, remplaçant chez Adam les organes génitaux externes, je crois bien que c’est le dévergondage d’imagination anatomique le plus extraordinaire auquel on se soit jamais livré ! »
(La Chronique médicale, octobre 1898)
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