Peu répandu avant les années 2000, le dosage de la 25 OHD a connu ensuite une plus large diffusion grâce à la simplification des techniques de laboratoire. La nette augmentation des prescriptions entre 2005 et 2013 – probablement motivée par les nombreuses publications sur les effets potentiels de la vitamine D – et des coûts de remboursement qui en ont découlé, a conduit la Caisse nationale d’assurance-maladie des travailleurs salariés (CNAM-ts) à saisir la Haute autorité de santé (HAS) pour un avis sur le bon usage des prescriptions des examens biologiques explorant le statut vitaminique D.
« Avoir un avis sur l’intérêt de ce dosage ne paraissait pas illogique, un certain nombre de prescriptions ne se fondant pas sur des indications scientifiquement fondées et reconnues par les recommandations, note le Pr Jean-Claude Souberbielle (hôpital Necker-Enfants malades, Paris). Avec d’autres experts sollicités par la HAS, nous avons exposé, sur la base d’arguments scientifiques, les indications de ce dosage qui nous paraissaient utiles. Or quelle ne fut pas notre surprise de découvrir le rapport de la HAS publié le 30 octobre 2013 (1), qui recommandait de réserver le dosage de la 25 OHD aux indications qui sont celles désormais listées dans le décret paru au JO du 14 août 2014 ! » : suspicion de rachitisme ; suspicion d’ostéomalacie ; suivi ambulatoire de l’adulte transplanté rénal au-delà de trois mois après transplantation ; avant et après chirurgie bariatrique ; évaluation et prise en charge des personnes âgées sujettes aux chutes répétées ; respect des résumés des caractéristiques du produit (RCP) des médicaments préconisant la réalisation de ce dosage.
« Pourtant, comme cela a été rappelé dans un éditorial signé par quelques 92 experts, dont 12 du groupe de travail de la HAS (2), le dosage de la 25 OHD est justifié dans d’autres situations, souligne le Pr Souberbielle. Tout d’abord en cas de fragilité osseuse (fracture peu traumatique ou densité minérale osseuse basse), où un bilan biologique doit éliminer différentes causes, dont l’ostéomalacie. Mais aussi lors de l’exploration du métabolisme phosphocalcique, incluant le dosage de la parathormone, qui ne peut être interprété correctement sans connaître la concentration en 25 OHD. Par ailleurs, si la chirurgie bariatrique constitue une indication de ce dosage, pourquoi n’est-ce pas le cas d’autres affections responsables de malabsorption, comme la maladie cœliaque, certaines entéropathies chroniques, la mucoviscidose ou la maladie de Crohn ? De la même manière, au-delà du suivi après transplantation rénale, le dosage de la 25 OHD est justifié chez tous les insuffisants rénaux chroniques à partir du stade 3b et chez tous les dialysés chroniques, dans le but de contrôler l’hyperparathyroïdie secondaire, comme cela est stipulé dans les recommandations internationales Kdigo ».
Les Sociétés françaises de biologie clinique, de dialyse, d’endocrinologie, d’endocrinologie pédiatrique, de gériatrie et gérontologie, de médecine nucléaire, de mucoviscidose, de néphrologie, de néphrologie pédiatrique, de rhumatologie et le groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses se sont exprimés dans un communiqué de presse conjoint (3). Ils estiment que les situations de fragilité osseuse répondent à l’indication de suspicion d’ostéomalacie, qui fait l’objet d’un remboursement. Ils soulignent que les conditions de remboursement restrictives sont une source de confusion, tant pour les prescripteurs que pour les biologistes, et préconisent que le prescripteur indique sur l’ordonnance si la situation est ou non remboursée. « Encadrer les remboursements n’est pas criticable, mais cela doit se fonder sur les données scientifiques, à l’instar de ce qui a récemment été réalisé en Australie », conclut le Pr Jean-Claude Souberbielle.
D’après un entretien avec le Pr Jean-Claude Souberbielle, hôpital Necker-Enfants malades, Paris.
(1) http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2013-10/uti…
(2) Ann Biol Clin 2014.72 ;4:juillet-août 2014.
(3) http://www.sfendocrino.org/article/639/limitation-du-remboursement-du-d…
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