Malgré des critères diagnostiques bien codifiés, la migraine de l’enfant passe encore souvent à l’as.
Sémiologie atypique ou tronquée, intrications fréquentes avec d’autres céphalées, etc., le diagnostic de migraine peut vite tourner au casse-tête chez l’enfant. Sur le papier, les critères diagnostiques retenus par l’Internatinal Headache Society en 2003 (IHS) sont pourtant assez classiques et reprennent, à deux exceptions près (durée minimum des crises plus courtes et céphalée bilatérale plutôt qu’unilatérale), ceux admis chez l’adulte. Ainsi, selon l’ISH, le diagnostic de migraine sans aura peut être posé chez l’enfant face à des céphalées durant 1 à 48 heure(s), se répétant au moins 5 fois par mois, s’accompagnant de photo/phonophobie et/ou de nausées/vomissements et présentant au moins 2 des caractéristiques suivantes : localisation bilatérale, pulsatile, intensité modérée ou sévère, aggravation par l’activité physique.
« Mais à côté de ces critères officiels, d’autres symptômes non officiels vont très souvent être observés dans la pratique » prévient le Pr Daniel Annequin*. Des sensations vertigineuses et des douleurs abdominales sont ainsi rapportées dans près de 40 % des cas. Chez certains enfants, ces symptômes peuvent même être au premier plan voir résumer à eux seuls le tableau clinique de la crise migraineuse faisant alors parler d’équivalents migraineux. Trois types d’équivalents migraineux ont été officiellement retenus par l’ISH dans la dernière classification des céphalées : les crises de vertige paroxystique bénin, les crises de migraine abdominale et les crises de vomissements cycliques. « Ces équivalents migraineux existent bel et bien insiste le Pr Annequin et conduisent souvent à des explorations et des séjours aux urgences répétés avant que le diagnostic de migraine ne soit posé ». Les « vomisseurs cycliques » qui présentent des épisodes de vomissements répétés et massifs sur plusieurs jours peuvent être particulièrement trompeurs.
Par ailleurs, « bien souvent cohabitent des tableaux mixtes de migraine et de céphalées de tension ce qui peut être source de confusion ». Pour les différencier, « l’analyse sémiologique doit faire préciser s’il existe des accès sévères qui limitent l’activité de l’enfant (en faveur de la migraine) ou s’il s’agit plutôt de petits maux de tête non invalidants évoquant plus une céphalée de tension ».
Confusion avec la sinusite
Autre piège diagnostique courant : les migraines avec aura visuelle souvent étiquetées à tort céphalées d’origine ophtalmologique. Pourtant, « un trouble visuel peut donner des petits maux de tête mais pas des éléments paroxystiques cliniques comme ceux de la migraine » souligne le Pr Annequin. Certaines migraines peuvent aussi être confondues avec une sinusite. « Dans la grande majorité des cas, ce que l’on appelle crise de sinusite est en réalité une crise de migraine » dénonce le Pr Annequin chiffre à l’appui : dans une étude réalisée en 2004 auprès de 2991 patients qui avaient un diagnostic de sinusite, 90 % étaient en fait d’authentiques migraineux. L’erreur est d’autant plus facile qu’au scanner, en population générale, un épaississement de sinus peut être retrouvé dans 50 % des cas.
D'où l’intérêt de ne pas explorer trop facilement une migraine potentielle. « A vouloir trop imagé les gens on va trouver des choses qui n’ont rien à voir avec la migraine », insiste le Pr Annequin, rappelant que « le diagnostic de migraine est essentiellement clinique ».
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