Jugement clinique et investigations
« La définition de l'insuffisance cardiaque n'est pas simple », déclare le Dr Eric Garbarz. En effet, c'est un état physiopathologique dans lequel une anomalie de la fonction cardiaque est responsable de l'incapacité du cœur à assurer un débit suffisant pour couvrir les besoins des tissus. Il n'y a pas de valeur seuil du débit qui puisse signer l'insuffisance cardiaque. « Ce qu'il faut savoir, poursuit E. Garbarz, c'est que, à un moment de l'évolution de l'insuffisance cardiaque, il y a production de Brain Natriuretic Peptid (BNP) sous l'effet de la distension ventriculaire. Le diagnostic d'insuffisance cardiaque repose donc sur le jugement clinique et les investigations complémentaires. »
Si l'évaluation de l'insuffisance cardiaque systolique repose sur la mesure de la fraction d'éjection ventriculaire gauche, le diagnostic de l'insuffisance cardiaque diastolique est plus compliqué et nécessite un consensus du clinicien et de l'échocardiographiste, en sachant que les indices échographiques ne sont pas consensuels et très souvent discutables. Dans les dernières recommandations européennes, la détermination des marqueurs natriurétiques (BNP) fait partie de la démarche diagnostique de l'insuffisance cardiaque.
Dyspnée aiguë
La procédure diagnostique « classique » d'insuffisance cardiaque, qui repose sur les données cliniques et radiologiques, est fréquemment prise en défaut, tout particulièrement en situation d'urgence (dyspnée aiguë). Il s'agit là d'une des indications les plus validées du dosage du BNP. Cependant, un certain nombre de facteurs viennent compliquer l'interprétation des résultats. Le premier d'entre eux est l'insuffisance rénale, problème fréquemment rencontré. « Mais, précise E. Garbarz, il est probablequ'à terme le BNP sera un bon outil pour adapter la volémie de ces patients en cas d'épuration rénale. Le taux de BNP varie également en fonction de circonstances physiologiques (sexe, âge, poids) et pathologiques (syndromes coronariens aigus, cœur pulmonaire, hypertension artérielle, cirrhose hépatique, sepsis). »
Une meilleure connaissance de ces déterminismes permettra de renforcer la valeur prédictive positive du test en modulant les seuils de positivité. En cas d'embolie pulmonaire, le BNP n'est pas un outil diagnostique à proprement parler, mais, dans un tiers des cas, il peut exister une élévation du BNP.
« Ce que l'on sait,souligne E. Garbarz
, c'est que des valeurs supérieures à 75 pg/ml sont synonymes de mauvais pronostics. »Hypertension pulmonaire
En cas d'hypertension pulmonaire chronique, il y a un retentissement sur les pressions ventriculaires droites et le BNP peut être élevé, quelle que soit l'étiologie. D'autres pathologies pulmonaires peuvent être associées à l'élévation modérée du BNP : bronchopathies chroniques, cancer, par exemple.
Pronostic
Dans l'insuffisance cardiaque chronique, l'évaluation du pronostic est essentielle. A ce sujet, on sait que des taux élevés de BNP représentent un facteur prédictif de mort subite presque toujours lié à un trouble du rythme.
Dans l'ischémie myocardique, le BNP n'est pas un outil diagnostique, mais un élément pronostique indépendant de l'insuffisance cardiaque et couplé à d'autres marqueurs.
Le cardiologue est très demandeur de marqueurs biologiques permettant d'évaluer le pronostic, avec ses applications en termes de réhospitalisation et de mortalité, et surtout d'adaptation thérapeutique. Après les années 1990, qui furent les années troponine, les prochaines seront probablement celles du BNP.
Journées internationales de biologie. D'après les communications des Drs Eric Garbarz et Guillaume Lefevre,
hôpital Tenon, Paris.
Les valeurs du BNP
Pour un patient dyspnéique en contexte d'urgence, des valeurs de BNP < 50 pg/ml ont une valeur prédictive négative de 96 %. Au-delà de 1 000, on peut parler d'insuffisance cardiaque décompensée. Entre 100 et 500, certains patients sont en insuffisance cardiaque décompensée (70 % des cas), d'autres présentent une insuffisance ventriculaire gauche bien compensée, mais avec une autre cause de dyspnée. Les syndromes coronariens aigus constituent également une cause d'élévation du BNP.
Certains patients peuvent présenter une authentique insuffisance cardiaque aiguë sans élévation du BNP, essentiellement dans deux situations :
- soit les symptômes sont tellement récents que le BNP n'a pas eu le temps de s'élever en périphérie ;
- soit la cause de l'insuffisance cardiaque se situe en amont du ventricule gauche.
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