« Le travail des deux parlementaires a abouti à une proposition non de compromis mais de dépassement », a déclaré François Hollande en recevant le rapport et la proposition de loi (PPL) de Jean Leonetti et Alain Claeys. De nombreuses voix se sont élevées pour saluer le renforcement des droits des malades et des devoirs des médecins.
« Cette proposition de loi répond à la demande très largement partagée par nos concitoyens de deux nouveaux droits, que nous avions soulignée dans notre rapport d’octobre concernant le débat public sur la fin de vie, débat qui s’est déroulé depuis maintenant deux ans et demi, réagit le Pr Jean Claude Ameisen, président du Comité consultatif national d’éthique. « En proposant que la personne en fin de vie, ou la personne qui a décidé d’arrêter les traitements qui la maintiennent en vie, ait le droit d’obtenir, si elle le demande, une sédation profonde jusqu’au décès, et en proposant que les directives anticipées s’imposent aux soignants, ce texte met la volonté de la personne au centre. Il marque une étape importante, et s’inscrit dans la continuité de la loi de 2002 relative aux droits des malades », poursuit-il.
Le Pr Ameisen voit aussi une avancée dans l’obligation faite au médecin de s’enquérir, auprès de la famille et des proches, « de ce qu’elles savent de la volonté qui a été exprimée par le patient » lorsque ce dernier ne peut la communiquer.
Le Pr Didier Sicard, qui avait mené une première mission sur le sujet en 2012, salue un texte « consensuel, qui répond à une majorité des attentes des Français ». « Savoir qu’on ne sera pas tenu de subir un acharnement thérapeutique de la part des médecins ou de ses proches, savoir qu’on a la possibilité de dire "je n’en peux plus", est de nature à apaiser les citoyens », explique-t-il. Le Président d’honneur du CCNE se félicite aussi de l’annonce de François Hollande d’un plan triennal de développement des soins palliatifs, incluant une formation obligatoire et commune des soignants. « Les médecins sont embarrassés ; agissant en fonction de leur expérience et histoire, ils sont parfois en porte à faux par rapport à la société ».
L’univers des soins palliatifs satisfait
Tout aussi satisfait des annonces en faveur des soins palliatifs, le président de la Société Française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) le Dr Vincent Morel estime que la PPL « apporte des réponses concrètes dans le champ de la médecine et des soins, en cohérence avec le code de la santé ». Le droit à la sédation reste, selon lui, dans la mission d’une médecine qui soulage, et les directives anticipées garantissent l’écoute du patient, sans être absolument opposables. « La SFAP plaide pour que soit reconnue comme un acte de prévention médicale l’aide à la rédaction de ces DA », ajoute-t-il.
Le Dr Éric Kariger, ancien chef du service de soins palliatifs du CHU de Reims qui a accueilli Vincent Lambert, se réjouit, que l’interdit de donner la mort n’ait pas été touché. « Ce texte renforce le droit des patients et le devoir des médecins ; en soins palliatifs, le premier objectif est de soulager la souffrance pour rendre la fin de vie la plus humaine et digne ». Et d’insister sur l’intention qui guide le geste du médecin : « en poussant la seringue, je peux être un très bon médecin comme je peux tuer. »
Rien ne change, pour l’ADMD
Au-delà du monde médical, la PPL de la mission Leonetti-Claeys a été saluée par 10 députés socialistes dont le médecin Olivier Véran, et a convaincu la députée Europe Écologie les Verts Véronique Massonneau, qui présentera de son côté le 29 janvier une proposition de loi ouvrant le droit à l’euthanasie. « On a eu raison de faire pression et nous continuerons lors du débat parlementaire, car l’aide active à mourir manque dans la PPL Leonetti-Claeys ; mais je suis agréablement surprise de voir que la parole du patient y est respectée », a-t-elle indiqué.
Voix discordante, le Président de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) Jean-Luc Roméro dénonce « une loi Leonetti de gauche, faite par des médecins, pour des médecins », malgré l’opposabilité des directives anticipées, « seule avancée ». « Il faut une loi globale prévoyant un accès universel aux soins palliatifs et à l’euthanasie, sinon le malade reste condamné à mourir de faim ou de soif », milite-t-il.
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