La chèvre, la brebis, mais pas la vache : allergie dangereuse

Publié le 17/02/2003
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« L'allergie au lait de chèvre et de brebis sans allergie au lait de vache est rare et d'apparition récente », expliquent des spécialistes de pneumoallergologie de l'hôpital Necker (1). Cette équipe a rapporté douze observations de patients qui n'avaient pas d'antécédent d'intolérance aux protéines du lait de vache, et qui ont présenté des manifestations allergiques sévères après ingestion de fromage de chèvre et/ou de brebis.

Il s'agit de 12 garçons qui avaient, à l'apparition des symptômes, un âge moyen de 6,5 ans (2-13 ans) et qui ont été vus par cette équipe à un âge moyen de 9 ans (4-15 ans).
Les manifestations cliniques (associés de diverses façons) étaient les suivantes : syndrome oral (1/12), vomissements (3/12), oedème du visage (8/12), urticaire étendue (5/12), asthme (4/12) et oedème de Quincke (3/12).
Antécédents de dermatite atopique, asthme et/ou rhino-conjonctivite allergique : tous ces enfants avaient un terrain atopique. De plus, 7 sur les 12 avaient une autre allergie alimentaire connus (dont 6/7 une allergie à l'arachide).
Tous ces enfants présentaient une positivité aux tests cutanés allergologiques au fromage de chèvre et/ou de brebis.
« L'allergie au lait de chèvre et/ou de brebis ne doit pas être méconnue. Il existe une homologie de structure de 97 % entre les caséines de lait de chèvre et de lait de brebis. Cette allergie peut être à l'origine de manifestations cliniques graves. Elle peut exister en dehors d'une intolérance aux protéines du lait de vache, même si les caséines de lait de chèvre et de brebis ont une homologie de structure de 85 % avec celle du lait de vache », concluent les auteurs.

Homologie de structure

Des spécialistes de l'hôpital Ambroise-Paré de Boulogne et de l'hôpital des Enfants de Toulouse (2) analysent les observations de 26 enfants âgés en moyenne de 5,5 ans (de 15 mois à 16 ans) au moment de la première réaction allergique. Tous présentaient d'autres manifestations allergiques (dont asthme : 21 enfants) ; 6 avaient eu une allergie aux protéines du lait de vache « qui s'est résolue lors de l'allergie au lait de chèvre et/ou de brebis ».
Si l'ingestion de fromage de chèvre et/ou de brebis est le plus souvent en cause (21 fois), les auteurs signalent que des accidents sont survenus avec des plats cuisinés(n = 9), des fromages de vache ou de buffle contaminés lors de la fabrication (n = 3) ou des bonbons (1 = 1).
Les manifestations allergiques étaient d'ordre cutané (urticaire : 13 fois ; angiooedème : 17 fois, dont 7 fois laryngé), d'ordre respiratoire (asthme ; 22 % des cas) ou encore il s'agissait d'un syndrome oral (2 cas) ou de douleurs abdominales (1 fois). Parfois, les symptômes ont été sévères : 2 enfants ont présenté trois chocs anaphylactiques ; 5 ont été hospitalisés en raison de la gravité du tableau.

Une augmentation de fréquence préoccupante

Le diagnostic a été confirmé par la positivité des prick-tests avec les aliments natifs ou les extraits commerciaux et/ou des IgE spécifiques.
A noter que 15 enfants présentaient d'autres allergies alimentaires et que 12 fois il s'agissait d'allergies alimentaires multiples.
« L'augmentation de fréquence de cette allergie est préoccupante. Elle survient chez des polyallergiques alimentaires. Les signes sont plus sévères que pour les autres aliments. Le diagnostic en est facile. Des doses infimes d'aliments cachés peuvent déclencher des manifestations sévères », concluent les auteurs.

(1) F. Chedevergne, E. Paty, P. Scheinmann.
(2) Bidat E., Rancé F., Baranès, Goulamhoussen S.
« Revue française d'allergologie et d'immunologie clinique », janvier 2003, p. 94.

Dr E. de V.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7276