Malgré une circulaire de 2001 sur les dispositifs médicaux à usage unique, les modalités d'utilisation des gaines en prévention du risque infectieux associées aux actes invasifs d'exploration n'étaient pas réglementées. C'est chose faite avec la diffusion des recommandations validées par la commission spécialisée sécurité sanitaire du Haut Conseil de la la santé publique. Deux années de travail ont été nécessaires au CTINILS (comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins) et au groupe de travail présidé par le Dr Joseph Hajjar, chargé de les rédiger.
Qu'elles soient publiées en pleine affaire des dysfonctionnements des cabinets de radiologie du Nord est «une pure coïncidence», assure le Dr Hajjar, qui préside aux destinées de la Société française d'hygiène hospitalière (SFHH) depuis juin 2007.
Les sondes d'échographie relèvent, d'après le guide des bonnes pratiques de désinfection des dispositifs médicaux, d'un matériel de catégorie «semi-critique» nécessitant une désinfection de «niveau intermédiaire». Depuis l'apparition des gaines, «chacun faisait à peu près ce qu'il voulait». Les protocoles étaient simplifiés en raison d'un temps de traitement trop long par rapport au nombre élevé d'actes à effectuer, de l'altération du matériel par des désinfections répétées et de l'incompatibilité des sondes d'échographie avec l'acide peracétique, produit recommandé pour la désinfection des appareils utilisés pour les examens de la sphère ORL et le carrefour aéro-digestif, du fait du contact possible avec une formation lymphoïde à fort tropisme pour le variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (risque prion). De plus, certains de ces appareils, thermosensibles, ne peuvent être stérilisés qu'à froid. «Nous devions trouver une solution qui permette la pratique des examens, qui garantisse la sécurité des patients et qui, dans le même temps, soit coût/efficace», souligne le Dr Hajjar.
Une revue de la littérature réalisée pour évaluer le risque infectieux a mis en évidence «l'extrême rareté des publications» sur le sujet. Une seule étude comportait des contrôles bactériologiques effectués sur des sondes d'échographie transvaginale recouvertes d'une gaine. La présence de bactéries résiduelles était retrouvée dans un cas ( Acinetobacter) sur les 46 sondes testées et aucun cas de transmission infectieuse n'était signalé. Ni en urologie ni en ORL, il n'a été rapporté de contamination virale ou bactériologique.
Le groupe s'est donc prononcé «en faveur de l'utilisation d'une gaine de protection marquée CE comme une alternative aux procédures usuelles de traitement», sous réserve «d'appliquer strictement les règles de bonnes pratiques définies dans le document ».
L'utilisation du préservatif «n'est pas recommandée car il n'est pas conçu pour ce type de protection et ne peut pas être approprié à tous les types de sonde».
En l'absence d'utilisation de gaine ou en cas de problème lors de l'utilisation de la gaine, la désinfection de niveau intermédiaire doit être appliquée. Les praticiens doivent être formés à mettre en place et à retirer la gaine. Les précautions standard d'hygiène des mains et de port de gants doivent être respectées.
Afin de détecter toute rupture de la gaine (de 1 à 8 % des cas), «l'examen visuel par l'opérateur est le contrôle essentiel». Elle permet de mettre en évidence d'éventuelles souillures sur la sonde ou sur la lingette à usage unique sèche utilisée pour essuyer la sonde. La désinfection de bas niveau n'est réalisée qu'en cas d'absence de souillure témoignant d'une rupture de la gaine.
Comme toutes recommandations, celles-ci tiennent compte de l'état des connaissances du moment. Elles pourront être révisées si de nouvelles procédures ou de nouvelles techniques validées apportaient une amélioration.
Les interrogations de deux hygiénistes
Les Drs Pierre-Yves Allouch et Guillaume Kac, médecins hygiénistes, jugent les recommandations insuffisantes. «Je suis très surpris de ces recommandations, explique au “Quotidien'' le Dr Allouch, chef du service hygiène hospitalière, au centre hospitalier de Versailles. Les gaines ne sont pas la panacée.» Le Dr Kac, médecin hygiéniste depuis dix ans à l'hôpital européen Georges-Pompidou, ajoute qu' «aucun autre pays ne préconise une désinfection dite de bas niveau».
Ils contestent également le fait que la procédure dépende de l'opérateur. Pour le Dr Kac, «il faut un système unique pour tous, indépendant de l'opérateur».
Selon les deux praticiens, le risque infectieux demeure. Pour preuve, des études qui ont montré la présence de germes sur les sondes, avec ou sans gaine, précise le Dr Allouch.
Le Dr Kac coordonne une étude française multicentrique sur la quantification de la contamination microbiologique des sondes dont les résultats sont en cours d'analyse. Il assure que, «malgré toutes les précautions, il peut rester des bactéries et des virus même en l'absence de souillure». Selon lui, dès qu'il y a incertitude, il faut s'abstenir. Il entend alerter les autorités sanitaires et le président de la Société d'hygiène hospitalière.
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