PIÈCE MAJEURE de ce cycle, « Mazeppa » revient, quatre ans après sa création, avec une distribution en partie renouvelée. Cet opéra s’apparente plus à une fresque historique qu’à un opéra romantique, avec ses tableaux tirés de la légende de Mazeppa, chef cosaque qui voulait l’indépendance de l’Ukraine contre la farouche détermination du tsar Pierre le Grand de l’annexer à la Russie. On est surpris du résultat assez « conventionnel », mais très heureusement fidèle à l’œuvre, venant d’un homme de théâtre de la trempe de Peter Stein. Les décors, alternativement stylisés et réalistes, de Ferdinand Wögerbauer, les costumes d’Anna Maria Heinrich, très orientalistes, et les éclairages raffinés de Duane Schuler et Japhy Weidman sont admirables dans la mesure où ils participent au drame, qui est forcément assez peu scénique dans son absence d’unité de temps et sa fragmentation en tableaux.
La réalisation musicale est cependant ce qui restera, autant par la direction toujours très vivante de Kirill Petrenko à la tête d’un Orchestre de l’Opéra de Lyon en belle forme, que grâce à une distribution majoritairement russophone d’un niveau exceptionnel. Les voix du Mazeppa de Nikolaï Putilin et du Katchoubeï d’Anatoli Kotscherga sont, dans leurs affrontements, magnifiquement timbrées. La Maria d’Olga Guryakov est vocalement superbe, et parfaitement émouvante dans la folie qui la prend au dernier acte, quand elle découvre que son mari est l’assassin de son père. Belle prestation aussi de Misha Didyk dans le rôle d’Andreï, son amoureux évincé.
Politique de troupe.
Il n’est pas facile, pour trois opéras donnés ainsi en alternance, de pratiquer une politique de troupe. Pourtant, cela semblait une évidence de retrouver Nikolaï Putilin, le Mazeppa de la veille, dans le rôle autoritaire du comte Tomski dans une « Dame de pique » reprise de 2008 avec des décors allégés, rendant le drame plus fluide ; Mariana Torasova en gouvernante de Tatiana, dans un superbe « Eugène Onéguine », seulement un peu plombé par la lourdeur du décor et la lenteur de ses métamorphoses, puis en une terrifiante et somnambulique comtesse de « la Dame de pique ». De même pour Olga Guriakova, qui, confirmant sa fibre dramatique en Lisa dans « la Dame de pique », est capable d’être à la fois sanglée de bonnes manières dans son air au clavecin au début de l’action et ravagée par son amour déçu dans le morbide dénouement final de sa noyade dans la Néva. Kirill Petrenko a su se montrer trois chefs en un en adaptant sa direction et sa maîtrise du bel Orchestre de l’Opéra de Lyon dans ces trois ouvrages si différents mais où se reconnaît toujours la plume pathétique et superbe de Tchaïkovski.
Opéra de Lyon (tél. 0826.305.325 et www.opera-lyon.com). Prochain spectacle : « Hänsel und Gretel » d’Humperdinck, mise en scène de L. Pelly, dir. J. Willig, jusqu’au16 juin.
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