« The Lancet » a annoncé ce 4 juin le retrait de l'étude du Dr Mehra sur l'hydroxychloroquine et la chloroquine, dont la publication le 22 mai dernier avait fait l'effet d'un coup de tonnerre. Cet article avait entraîné la suspension temporaire des essais cliniques testant l'HCQ dans le monde entier par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), et jusqu'à l'interdiction, en France, de sa prescription dans le cadre du traitement du Covid-19.
La décision du « Lancet » fait suite à la rétraction de trois des quatre auteurs de l'étude observationnelle. Dans un commentaire, Mandeep Mehra (du Brigham and Women’s Hospital Heart and Vascular Center, Boston), Frank Ruschitzka, et Amit Patel font état des multiples critiques qu'a suscitées leur étude, en particulier au sujet des données fournies par Surgisphere, une petite société américaine d'analyse des data de santé créée en 2008 par...Sapan Desai, le quatrième auteur de l'étude.
Aucune garantie sur l'origine des données primaires
Les trois auteurs disent avoir lancé, en accord avec Sapan Desai, un audit indépendant de Surgisphere à la suite des ces critiques pour évaluer l'origine de la base de données, confirmer qu'elle était complète et répliquer les analyses présentées dans l'article. Or « nos peer reviewers indépendants nous ont informés du refus de Surgisphere de transférer leur base de données, les contrats passés avec les clients, ainsi que le rapport d'audit de leur certification ISO, au nom des accords de confidentialité », lit-on. Les experts missionnés « n'ont pas pu conduire une revue indépendante et nous ont informés de leur retrait du processus d'évaluation par les pairs », ajoutent-ils.
« Nous ne pouvons plus nous porter garants de la véracité des sources des données primaires », reconnaissent-ils, demandant la rétractation de leur papier et présentant leurs excuses aux éditeurs et aux lecteurs.
Seconde rétractation dans le « NEJM »
En parallèle, le Dr Mehra, et quatre autres auteurs, dont Amit Patel, et, plus étonnamment, le directeur de Surgisphere Sapan Desai, demandent ce 4 juin la rétraction d'une autre étude, publiée le 1er mai dans « The New England Journal of Medicine ». Celle-ci porte sur l'association entre maladie cardiovasculaire et les traitements par inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (ACE) ou bloqueurs des récepteurs de l'angiotensine (BRA) chez des patients hospitalisés pour Covid-19. Le papier se fonde également sur les données de 169 hôpitaux d'Asie, d'Europe et d'Amérique du Nord, fournies par Surgisphere.
Dans un communiqué plus sibyllin que celui du « Lancet », les auteurs justifient leur demande de rétractation avec les mêmes arguments : « tous les auteurs ne peuvent se porter garants des données primaires, qui ne peuvent en outre être transmises à des experts indépendants ».
Au-delà de la polémique autour de l'hydroxychloroquine, ces derniers rebondissements, qui se polarisent autour de la société Surgisphere, mettent en lumière l'importance des données dans les recherches scientifiques aujourd'hui. « Rétractation de l’article du Lancet : on voit le danger énorme de la marchandisation des données de santé. C’est récupérer des données n’importe comment pour les vendre à n’importe qui pour faire n’importe quoi et tout cela sous prétexte de l’intérêt de santé publique ! », a notamment réagi sur twitter le professeur d'épidémiologie et de santé publique Mahmoud Zureik.
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