C'est la première femme à diriger une organisation syndicale représentative des médecins libéraux, du moins chez les praticiens installés. La Fédération des médecins de France (FMF) vient d'élire à sa tête le Dr Corinne Sauder, qui succède au Dr Jean-Paul Hamon, généraliste bien connu du secteur et des médias qui ne s'est pas représenté après neuf ans de mandat.
Âgée de 61 ans, cette médecin généraliste ostéopathe à Olivet (Loiret), présidente de l'Union de médecins à expertise particulière (UMEP) a gagné à deux voix près (20 voix contre 18) contre un autre médecin généraliste, le Dr Claude Bronner, président de la branche MG de la FMF. La nouvelle présidente a confié ses motivations et ses priorités au « Quotidien ».
LE QUOTIDIEN : Vous prenez la tête de la FMF. Quel est votre parcours et quelles sont vos priorités ?
Dr LE SAUDER : C'est le Dr Jean-Claude Régi, ancien président de la FMF, qui m'a mis les pieds à l'étrier en 2009. Je me suis investie dans la vie syndicale et j'ai occupé plusieurs postes en tant que trésorière en 2011, secrétaire générale en 2013 puis vice-présidente en 2015. Au niveau local, je suis aussi élue à l'URPS médecins du Centre.
En me présentant à la présidence, j'ai souhaité apporter du renouveau pour restimuler l'équipe de la FMF et la rajeunir. Par exemple, le nouveau vice-président de la branche généraliste, le Dr Mickaël Frugier, a 38 ans.
Je voudrais que les jeunes soient formés et accompagnés pour s'investir dans la vie syndicale et prouver aussi que les femmes médecins peuvent défendre la médecine libérale. Cela ne sera pas facile car, même si j'ai le soutien de l'équipe, c'est une lourde responsabilité. En tant que femme, on ne me pardonnera pas une parole malheureuse ou un faux pas. Mais je suis prête à relever ce défi dans la transparence, l'absence de conflits d'intérêts et l'éthique. Les réformes à venir, tant sur le plan organisationnel que tarifaire, seront déterminantes pour la médecine libérale.
Des négociations conventionnelles reprendront à la rentrée. Est-ce que la revalorisation tarifaire est l'une de vos priorités ?
L'attractivité de la médecine libérale est une priorité syndicale. Cela passe par une revalorisation du tarif de la consultation et non par des forfaits qui n'évoluent pas dans le temps. Nous demandons que les médecins français soient rémunérés à la même hauteur que la plupart des médecins européens ! L'acte médical devrait être à 45 euros ou 50 euros.
Mais je souhaite aussi porter d'autres revendications pour améliorer les conditions d'exercice, par exemple en matière de protection sociale, en particulier pour les femmes médecins. Je me suis battue il y a quelques années pour que les consœurs aient des congés maternité supplémentaires. Je souhaite aussi travailler avec les élus locaux pour permettre aux jeunes médecins parents d'avoir des crèches ouvertes plus tard ou encore des logements dédiés pour les internes.
Les élections professionnelles auront lieu au printemps 2021. Quel est le cap ?
La FMF doit avoir des représentants partout en région et au niveau national. Ce sont les deux niveaux indispensables pour faire avancer nos revendications et nos idées.
Dans les prochaines semaines, nous allons préparer notre programme qui sera présenté en octobre, lors de l'assemblée générale. Je voudrais que la FMF soit plus ouverte à l'ensemble des médecins, quel que soit leur mode d'exercice ou leur spécialité. Nous allons aussi défendre les médecins isolés qui représentent tout de même 70 % des médecins en exercice. Le fait d'être une femme va peut-être attirer d'autres femmes dans les instances régionales et nationales !
Le Ségur de la santé touche à sa fin. Qu'en attendez-vous pour la médecine libérale ?
C'est un Ségur de l'hôpital. Pour l'instant, il n'y a aucune promesse faite pour les médecins libéraux. Je n'ai pas l'impression que la ville soit beaucoup écoutée.
Sur le chantier numéro 4 portant sur les territoires, la FMF a fait des propositions mais j'ai l'impression qu'on est encore en train de créer des strates administratives supplémentaires, avec des structures lourdes de type CPTS [communautés professionnelles territoriales de santé]. Pourtant, à côté de ce modèle, les professionnels de santé doivent pouvoir formaliser d'autres modes d'exercice plus souples. Il s'agit des équipes de soins ouvertes avec un médecin, une infirmière et un kiné par exemple. Cela évite le formalisme qui rend l'exercice coordonné trop complexe.
Vous êtes médecin généraliste ostéopathe. Est-ce que la médecine à expertise particulière (MEP) sera l'un de vos combats ?
Je ne suis pas élue pour porter des revendications spécifiques pour les MEP, comme l'ostéopathie ou l'hypnose. Mais au sujet des médecines complémentaires alternatives, il faudra clarifier les champs de compétence et la formation pour éviter les dérives dangereuses pour les patients.
Le bureau de la FMF en cours de construction. Présidente : Dr Corinne Le Sauder. Président d'honneur : Dr Jean-Paul Hamon. Vice-président généraliste : Dr Mickaël Frugier. Trésorier : Dr Dominique Dreux. Trésorière adjointe : Dr Claire Cadix. Secrétaires généraux : Drs Éric Blondet, Jean Marc Laruelle, Christophe Thibault
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