Le gouvernement a dévoilé ce vendredi les grands axes du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022 (PLFSS), qui sera examiné en conseil des ministres le 6 octobre (puis à l'Assemblée nationale en séance à partir du 19 octobre). L'exécutif défend un budget de « sortie de crise » qui promet une « respiration » aux acteurs du système de santé, avec la concrétisation des accords du Ségur et un soutien plus appuyé à l'hôpital qu'à la médecine de ville. Florilège.
Un déficit en baisse de 13 milliards (mais toujours massif…)
Selon le PLFSS 2022, le solde du régime général (et fonds de solidarité vieillesse – FSV) se redresserait nettement de 13 milliards d'euros, passant de -34,6 milliards attendus en 2021 à -21,6 milliards l'an prochain. Même si la situation comptable reste très dégradée, l'amélioration s'explique par la forte baisse programmée des dépenses de crise sanitaire (seulement 4,9 milliards provisionnés dans l'ONDAM 2022 – vaccins et tests – après 15 milliards de frais exceptionnels en 2021 au titre de l'achat de vaccins, tests, médicaments, IJ dérogatoires, soutien aux hôpitaux, etc.). Parallèlement, les recettes progresseraient de 3,9 %, sous l'effet du rebond de la masse salariale du secteur privé (+6,6 %). C'est toujours la branche maladie qui concentrera l'essentiel du déséquilibre l'an prochain (-19,7 milliards attendus).
À noter que les prévisions à cinq ans sont « très incertaines », admet le gouvernement, puisqu'elles dépendent de l'évolution de la situation sanitaire et de la vigueur de la reprise. Néanmoins, toute perspective de rétablissement du régime général à court terme s'évanouit. « Si on avait promis un retour à l'équilibre dans les trois ans, on nous aurait accusés au mieux de présenter un budget insincère », confie-t-on à Bercy.

ONDAM 2022 : +2,6% (hors crise et Ségur), l'hôpital mieux loti
Comme l'an passé, la construction du fameux « baromètre » de l'ONDAM (objectif national de dépenses d'assurance-maladie), toujours scruté par les acteurs du secteur, doit s'analyser à plusieurs à niveaux.
Si l'on écarte toutes les dépenses exceptionnelles liées à la crise sanitaire et au Ségur de la santé, l'ONDAM général progressera de 2,6 % à champ constant, une évolution qualifiée de « dynamique » par l'exécutif. L'année 2022 est celle d'une « respiration », résume-t-on. Si l'on y intègre cette fois les engagements du Ségur (toujours hors dépenses de crise Covid), l'ONDAM sera en hausse de 3,8 % (soit 8,4 milliards d'euros supplémentaires injectés dans le système de santé). En revanche, l'évolution sera légèrement négative l'an prochain (-0,6 %) sur l'ensemble du périmètre par rapport à l'objectif rectifié de 2021 (en raison de la baisse attendue des dépenses de crise) .
L'analyse des sous-objectifs (dotations par secteur de soins) illustre la volonté de sanctuariser l'hôpital avec une croissance de 4,1 % de l'enveloppe des établissements de santé (+2,7 % hors Ségur), ce qui signifie 3,7 milliards de financements nouveaux (hors provision liée à la crise sanitaire). « Exceptionnellement, aucune économie n'est demandée aux établissements », a martelé Bercy ce vendredi, même si la FHF a déjà fait savoir que la hausse risquait de ne pas suffire pour soulager les maux des établissements. Par contraste, les soins de ville affichent une moindre progression (+3,3 %), même si l'exécutif souligne que ce taux permet de garantir la concrétisation des engagements tarifaires de l'avenant 9.

Les suites du Ségur, 2,7 milliards en 2022
Les engagements du Ségur de l'été 2020 se poursuivent dans ce budget. Le PLFSS intègre une enveloppe conséquente de 2,7 milliards d'euros pour financer la montée en charge des revalorisations à l’hôpital (un milliard d'euros pour la refonte des grilles salariales et l'intéressement collectif), étendre ces mesures au secteur médico-social (660 millions dont la revalo socle de 183 euros net par mois) et traduire les suites du Ségur (environ 560 millions pour les revalorisations des catégories C, des aides soignants, des sages-femmes, du statut de praticien contractuel unique, des carrières hospitalo-universitaires, les primes managériales, primes d'encadrement, etc.).

Le PLFSS poursuit aussi le déploiement du plan de relance de
l’investissement en santé. En 2022, deux milliards d’euros sont prévus au sein de l’ONDAM dont 500 millions d'euros d'investissements « du quotidien dans les hôpitaux », 119 millions pour le développement de l’usage du numérique à l’hôpital, 440 millions pour des investissements sur le champ du médico-social…

Accès aux soins de ville
Côté santé publique, le budget prévoit de prendre en charge intégralement la contraception des femmes jusqu'à 25 ans. Trois millions de femmes entre 18 et 25 ans pourront en bénéficier.
Sur l'accès aux soins visuels, le PLFSS prévoit d'autoriser l'accès direct – donc sans prescription médicale préalable – aux orthoptistes pour les « bilans visuels simples » mais aussi les prescriptions d'aides visuelles pour les corrections faibles (lunettes, lentilles de contact). Six millions de patients seraient concernés, selon le ministère de la Santé.
Côté parcours de soins en ville, le texte budgète les mesures de l'avenant 9 à la convention médicale dont la participation des médecins libéraux au service d’accès aux soins (SAS) dans le cadre de la prise en charge des soins non programmés, associant réponse hospitalière et libérale.
Il généralise aussi plusieurs expérimentations menées au titre de l'article 51 dont « ETAPES » et prise en charge diabète gestationnel par télésurveillance, de même que l'expérimentation « Mission retrouve ton cap » pour la prévention de l’obésité infantile, ou encore l'expérimentation de dépistage du VIH en laboratoire de biologie médicale, sans ordonnance.
Budget médicament : un milliard en plus mais des baisses de prix
Le ministère met en avant une « augmentation inédite » des dépenses remboursées des produits de santé, de l'ordre d'un milliard d'euros (dans le cadre d'une croissance moyenne du secteur à 2,4%), et ce en dépit d'économies classiques sur les baisses de prix (à hauteur de 1,2 milliard).
Pour faciliter l'accès aux produits onéreux à l'hôpital, le texte élargit dès 2022 le périmètre de la liste en sus (du tarif des séjours hospitaliers) à l'ensemble des produits de santé ayant un service médical rendu (SMR) ou service attendu (SA) important, apportant une amélioration clinique reconnue par la HAS. Le PLFSS permettra aussi la mise à disposition des médicaments apportant une amélioration du SMR « dès l'obtention de l'avis de la HAS ».
Autonomie : soutien aux Ehpad et maintien à domicile
À défaut de grande loi sur l'autonomie, le gouvernement a injecté dans ce budget de la Sécu plusieurs mesures dévoilées dès jeudi par le Premier ministre pour favoriser la modernisation des Ehpad et le maintien à domicile. Il prévoit l’instauration dès 2022 d’un tarif plancher national de 22 euros par heure d’intervention pour les SAAD prestataires dispensant des prestations d’aide et d’accompagnement dans le cadre de plans d’aide APA (allocation personnalisée d’autonomie) et PCH (prestation de compensation du handicap.
Dans les Ehpad, dont l'exécutif promet la transformation progressive du modèle, le PLFSS promet d'augmenter dès 2022 le temps de présence de médecin coordonnateur à un seuil minimal de « 0,4 équivalent temps plein » (ETP), soit une présence minimale de deux jours par semaine. Aujourd'hui, 1 500 Ehpad ne bénéficient pas de ce temps médical. Le financement d'une astreinte infirmière de nuit par Ehpad (qui ne concerne que 40 % des établissements) sera généralisé d'ici à 2023.
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