Alors que 20 % de l'ensemble des prescriptions sont réalisées hors autorisation de mise sur le marché* (AMM) – mais jusqu'à 80 % en pédiatrie hospitalo-universitaire ou 34 % en gériatrie dans le traitement de la douleur – , les Ordres nationaux des médecins et des pharmaciens (CNOM et CNOP) publient une fiche pratique détaillée pour rappeler les règles de prescription et de délivrance de médicaments hors AMM, mais aussi les responsabilités attachées pour le prescripteur et le dispensateur.
Si la prescription et la dispensation hors AMM sont bien sûr possibles, « elles doivent demeurer exceptionnelles et dans l’intérêt des patients, en l’absence d’alternative thérapeutique médicamenteuse appropriée, et uniquement si elles sont considérées comme indispensables à l’amélioration ou la stabilisation de l’état clinique », recadrent les instances ordinales. Le hors-AMM engage pleinement la responsabilité du médecin comme du dispensateur.
La fiche mémo mentionne de façon synthétique les informations utiles. De la définition de l'autorisation de mise sur le marché (obligatoire, octroyée par les autorités européennes ou nationales, accompagnée du résumé des caractéristiques du produit – RCP) à la légalité du hors-AMM, en passant par les exceptions légales (autorisation temporaire d'utilisation – ATU – ou recommandation temporaire d'utilisation – RTU) mais aussi les cas exceptionnels lorsque l'intérêt du patient le commande, en l'absence d'alternative thérapeutique médicamenteuse appropriée.
Dialogue et vigilance
Dans le cadre du hors-AMM, le médecin a une obligation d'information « renforcée » des patients (sur la non-conformité de la prescription par rapport à son AMM, les risques encourus et bénéfices potentiels, etc.) et s'assurer de recevoir son consentement éclairé. Il doit porter explicitement la mention « hors AMM » sur l'ordonnance et tracer les raisons dans le dossier patient. « Plus que d’ordinaire, l’importance du colloque singulier comme d’une démarche thérapeutique fondée sur les données acquises de la science, deux des fondements de notre exercice, prennent tout leur sens quand le médecin fait ce choix [du hors-AMM] », insiste le Dr Patrick Bouet, président de l'Ordre national des médecins,.
Et dans cette situation, le dialogue entre médecins et officinaux doit être favorisé, insistent les instances ordinales. « Le pharmacien doit redoubler de vigilance lors de son analyse pharmaceutique. Il doit apporter un conseil renforcé au patient, attirer son attention sur les effets indésirables ou encore le mettre en garde contre la possibilité d’interaction avec des médicaments d’automédication », rappelle Carine Wolf-Thal, présidente de l'Ordre national des pharmaciens.
Alors qu'un collectif de médecins « Laissons les médecins prescrire » s'était constitué en mars pour plaider en faveur de la prescription de l'hydroxychloroquine en ville contre le Covid-19, cette piqûre de rappel ordinale tombe à point nommé. Contacté par « Le Quotidien », l'Ordre des médecins assure toutefois que cette mise au point sur le hors-AMM est en préparation de longue date, en réaction aux affaires médiatisées du Mediator ou de la Dépakine. En avril, le CNOM avait haussé le ton contre certains protocoles de traitement illégaux du Covid-19.
*Chiffres des Académies de médecine et de pharmacie (novembre 2018)
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