Le nouveau ministre de la Santé est loin d’être un inconnu pour les médecins. Déjà parce que c’est l’un des leurs : Olivier Alphonse Véran est neurologue de formation. Il a exercé au CHU de Grenoble où il a mis en place et dirigé l’hôpital de jour de neurologie. Ensuite parce qu’il gravite dans le monde de la santé depuis plus de dix ans, d’abord président de l’Intersyndicat national des Internes des hôpitaux (ISNIH, devenu ISNI), puis député de l’Isère en 2012, rapporteur du PLFSS en 2014 et du projet de loi de santé la même année, puis rapporteur général du budget de la Sécu, fonction qu’il a inaugurée.
Déjà pressenti en 2017 pour devenir ministre de la Santé, il accède presque sans surprise à cette fonction le 22 février dernier, à deux mois de son quarantième anniversaire (il est né le 22 avril 1980), pour remplacer au pied levé Agnès Buzyn, candidate à la mairie de Paris. Qui est Olivier Véran ? « Le Quotidien » a déniché quelques anecdotes, parfois peu connues, qui retracent son parcours fulgurant.
Classé 527e aux ECN en 2004
Olivier Véran a goûté à la toute première édition des épreuves classantes nationales, ce concours redouté qui ouvre aux étudiants la porte de l’internat. Bien classé, 527e sur 3 729, le jeune homme a eu le choix de sa spécialité (neurologue) et du CHU d’affectation (Grenoble). Il soutient sa thèse de médecine en 2008, sous la direction de Laurent Vercueil. Le titre de son mémoire : « Epileptic confusion in the elderly ».
En 2007, il défend la liberté d’installation à la télé
Septembre 2007 : les étudiants sont en grève contre le projet du gouvernement et de la ministre de la Santé de l'époque, Roselyne Bachelot, de limiter la liberté d’installation et lutter contre les déserts médicaux. Secrétaire général des associations des internes des hôpitaux de Grenoble, Olivier Véran est en première ligne. Sur le plateau de France 3, il argumente : « Cette réforme nous prend à rebrousse-poil parce que nous pensons qu’elle est mauvaise. »
Le jour où il a dû quitter son service
C’est « Le Monde » qui raconte l’anecdote. Jeune interne, Olivier Véran voit mourir en service de réanimation une étudiante en médecine atteinte d’un cancer, qui a deux ans de plus que lui. « C’est la première et dernière fois que j’ai dû quitter un service alors que j’étais en fonction pour aller dans la cage d’escalier et pleurer », raconte-t-il au quotidien national.
Il est passé par Sciences-Po
En 2009, le neurologue suit un master en gestion politique de santé, sous la direction de Didier Tabuteau, créateur de la chaire Santé de Sciences-Po et ancien chef de cabinet de Bernard Kouchner au ministère de la Santé. « Ce qui m’a frappé, c’est sa curiosité intellectuelle et son humilité. Sa démarche était de bien connaître le système avant de démarrer de nouvelles fonctions. À l’époque, je ne savais pas qu’il aurait cette carrière », disait de lui Didier Tabuteau en 2014.
Repéré par Geneviève Fioraso
C’est en 2007, pendant le mouvement de grève des internes à laquelle Oliver Véran participe activement que Geneviève Fioraso le repère. Quelques semaines après cette rencontre, le jeune homme prend la tête de l’ISNIH. « J’ai été marquée car en trois jours, il est passé de la coordination locale à la coordination nationale, racontera-t-elle au "Quotidien” en 2014. Il est clair dans son expression, enthousiaste, a du charisme et a un bon sens de la communication. » En 2012, la députée de l’Isère se tourne naturellement vers lui pour le poste de suppléant, alors qu’elle fait campagne pour sa réélection. Après l’élection de François Hollande à la présidence, elle est appelée au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Son suppléant, Olivier Véran, siège alors pour la première fois à l’Assemblée nationale à l’âge de 32 ans.
Ce qu’il pense du tiers payant généralisé
En 2015, Olivier Véran est rapporteur du premier volet de la loi de santé (prévention). Marisol Touraine veut alors imposer aux médecins le tiers payant généralisé. Solidaire avec la ministre de la Santé, Olivier Véran défend le projet… avec quelques réserves. « J’écoute religieusement la ministre qui dit qu’elle ira jusqu’au bout de cette réforme », dit à l’époque le neurologue. Mais il insiste sur la nécessité de proposer aux médecins un système fiable, simple et non pénalisant pour la profession : « Nous devons d’abord être capables de démontrer que le tiers payant fonctionne parfaitement, avec un interlocuteur unique », assure-t-il en ajoutant qu’« il ne faut pas que les médecins généralistes passent du temps de consultation à vérifier les droits de leurs patients. »
Ses combats à l’Assemblée : les mercenaires à l’hôpital, la lutte contre l’anorexie…
Un an après son entrée à l’Assemblée nationale, Olivier Véran s’attaque au recours excessif des médecins intérimaires dans un rapport parlementaire sur l’emploi médical temporaire à l’hôpital. Un an plus tard, la ministre de la Santé de l’époque, Marisol Touraine, annoncera sa volonté de plafonner la rémunération des médecins intérimaires. Mais Olivier Véran s’est surtout illustré sur la scène médiatique avec un amendement visant à lutter contre l’anorexie en interdisant aux mannequins d’exercer lorsque leur indice de masse corporelle est trop faible. La mesure faisait partie du projet de loi de santé de Marisol Touraine, dont Olivier Véran était le rapporteur et dans lequel il défendait également des mesures contre le binge-drinking et pour la mise en place des salles de consommation de drogue à moindre risque
« Marcheur » aux côtés de Jérôme Salomon
L’actuel ministre de la Santé et son numéro deux, directeur général de la santé, dirigent en tandem la lutte contre l’épidémie de coronavirus depuis le mois de février. Mais Olivier Véran et Jérôme Salomon ont déjà « marché » ensemble durant la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron dont ils étaient les conseillers santé. C’est en 2016 qu’Olivier Véran fait la rencontre d’Emmanuel Macron. Un an plus tard, en mars 2017, il quitte le parti socialiste et devient député de l’Isère sous l’étiquette « En Marche ».
Sa compagne est députée, son ex-femme gynécologue
Oliver Véran et Coralie Dubost se seraient rencontrés sur les bancs de l’Assemblée nationale. Juriste de formation, la jeune femme de 37 ans est une « marcheuse » de la première heure, élue députée de l’Hérault en 2017. L’année dernière, elle était rapporteuse de la loi bioéthique. Avant cela, Olivier Véran a vécu dix ans avec son épouse, gynécologue, et mère de ses deux enfants.
Il s’affiche avec un médaillé olympique de taekwondo
Leur récente amitié remonterait à une rencontre dans le cadre du programme des « Young leaders » de la France China Foundation qui distingue chaque année des profils à « haut potentiel ». L’athlète de taekwondo, Pascal Gentil, double médaillé de bronze aux Jeux olympiques, fait partie de la promotion 2018, Olivier Véran la suivante. En juillet 2019, ils posent tous les deux en position de combat dans l’hémicycle lors d’une visite de l’Assemblée nationale. « Avec Pascal Gentil, la politique est un sport de combat mais aussi d'amitié », commente l’actuel ministre de la Santé.
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