La start-up lyonnaise Sibius développe une application destinée aux professionnels de santé afin de les aider à détecter des troubles neurocognitifs comme l’autisme. Elle utilise pour cela le mouvement des yeux, qui dépend de l’état mental du sujet. La jeune pousse cherche actuellement des volontaires pour récolter des données afin de renforcer son algorithme avant de lancer une étude clinique.
La start-up est née en septembre 2019 à Lyon de la rencontre entre Guillaume Bézie, son fondateur, et des chercheurs du CNRS, en particulier Angela Sirigu de l’Institut des sciences cognitives Marc Jeannerod. La directrice de recherche a travaillé pendant 40 ans sur l’autisme et a mis au point une nouvelle approche visuelle pour le détecter.
« La cognition fait énormément intervenir la vision, souligne Guillaume Bézie. La manière dont nous visualisons les images dépend de notre état mental ». Grâce à l’« eye tracking », le suivi des mouvements oculaires, les chercheurs ont montré qu’il était possible d’évaluer des pathologies comme l’autisme. « Le problème, c’est que cette technique est cantonnée à des unités de recherche et n’est pas disponible pour les médecins », regrette Guillaume Bézie. C’est pourquoi Sibius a mis au point une application qui permet de reproduire l’« eye tracking ». « Le test consiste en un jeu d’exploration d’image sur écran tactile, avec un algorithme qui va analyser l’image comme un “eye tracker” », explique le fondateur de Sibius.
Réduire l’errance diagnostique
Concrètement, la personne doit passer son doigt sur une image floue afin de la rendre nette. Les mouvements effectués par le doigt sont captés et analysés par l’intelligence artificielle de Sibius. « Sur une image, nous avons remarqué qu’il existe des points d’intérêt pour l’œil humain, qui sont toujours les mêmes, détaille Guillaume Bézie. C’est ce que nous appelons des cartes de chaleur. Nous avons créé un algorithme qui permet de trouver ce que l’œil humain va regarder. Nous l’avons comparé à l’“eye tracking” dans une publication parue dans "Nature Communications" (1) et nous avons montré que les deux explorations étaient superposables ». Le test développé par Sibius peut être réalisé en quelques minutes par un médecin ou une infirmière. Une première étude sur 22 sujets a montré qu’il était possible d’identifier les personnes autistes.
Pour le fondateur de la start-up, le déploiement de ce test permettrait de réduire l’errance diagnostique dans l’autisme et de prendre en charge plus précocement ces troubles. Sibius a noué des collaborations avec les Hospices civils de Lyon, un hôpital en Sardaigne et des centres médico-psychologiques à Paris afin de collecter des données anonymisées et encryptées de différents types de sujets, jeunes ou moins jeunes, sains ou avec des pathologies. « Pour pouvoir effectuer des comparaisons, nous devons en réunir beaucoup », souligne Guillaume Bézie.
Sibius propose aux collégiens, lycéens et écoliers du primaire de faire un « don digital » de 5 à 10 minutes de leur temps pour leurs recherches. L’étape suivante sera de lancer une étude clinique afin d’évaluer la performance du dispositif. « Notre but est d’avoir un outil de repérage simple qui puisse être utilisé en première ligne auprès des enfants par les professionnels de santé », conclut-il.
(1) G. Lio et al., Nature Communications, doi.org/10.1038/s41467-019-13285-0, 2019
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