En quoi consistent les projets de coopération entre professionnels de santé ?
Dr Carine Salliot. Cette procédure a l’aval des autorités de santé. Son but est de donner de l’attrait aux carrières paramédicales et recentrer l’activité médicale sur des missions d’expertise. Les protocoles de coopération permettent de mettre en place, à titre dérogatoire et à l’initiative des professionnels sur le terrain, le transfert d’actes ou d’activités de soins ainsi que la réorganisation des modes d’intervention auprès des patients. Depuis juillet 2019, l’article 66 de la loi OTSS (organisation et transformation du système de santé dans le cadre de Ma santé 2022) prévoit le déploiement de ces coopérations sur tout le territoire national, la simplification de la procédure et la mise en place de deux modèles de protocoles (nationaux et locaux).
Comment vont-ils être déployés ?
Les protocoles à vocation nationale seront autorisés par arrêté ministériel et pilotés par un nouveau Comité national des coopérations interprofessionnelles, qui définira les priorités. Concrètement, des équipes médicales candidatent pour rédiger un protocole de coopération suivant la thématique retenue. Si leur projet formalisé par écrit est accepté, il peut être déployé sur tout le territoire. A Orléans, notre service de rhumatologie a bâti un protocole de coopération rhumatologues-infirmières et l’a soumis à l’ARS-Centre Val de Loire, qui vérifiera sa pertinence et sa faisabilité, avant de le transmettre à la Haute Autorité de santé (HAS). Sa thématique est la « Consultation annuelle de suivi des rhumatismes inflammatoires chroniques par un(e) infirmier(e) diplômé(e) d’État spécialisé(e) en rhumatologie ».
Quels sont les prérequis pour les protocoles de coopération ?
Ils répondent à des exigences prévues dans l’article 51 de la loi HPST (2009). Sont, entre autres, à définir dans le protocole : la liste des actes dérogatoires, les délégants, les délégués, le lieu d’exercice, les patients concernés, leur consentement et les résultats attendus. Dans notre cas, les exigences prévoient une coopération entre les délégants rhumatologues et les déléguées infirmières, préalablement formées, avec différentes démarches qualité. Tous les critères de sécurité et de qualité des soins seront remplis.
En fait, l’éventail des professionnels de santé et des paramédicaux qui peuvent coopérer est large et toutes les combinaisons sont possibles quel que soit le mode d’exercice et le cadre, dès lors que l’acte transféré aura un sens. En outre, un décret du 6 septembre 2019 prévoit des primes de coopération pour les délégués (100 euros mensuels).
Qu’apporterait un tel protocole à votre hôpital ?
Notre projet a été bâti par deux rhumatologues du service, l’infirmière spécialisée en rhumatologie, un cadre de santé et le cadre supérieur de notre pôle. Son objectif est de libérer du temps médical pour réduire les délais de consultation pour les nouveaux patients, en respectant les recommandations de deux consultations annuelles dans le cadre du suivi des rhumatismes inflammatoires chroniques.
Pour quels malades ?
Les patients concernés sont atteints de rhumatismes inflammatoires traités et contrôlés (spondyloarthrites, polyarthrite rhumatoïde, rhumatisme psoriasique). Le rhumatologue référent proposera à ses patients éligibles une consultation de suivi par une infirmière à six mois. Il leur remettra une lettre d’information avec consentement. Le patient pourra, à tout moment, résilier sa participation au protocole. Les délégants rhumatologues devront signer un formulaire d’adhésion, participer à la formation de l’infirmière, être joignables pendant la consultation et continueront à suivre les patients annuellement. Enfin, un suivi du protocole de coopération serait effectué, avec un questionnaire de satisfaction adressé aux patients et des indicateurs à détailler. L’objectif est de recevoir 400 patients en consultation déléguée par an à Orléans et de réduire les délais de consultation « première fois » de trois mois.