Un électrocardiogramme (ECG) normal l’est-il vraiment ? L’intelligence artificielle (IA) nous montre que non en repérant des signaux subtils invisibles. Un algorithme développé par une collaboration franco-internationale permet de détecter des anomalies intermittentes du rythme cardiaque à l’origine de syncopes et de morts subites à partir de tracés apparemment sans particularité.
Pour ce travail réalisé à partir de 320 000 ECG ambulatoires sur 14 jours, l’équipe a entraîné le modèle sur les 24 dernières heures de l’enregistrement (qui ne présentait pas de bradycardie) dans l’objectif d’identifier des pauses sinusales en journée (supérieure ou égale à 3 secondes), toute pause sinusale de plus de 6 secondes, un bloc auriculo-ventriculaire (BAV) complet ou un composite dans les 13 jours précédents. Les résultats sont publiés dans Circulation. Ont participé à ce travail Philips/Cardiologs, l’Institut cardiovasculaire Paris Sud (ICPS), l’AP-HM, l’AP-HP et des chercheurs de la Harvard Medical School.
La même équipe avait déjà publié en mars des travaux dans le European Heart Journal sur une IA capable de prédire la survenue de tachycardies ventriculaires à risque de mort subite à l’aide d’un modèle entraîné à partir de plus de 240 000 ECG. « Nous nous sommes rendu compte qu’il était possible d’identifier, sur l’analyse de leur signal électrique pendant 24 heures, les sujets susceptibles de développer une arythmie cardiaque grave dans les deux semaines qui suivent », avait alors expliqué le Dr Laurent Fiorina, directeur médical en charge de l’IA chez Philips, cardiologue à l’ICPS et auteur principal des deux études.
Un algorithme qui remonte le temps
Ici, l’algorithme, qui « remonte le temps », permet d’identifier les patients à haut risque avant une récidive. Une avancée alors que, dans près d’un cas sur deux de syncopes, aucun diagnostic clair n’est posé, que 30 % des patients récidivent et que la mortalité à un an atteint 10 %. Ce modèle d’IA est utile à la fois pour le triage diagnostique et en prévention, « notamment par la pose d’un pacemaker si nécessaire », indique dans un communiqué de l’équipe le Pr Jean-Claude Deharo, cardiologue au CHU de La Timone (AP-HM) et auteur senior de l’étude.
Les chercheurs rapportent une bonne efficacité, avec, pour les quatre critères étudiés, une aire sous la courbe allant de 0,87 (toute pause sinusale) à 0,93 (BAV), avec une valeur prédictive négative entre 97,9 et 99,9 %. De plus, l’équipe a testé avec succès la capacité de l’algorithme à prédire à partir des premières 24 heures de l’enregistrement la survenue de bradycardies dans les 13 jours suivants ; l’aire sous la courbe était de 0,88 pour le critère composite.
« Cela pourrait devenir un outil de tri essentiel aux urgences après syncope pour mieux cibler les patients à surveiller ou à traiter », estime dans le communiqué le Pr Eloi Marijon de l’hôpital européen Georges Pompidou (AP-HP) et co-auteur de l’étude. Les deux études, l’une en montrant un potentiel de prédiction de survenue de tachycardies ventriculaires, l’autre en identifiant a posteriori des événements passés inaperçus de bradycardie, ouvrent un nouveau champ pour le diagnostic et la prise en charge en cardiologie, notamment à l’aide de nouveaux dispositifs connectés.
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