APRÈS AVOIR ÉTÉ VALIDÉE dans les formes résistantes de maladie de Parkinson, la stimulation cérébrale profonde (SCP) a progressivement gagné le champ de la psychiatrie. Ainsi, cette approche a été évaluée et a montré des bénéfices thérapeutiques dans les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) graves, ce qui, en France, a conduit à la création d'un PHRC national dont les résultats viennent d'être publiés (1). Plus récemment, les recherches se sont orientées vers les formes sévères et résistantes de dépression. Ainsi, des auteurs canadiens qui avaient initialement expérimenté cette procédure chez 6 patients (2) ont rapporté des données obtenues chez 20 malades, avec 35 % de rémission à six mois maintenues à un an (3). Une équipe allemande (4) a aussi publié des résultats intéressants sur 3 patients et une étude américaine (5) vient de mettre en évidence des bénéfices chez 15 patients. Comme le précise le Pr Philippe Fossati, «contrairement aux TOC où les régions impliquées sont relativement limitées, il existe, dans la dépression, plusieurs zones candidates à la stimulation». Ainsi, dans le travail canadien, c'est la substance blanche de la partie antérieure du cortex subgénual (CG 25) qui a été choisie alors que les auteurs allemands ont effectué une stimulation dans une région beaucoup plus interne, au niveau du nucleus accumbens. Et c'est une cible encore différente qui a été élue dans une étude française (STHYM), coordonnée par le Pr Bruno Millet (CHU de Rennes), qui doit débuter prochainement dans le cadre d'un PHRC national.
Des malades d'exception.
Si l'engouement des psychiatres pour la SCP a été motivé par l'impasse thérapeutique dans laquelle sont plongés certains patients souffrant de dépression résistant à tous les traitements (antidépresseurs, psychothérapies, électroconvulsivothérapie), il est important de souligner, explique le Pr Fossati, «qu'il s'agit là d'un traitement qui reste du domaine de la recherche et destiné à des malades d'exception». Cette technique, qui a certes l'avantage de la réversibilité, requiert en effet un plateau technique particulier et des équipes dédiées de neurochirurgiens, de psychiatres et de neurologues.
Il s'agit d'une méthode thérapeutique, non dénuée de risques et d'effets secondaires (qui seront évalués dans l'étude nationale bientôt mise en place), et qui doit être réservée à des équipes spécialisées et strictement encadrées.
Il faut d'ailleurs saluer l'implication particulière des psychiatres dans ce domaine, qui voient aussi, dans cette recherche thérapeutique, l'occasion d'éclairer la physiopathologie des différentes formes de dépression.
D'après un entretien avec le Pr Philippe Fossati, centre hospitalier de la Pitié-Salpêtrière, Paris. (1) Mallet L, Pelissolo A. N Engl J Med 2008;359:2121-34. (2) Mayberg HS et coll. Deep brain stimulation for treatment-resistant depression. Neuron 2005;45:651-60.
(3) Lozano AM et coll. Subcallosal cingulate gyrus deep brain stimulatiyon for treatment-resistant depression. Biol Psychiatry 2008;64:461-7. (4) Schlaepfer TE et coll. Deep brain stimulation to reward circuitry alleviates anhedonia in refarctory major depression. Neuropsychopharmacology. 2008;33:368-77.
(5) Malone DA Jr et coll. Deep brain stimulation of the ventral capsule/ventral striatum for treatment-resistant depression. Biol Psychiatry 2008 Oct 6.
Les autres techniques de stimulation
n l'électroconvulsivothérapie (ECT) ;
n la stimulation magnétique transcrânienne (TMS) ;
n la stimulation corticale ;
n la stimulation corticale directe transcrânienne (TDCS) ;
n la stimulation du nerf vague (VNS) ;
n la Magneto Seizure Therapy (MST).
Des patients recherchés
Dans la dépression, la stimulation cérébrale profonde s'adresse à un très petit nombre de patients, puisque souffrant de formes réfractaires à tous les traitements aujourd'hui disponibles.
Afin d'inclure le maximum de sujets, tous les psychiatres français suivant des malades susceptibles d'être inclus dans l'essai STHYM, peuvent s'adresser :
- au Pr Philippe Fossati. Tél. 01.42.16.12.33, e-mail : philippe.fossati@psl.aphp.fr ;
- ou au Pr Bruno Millet. Tél. 02.99.28.43.04, e-mail : bruno.millet@univ-rennes1.fr.
À cet égard, une vaste enquête, intitulée EDREC (étude sur la dépression résistante et chronique), dirigée par les Prs Millet et Fossati et le Dr Jaafari va prochainement être menée* auprès des psychiatres français afin de mieux connaître la réalité des pratiques cliniques concernant la prise en charge des patients souffrant de dépression résistante et d'individualiser les sujets potentiellement candidats à la stimulation cérébrale profonde.
* Grâce au soutien des Laboratoires Ardix médical.
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