Les causes de déshydratation
La déshydratation peut résulter d'une réduction des apports et/ou d'une augmentation des pertes en eau, par plusieurs mécanismes.
1. L'altération du mécanisme de la soif
La quantité de boisson nécessaire à un individu est normalement régulée par la soif. L'organisme est informé du besoin d'eau par des stimulations hormonales, en particulier l'angiotensine II et l'ADH. Mais la sensation de soif chez le sujet âgé est déjà synonyme de déshydratation. En effet, chez une personne pesant 70 kg, le seuil du déclenchement de la soif apparaît lorsque le déficit hydrique atteint 1,5 l d'eau, alors que, chez un adulte de même poids, le même déficit entraîne une soif très intense. En cas d'élévation de la température du milieu ambiant ou de fièvre, le déclenchement retardé de la soif explique la fréquence de la survenue de la déshydratation chez les sujets âgés…
2. La modification de la physiologie rénale.Il y a une diminution fonctionnelle rénale ,avec notamment une diminution de la réabsorption rénale du sodium, une diminution de la sécrétion d'ADH (ce qui fait se lever la nuit), une modification du système rénine-angiotensine et une baisse de la sensibilité à la vasopressine.
3. Une difficulté d'accès à la boisson, en raison de troubles de la mobilité, de troubles visuels ou d'un statut mental altéré qui modifie les capacités de communication ou de compréhension de son environnement.
4. Les troubles de déglutitionet même la simple dysphagie.
5. La peur de l'incontinence tend à faire diminuer les apports hydriques.
6. L'anorexie diminue l'apport d'eau liée aux aliments. Nos apports en eau proviennent de l'eau contenue dans les aliments (environ 1 l/jour pour une alimentation normale chez l'adulte), de l'eau de l'oxydation des aliments (environ 300 ml/j) et des boissons. La quantité de boisson est ajustée par la soif. Si les ingestas diminuent, il est nécessaire d'augmenter la quantité de boissons, alors que c'est bien souvent la situation inverse que l'on rencontre. La déshydratation et la malnutrition sont donc très liées. Toute diminution d'apport alimentaire implique automatiquement une restriction en eau. De plus, les sorties d'eau sont non seulement conservées par la diurèse obligatoire minimale, la sudation et les selles, mais très souvent augmentées en raison d'une déshydratation ou d'une température ambiante excessive. Le bilan hydrique doit alors être maintenu, bien que le rein soit moins apte, avec le grand âge, à réaliser ce qui lui est demandé.
7. Les traitements diurétiques ou l'excès de laxatifs qui augmentent les pertes d'eau et les sédatifs eux-mêmes qui diminuent la vigilance et le besoin de boire.
8.Toutes les maladies aiguës qui entraînent une fièvre avec hyperpnée ou une diarrhée ou des vomissements ou une polyurie (diabète mal équilibré, par exemple).
La prévention de la déshydratation
Une prévention spécifique chez l'adulte âgé consiste comme chez l'adulte jeune à maintenir l'équilibre entre les entrées et les sorties d'eau. La surveillance du poids est essentielle à prévenir déshydratation et dénutrition.
1. À domicile
Les besoins en eau sont de 35 à 45 ml/kg et par jour, soit, pour une personne de 60 kg, d'environ 2 l/j « tout compris ». Il faut :
–conseiller un apport varié: eau, thé, tisanes, potages, jus de fruits, etc. ; et conseiller de boire souvent et en petite quantité puisque la distension gastrique diminue encore la soif ;
–conseiller d'augmenter la consommation d'aliments riches en eau, comme les crudités ou les fruits et les fromages frais, surtout si la température extérieure augmente, ou que les appartements sont surchauffés. Mais aussi ne pas oublier de boire beaucoup plus en cas de fièvre. Dans ce cas, apporter 500 ml de liquide de plus par degré de température au-dessus de 38 °C ;
–si le sujet est peu autonome, il faut le faire boire régulièrement : un verre toutes les deux ou trois heures, par exemple.
Les sujets à surveiller particulièrement sont les sujets fragiles, ayant perdu leur autonomie locomotrice, les sujets vivant seuls et les sujets atteints de maladie d'Alzheimer ou syndrome apparenté. Si le sujet n'aime pas l'eau du robinet, le problème à résoudre est celui de l'approvisionnement en boissons qu'il aime. Il est indispensable d'apprendre aux sujets âgés à « boire sans soif » et de les aider à s'organiser pour cela, si besoin.
2. En institution
Le rôle de l'équipe soignante est très important et consiste à prévenir la déshydratation, par la mesure des apports hydriques et alimentaires et par l'augmentation des apports lors d'un événement aigu, facteur de risque de déshydratation, en tenant compte des traitements, diurétiques, en particulier. En cas de troubles de déglutition, il est possible de proposer une forme d'hydratation adaptée, avec de l'eau gélifiée, des yaourts ou des poudres épaississantes qui permettent d'ingérer sans risque des liquides.
3. Enfin
À domicile comme en institution, la qualité des boissons proposées doit toujours être vérifiée. Pas de bouteilles trop longtemps ouvertes hors d'un réfrigérateur ou de boissons « traînant » dans un verre et susceptible de devenir une source de contamination.
Pour conclure, on ne demande pas à un sujet âgé s'il a soif. On lui sert à boire.
D'après un entretien avec le Dr Monique Ferry, gériatre et nutritionniste, experte AFSSA, directrice du centre départemental de prévention pour réussir son vieillissement à Valence et INSERM-université Paris-XIII.
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