UN CERTAIN nombre d'études ont mis en évidence une association entre la prise de poids précoce, de la naissance jusqu'à 5 ans, et une obésité future. L'importance des premiers mois de la vie et du rebond d'adiposité (augmentation de l'indice de masse corporelle vers 5-7 ans) ont notamment été soulignés. Toutefois, l'importance relative de chaque tranche d'âge et les différences potentielles entre filles et garçons n'avaient pas été étudiées. Les chercheurs de l'INSERM U780 Recherche en épidémiologie et biostatistiques (coordonnés par Marie-Aline Charles et Jérémie Botton) et le groupe d'étude Fleurbaix Laventie Ville Santé se sont intéressés pour la première fois aux différentes phases de la croissance entre 0 et 5 ans et au rôle qu'elles peuvent avoir sur la quantité de masse grasse observée à l'adolescence.
Mesurer annuellement les enfants.
Depuis 1992, les habitants de Fleurbaix et de Laventie, deux communes du Nord - Pas-de-Calais, participent activement à une étude de prévention en santé publique. La première phase de l'étude (1992-1997) a consisté à peser et à mesurer annuellement les enfants dans le cadre du suivi d'une éducation nutritionnelle délivrée à l'école par des instituteurs. La phase 2 (1997-2002) a consisté à étudier les déterminants de l'adiposité et de la prise de poids dans la population générale.
En 1999, chez 468 adolescents âgés de 8 à 17 ans, J. Botton et coll. ont réalisé des mesures anthropométriques, comprenant une évaluation des masses grasse et maigre par impédancemétrie. Ils ont, par ailleurs, récupéré les données des carnets de santé établis au début de l'étude.
L'équipe a ensuite mis au point un modèle mathématique permettant de calculer la vitesse de croissance (poids et taille) des enfants. Les résultats montrent des associations entre la vitesse des prises de poids à différentes étapes du développement et la masse grasse à l'adolescence.
Il existe d'abord une première période critique au cours des six premiers mois de la vie. En particulier, une prise de poids rapide à 3 mois est associée à une masse grasse plus importante à l'adolescence et à un risque de surpoids. Chaque augmentation du poids de 143 g par mois accroît le risque d'être en surpoids de 52 %. Puis, entre 1 et 3 ans, la vitesse de prise de poids ne montre pas d'association avec la masse grasse ultérieure, mais avec la masse maigre, et chez les garçons seulement. Enfin, il existe une deuxième période critique, après l'âge de 3 ans, où là encore la vitesse de croissance de la masse grasse s'associe à la quantité de masse grasse à l'adolescence.
La vitesse de croissance.
Quelques différences ont été observées entre filles et garçons. La vitesse de croissance des garçons à 3 mois est corrélée à la fois avec la masse grasse et la masse des muscles (masse non grasse) ultérieure. En revanche, une croissance rapide chez les filles à cette période se traduira surtout par une augmentation de la masse grasse. Cette période serait donc plus à risque chez les filles que chez les garçons.
S'il existe deux périodes sensibles pendant la petite enfance, contribuant au risque de surpoids futur (3 mois et après 3 ans), «il semble que durant certaines périodes les besoins nécessaires au développement de l'enfant sont tels que le risque de stocker un excès d'énergie sous forme de masse grasse est faible. C'est probablement le cas entre 1 et 2ans: une réduction des apports énergétiques à cette période pourrait alors être préjudiciable».
Les auteurs rapprochent leur travail de deux autres études (anglaise et finlandaise) publiées dans le même numéro de l'« American Journal of Clinical Nutrition » soulignant les relations entre les masses grasses à l'adolescence et à l'âge adulte et la croissance du poids dans les premiers mois de vie ou après 2 ans.
Jérémie Botton et coll. « American Journal of Clinical Nutrition », 2008 ; 87 : 1760-1768, et commentaires, pp. 4587-1589.
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