UNE AUTORÉACTIVITÉ à médiation cellulaire T est en cause dans la physiopathologie des lésions focales inflammatoires de la myéline qui caractérisent la SEP. Une hypothèse en cours est que cette inflammation spécifique serait contingente de l'expression d'antigènes du soi et de molécules du complexe majeur d'histocompatibilité de classe II par les cellules gliales, faisant aboutir à l'activation de cellules T antimyéline. S'efforcer de supprimer l'aptitude à présenter l'antigène des cellules gliales ou des astrocytes (constituant la macroglie) représente une approche thérapeutique en cours d'exploration. Cela pourrait passer par une réduction de la voie de l'AMPc intracellulaire dans ces cellules.
J.P. Mostert et coll. ont abordé la question en utilisant la fluoxétine, un inhibiteur de la recapture de la sérotonine, sachant que la sérotonine augmente les taux d'AMPc dans les astrocytes (montré chez l'animal). Les IRS sont, on le sait, prescrits dans la dépression, la boulimie et les TOC.
Une étude en double aveugle contre placebo a été menée, chez quarante patients souffrant d'une SEP rémittente ou secondairement progressive, non déprimés, pendant vingt-quatre semaines. La moitié d'entre eux a reçu 20 mg par jour de fluoxétine et l'autre moitié un placebo. L'apparition de nouvelles lésions a été suivie sur des IRM cérébrales réalisées à l'inclusion et aux semaines 4, 8, 16 et 24.
Tendance à la réduction du nombre de nouvelles lésions.
Au total, les patients du groupe traité ont présenté «une tendance à la réduction du nombre des nouvelles lésions prenant le contraste au gadolinium au cours du temps». Ainsi, le nombre total cumulé des nouvelles lésions est de 1,84 dans le groupe fluoxétine, contre 5,16 dans le groupe placebo (p = 0,15).
En restreignant l'analyse aux seize dernières semaines du traitement, on s'aperçoit que le nombre cumulé des nouvelles lésions est de 1,21 dans le groupe traité, contre 3,16 dans le groupe placebo (p = 0,05).
Par ailleurs, le nombre des patients ne présentant pas de nouvelles lésions prenant le contraste au gadolinium est de 63 % dans le groupe fluoxétine et de 26 % dans le groupe placebo (p = 0,02).
Cette étude « preuve de concept » indique une tendance à une réduction de la formation de nouvelles lésions dans la SEP sous l'effet de la fluoxétine. «Les résultats tendent à conforter l'hypothèse selon laquelle l'élévation de la voie de signalisation de l'AMPc dans les astrocytes pourrait réduire l'activité inflammatoire de la SEP. Une augmentation de l'AMPc dans les astrocytes produit une régulation négative de la protéine transactivatrice de classe II, ce qui supprime l'induction des cytokines pro-inflammatoires des molécules du CMH de classeII.» Par ailleurs, cela conforterait la notion selon laquelle l'astrocyte aurait une fonction accessoire de cellule présentatrice d'antigènes.
Des études plus poussées sont justifiées.
Des résultats à prendre avec prudence, indiquent les investigateurs, étant donné le nombre restreint des patients et la durée limitée de la prise du produit et du suivi. Ils sont toutefois suffisamment encourageants pour justifier que des études plus poussées soient menées avec les IRS dans la SEP. Les auteurs soulignent la sécurité et la bonne tolérance du produit chez les patients de l'étude.
Comme dans le cas du traitement de la dépression par la fluoxétine, l'effet est devenu apparent après huit semaines de traitement, ce qui est cohérent avec la cinétique de la concentration plasmatique de la fluoxétine.
Par ailleurs, des observations préliminaires avaient montré que la fluoxétine semble posséder un mécanisme d'action supplémentaire, en réduisant la perte axonale (responsable du handicap progressif), ce qui ajouterait à l'intérêt du traitement dans la SEP, si son efficacité venait à être confirmée.
« J Neurol. Neurosurg Psychiatry », publication avancée en ligne.
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