Substitution des antiépileptiques

L'AFSSAPS recommande une information approfondie des patients

Publié le 13/03/2008
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EN AVRIL 2007, le comité technique de pharmacovigilance, qui prépare les travaux de la Commission nationale de pharmacovigilance 2007, a débattu des résultats d'une enquête effectuée par le Dr A. Biraben (neurologue au CHU de Rennes) auprès de 312 neurologues libéraux, membres de l'association des neurologues de langue française, sur leur pratique ou leur perception de la substitution.

Dans cette étude, il apparaissait que très peu d'entre eux prescrivaient eux-mêmes des génériques, 70 % estimaient que la substitution d'un antiépileptique s'était accompagnée d'appels téléphoniques et de signes d'inquiétude de leurs patients, 30 % signalaient avoir eu des problèmes lors de la substitution soit du fait d'une récidive des crises, soit du fait de l'apparition d'effets indésirables.

Cette étude a donné un signal qui invitait à pousser l'analyse compte tenu de l'enjeu de santé publique que représente la prise en charge de l'épilepsie, maladie chronique qui impose un traitement au long cours.

Anxiété anticipatoire.

Une des particularités de la maladie est la survenue d'une crise brève et aléatoire, ce risque est une véritable épée de Damoclès qui, pour certains patients, engendre de l'anxiété (anxiété anticipatoire).

De nombreux facteurs peuvent provoquer une crise (stress, alcool, manque de sommeil, non-observance du traitement et anxiété anticipatoire).

Deux types de démarches ont été engagés par l'AFSSAPS :

– l'interrogation de la trentaine d'agences européennes homologues de l'AFSSAPS sur les recommandations éventuelles.

Sur les 18 pays qui ont répondu, huit ont pris des mesures de nature variable : la Belgique et le Danemark ont rétréci la marge de bioéquivalence, trois pays (Espagne, Norvège, Slovaquie) ont encadré la substitution d'antiépileptiques par des génériques, trois pays (Finlande, Slovénie, Suède) ont interdit la substitution. Il n'a pas été possible d'obtenir des justifications scientifiques précises de ces mesures, pas plus que de données sur leur impact, précise Jean Marimbert (directeur général de l'AFSSAPS) ;

– la réalisation d'une enquête nationale de pharmacovigilance qui a couvert la période du 31 octobre 2000 (date de commercialisation du premier générique en France) au 30 septembre 2007. Elle a porté sur l'ensemble des cas français de convulsions, recrudescence de crises et inefficacité enregistrés dans la base nationale de pharmacovigilance et dans les bases de données des laboratoires commercialisant des médicaments princeps et/ou des médicaments génériques antiépileptiques.

A la suite des discussions en commission d'AMM et des résultats de l'enquête officielle examinée par la Commission nationale de pharmacovigilance le 29 janvier 2008, les membres de la commission nationale ont conclu que la responsabilité des médicaments génériques ne pouvait être affirmée dans la recrudescence des crises d'épilepsie chez des patients à l'occasion de la substitution d'un médicament antiépileptique.

Les données disponibles sont insuffisantes pour apporter la démonstration scientifique d'une relation entre la substitution et le déséquilibre de la maladie épileptique. Elles ne permettent pas non plus d'affirmer que les cas rapportés sont liés à un défaut de bioéquivalence des génériques par rapport aux princeps.

En conclusion, la commission nationale de pharmacovigilance propose de ne pas restreindre la substitution pour cette classe de médicaments.

En revanche, compte tenu des caractéristiques de la survenue des crises d'épilepsie et du rôle potentiellement favorisant de situations anxiogènes, l'accent est mis sur :

– la nécessité d'un dialogue entre le médecin et le patient sur le principe de substitution. Il s'agit d'expliquer aux patients ce que sont les médicaments génériques et de s'assurer que leur utilisation ne suscite pas d'anxiété particulière. Si le praticien perçoit une réticence ou une crainte, il a la possibilité d'exercer son droit d'exclusion de la substitution en apposant sur son ordonnance non substituable avant la dénomination de la spécialité antiépileptique prescrite (qu'il s'agisse d'un médicament princeps ou d'un médicament générique) ;

– la nécessité, avant toute délivrance par le pharmacien que l'ordonnance ne comporte pas la mention « non substituable » et que la substitution est pleinement acceptée par le patient.

AFSSAPS : les matinées avec la presse. Communication de Jean Marimbert, directeur général.

> Dr MICHELINE FOURCADE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8332