APRÈS AVOIR analysé la littérature disponible, les Drs Pitout et Laupland sont formels : «Nous recommandons que des efforts soient faits dans le monde entier pour surveiller la diffusion des Escherichia coli qui produisent des bêtalactamases telles que la CTX-M qui confère des résistances croisées et étendues aux antibiotiques (ESBL) . La surveillance doit comprendre un volet hospitalier et une analyse communautaire. Si ce problème émergent est ignoré, les médecins devront bientôt avoir recours à la famille des carbapenems en première intention pour le traitement empirique des infections communautaires graves du tractus urinaire. Des travaux de recherche doivent être effectués afin de déterminer s'il existe des différences entre les divers carbapenems (imipenem, meropenem et ertapenem) et pour préciser la prise en charge optimale des infections graves. Nous recommandons aussi que des études soient mises en place afin de préciser les facteurs microbiologiques et écologiques qui confèrent le pouvoir particulièrement pathogène des E. coli produisant des CTX-M.»
Les souches résistantes CTX-M.
Depuis cinq ans environ, l'incidence des infections par E.coli résistant aux traitements habituels augmente progressivement. La moindre sensibilité au traitement est en rapport avec la production de bêtalactamases particulières qui confèrent une résistance à différentes familles d'antibiotiques : céphalosporines de troisième génération (cefotaxime, ceftriaxone, ceftazidime) et monobactames (aztréonam). Mais elles restent sensibles aux céphamycines (céfoxitine, céfotétan) et aux carbapenems (imipenem, meropenem et ertapenem). Trois groupes de bêtalactamases ont été identifiés, TEM, SHV et CTX-M.
Les 50 différents types de résistances CTX-M peuvent être divisés en cinq groupes : CTXM1, CTX-M2, CTX-M8, CTX-M9 et CTX-M25. Depuis 2000, on sait que des souches résistances CTX-M circulent à la fois à l'hôpital et dans un environnement communautaire en Espagne, en Italie, en Grève, en Grande-Bretagne et au Canada. Des cas de septicémies ont aussi été récemment décrits. «Ces infections restent encore rares, mais il est possible que leur nombre soit majoré dans le futur», précisent les auteurs.
Les Drs Pitout et Laupland insistent sur la nécessité de mettre en place les moyens diagnostiques biologiques en diffusant les deux techniques actuellement disponibles : les méthodes phénotypiques qui détectent les capacités d'hydrolyse des enzymes ESBL vis-à-vis des céphalosporines, et les méthodes génotypiques qui utilisent des techniques moléculaires afin de détecter le gène responsable de la production d'ESBL. Actuellement, les méthodes phénotypiques sont privilégiées en raison de leur coût et de leur incorporation possible dans les automates, mais elles ne permettent pas de différencier les trois types d'ESBL : TEM, SHV et CTX-M.
Les auteurs insistent aussi sur la prise en charge. «Sur la base des études cliniques, nous concluons qu'il n'existe actuellement pas de données suffisantes pour déterminer quel est le meilleur traitement des infections à E. coli producteurs d'ESBL. Les carbapenems restent le traitement de première intention des septicémies et des bactériémies, mais les quinolones pourraient être aussi efficaces lorsque l'isolat testé y est sensible. Malheureusement, les résistances à cette famille médicamenteuse existent et elles constituent un véritable défi thérapeutique. Des études récentes ont analysé des schémas thérapeutiques alternatifs tels que flomoxef ou la ceftazidime, mais les données restent encore très limitées.»
« The Lancet Infectious Diseases », 2008 ; 8 : 159-166.
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