L'IARC (en français, Agence internationale de la recherche sur le cancer) a classé les contraceptifs oraux (CO) combinés parmi les cancérogènes, en se fondant sur l'observation d'un risque accru du cancer du col utérin.
Comme l'incidence du cancer du col augmente avec l'âge, la contribution de la pilule sur l'incidence du cancer du col à l'échelle de la vie entière dépend de la persistance d'un effet, longtemps après la fin de son utilisation.
Le Collaborative Group on Epidemiological Studies of Cervical Cancer a réalisé une métaanalyse d'études épidémiologiques comportant des critères d'évaluation sur le cancer invasif du col, ou un carcinome insitu de grade 3, selon la nature de la contraception orale et sa durée. Les cas sont représentés par les femmes ayant un cancer du col (n = 16 573) et les témoins par celles indemnes (n = 35 509). Vingt-quatre études ont été identifiées, comportant chacune un minimum de 100 cas.
Le risque relatif de cancer cervical a été estimé par régression logistique en stratifiant par étude : âge, nombre de partenaires sexuels, âge au moment des premiers rapports sexuels, parité, tabagisme et méthode de dépistage.
La durée d'utilisation de la pilule.
Les résultats montrent que «parmi les utilisatrices de CO (actuelles et récentes) , le risque de cancer invasif du col augmente avec la durée d'utilisation de la pilule, donnant un risque relatif de 1,90 pour une prise d'au moins cinq ans, comparativement à celles qui ne l'ont jamais utilisée». La moyenne des prises est de 11,1 ans et elle est donc associée à un risque doublé.
En faisant une métaanalyse de quatre de ces études les plus fiables, on trouve un RR de 0,8 pour une utilisation de zéro à dix ans ou davantage.
L'analyse montre aussi que le risque diminue à mesure que le temps passe. Dix ans après l'arrêt de la pilule, le risque est revenu au niveau des non-utilisatrices.
Le risque relatif ne varie pas de manière substantielle entre les groupes de femmes présentant des caractéristiques différentes.
Notamment, quand on s'intéresse à l'infection par les papillomavirus à haut risque, «on observe un modèle similaire de risque, que ce soit pour le cancer invasif ou pour le carcinome in situ ». La relation entre les CO combinés et le risque de cancer du col est similaire chez les femmes tout-venant et chez celles qui sont positives pour des HPV à haut risque.
Le groupe collaboratif défend son travail, insistant sur la « stratification fine », le soin particulier apporté pour minimiser les biais, corroboré par l'observation d'une homogénéité des résultats entre les différentes cohortes. «Les données présentées ici représentent environ 85% des données épidémiologiques publiées dans le monde sur le risque de carcinome in situ C1/N3 et le cancer invasif du col en regard de l'utilisation d'un CO.»
Il y a une légère augmentation du risque de cancer invasif en association avec l'usage des contraceptifs par progestagènes seuls utilisés en injectable, mais les données sont trop parcimonieuses pour en tirer une conclusion.
L'infection à HPV.
Un commentateur (Peter Sasieni) estime que la prudence est de mise. «L'association mise en évidence dans l'étude semble être de nature causale. Cependant, on sait que le cancer cervical est causé par l'infection à HPV et que l'exposition au HPV n'est pas indépendante du CO.» Les femmes utilisant ce mode de contraception sont davantage exposées aux virus que celles employant des méthodes avec protection mécanique. Cependant, poursuit-il, il n'y a malheureusement pas de données suffisantes pour savoir s'il existe une association significative entre le CO et le cancer cervical chez les femmes HPV positives. Tout au plus sait-on que l'infection par HPV est susceptible de régresser plus sûrement chez les femmes lorsque leur partenaire utilise un préservatif comparativement à celles qui prennent une pilule.
«Cette analyse soigneuse de l'association entre la contraception hormonale et le cancer cervical devrait conduire les scientifiques à une meilleure compréhension des cofacteurs qui influent sur les infections à HPV et les néoplasies cervicales. Et aussi à rassurer les femmes, car la crainte du cancer cervical ne devrait pas être un motif pour éviter l'usage de la contraception orale», conclut le commentateur.
« The Lancet », vol. 370, 10 novembre 2007, pp. 1609-1621, et commentaires pp. 15912-1592.
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