PAR LE Pr PIERRE DIEMUNSCH*
L'INCIDENCE GLOBALE des nausées et vomissements postopératoires (NVPO) est de 30 % et varie selon de nombreux facteurs individuels, anesthésiques et chirurgicaux. Les conséquences en termes de qualité de vie, de complications et d'économie imposent une prise en charge plus efficace qu'actuellement.
L'utilisation de scores de prédiction simplifiés est recommandée pour estimer le risque de NVPO d'un patient donné (G1+). Parmi eux, les mieux validés sont le score d'Apfel et celui de Koivuranta. La prise en charge des NVPO doit être adaptée au niveau du risque mis en évidence. Le schéma ci-contre donne un exemple de ce type de stratégie. Il est recommandé d'adapter cette prise en charge aux situations locales ou particulières et aux demandes du patient (G1+). Cette démarche peut s'inscrire dans le cadre d'un programme qualité (G2+).
En ce qui concerne les médicaments antiémétiques, l'administration prophylactique d'un antagoniste des récepteurs 5HT3 (AR-5HT3) est recommandée en fin d'intervention chez les patients à risque (G1+) dans le cadre de l'approche multimodale des NVPO. L'usage d'un AR-5HT3 est également conseillé dans le traitement curatif de première intention des NVPO (G1+). Le dropéridol est recommandé en prophylaxie chez les patients à risque (G1+) (efficacité similaire aux AR-5HT3 et à la dexaméthasone, extension d'AMM en juillet 2007) et dans le traitement des NVPO constitués (G2+). Chez les patients à haut risque, l'associa-tion du dropéridol à un AR-5HT3 et/ou à la dexaméthasone peut être recommandée (G1+). Le dropéridol est, en outre, recommandé dans la prévention des nausées et vomissements induits par la morphine administrée en analgésie contrôlée par le patient (ACP) (G1+). Il est recommandé d'utiliser la dose minimale efficace de dropéridol (prophylaxie : de 0,625 mg à 1,25 mg ; pour l'ACP : de 0,015 à 0,050 mg de dropéridol par mg de morphine) (G2+). L'administration sera prudente en cas de risque d'allongement de l'intervalle QT.
Une solution simple.
La dexaméthasone (4 à 8 mg) administrée en dose unique pour la prévention des NVPO constitue une solution simple, efficace, bien tolérée et peu coûteuse. Elle est recommandée, en début d'anesthésie, dans la prophylaxie des patients à risque (G1+). Chez les patients à haut risque, l'association de dexaméthasone à un AR-5HT3 et/ou du dropéridol peut être recommandée (G1+). La dexaméthasone administrée en peropératoire n'est pas suffisante pour se substituer à l'ajout de dropéridol dans la prévention des nausées et vomissements induits par la morphine administrée en ACP (G2+). La dexaméthasone ne doit pas être utilisée seule dans le traitement curatif de NVPO (G2–).
Les antagonistes de la substance P ou AR-NK1 sont représentés actuellement par l'aprépitant (40 mg per os, 1 à 3 heures avant l'intervention), qui peut être utilisé pour la prévention des NVPO (G2+). Son efficacité semble supérieure à celle des AR-5HT3, mais son emploi est limité aux sujets de plus de 18 ans. Il est préférable de changer de classe en cas de réadministration d'un médicament antiémétique dans les 6 heures suivant le premier traitement.
Pour les autres mesures décrites dans la littérature pour le traitement des NVPO, les conclusions sont les suivantes :
– il faut prévenir la déshydratation des opérés (G1) ;
– il faut probablement faire (G2+) : acupuncture, halopéridol, scopolamine, AR-H1, doses faibles de propofol et de midazolam ;
– il ne faut probablement pas faire (G2–) : relaxation et hypnose, aromathérapie, hyperoxygénation postopératoire, AR-H2, métoclopramide, gingembre ;
– il ne faut pas faire (G1–) : cannabis et hyperoxygénation peropératoire.
En pédiatrie.
Chez les enfants, l'incidence des NVPO semble plus élevée que chez l'adulte et les NPO sont plus difficiles à évaluer. Les chirurgies à risque sont surtout celles du strabisme, de la hernie, l'amygdalectomie, la neurochirurgie, avec peu de différence entre les deux sexes avant la puberté. Les principaux facteurs de risque spécifiques et indépendants sont : âge supérieur à 3 ans, antécédents personnels ou familiaux de NVPO ou mal des transports, durée de chirurgie supérieure à 30 minutes. La stratégie thérapeutique est largement extrapolée de celle de l'adulte, en privilégiant les associations, supérieures aux monothérapies (G2+).
L'association préconisée en première intention est AR-5HT3 + dexaméthasone (G2+). On a recours au dropéridol en cas d'échec des autres classes et seulement si le patient est hospitalisé.
En chirurgie ambulatoire, le problème des NVPO est particulièrement important, et l'amélioration de la qualité des soins repose sur l'identification des patients à risque et l'utilisation d'indicateurs de suivi liés aux NVPO (sortie retardée, hospitalisation et retour imprévus, satisfaction du patient). Il est recommandé d'adopter une stratégie multimodale chez les patients ambulatoires identifiés à haut risque de NVPO (G1+). Le traitement des NVPO survenant après la sortie du patient de l'unité de chirurgie ambulatoire repose sur la prescription des associations antiémétiques utilisées en prophylaxie, en changeant de classe et sous une forme galénique adaptée (G2+).
* CHRU de Strasbourg, coordinateur du groupe d'experts.
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