LA NOTION remonte à près de vingt ans, quand O'Brien et coll. annonçaient dans le « Lancet » qu'une baisse moindre de la pression artérielle la nuit majorait le risque d'AVC. Ce travail a été suivi d'autres confirmant, chez les hypertendus, davantage de complications cardio-vasculaires lorsque leur TA restait élevée la nuit. Aux yeux de chercheurs internationaux, ces notions manquaient de précision. Il fallait enquêter afin de déterminer les valeurs pronostiques de la TA mesurée de façon ambulatoire le jour, la nuit et de leur ratio.
C'est ainsi qu'a été construite l'étude Idaco (International database on Ambulatory blood pressure monitoring in relation to Cardiovascular Outcomes). Elle a permis, de façon prospective, de réaliser des monitoring tensionnels sur 24 heures chez 7 458 personnes. Les participants, âgés de 56,8 ans en moyenne, ont été enrôlés au Danemark, en Belgique, au Japon, en Suède, en Uruguay et en Chine. Ils ont été suivis pendant 9,6 ans en moyenne. De cette façon ont pu être évalués les risques spécifiquement associés à la TA diurne, nocturne et leur ratio.
Valeur prédictive de décès.
José Boggia et coll. ont déterminé que la pression artérielle nocturne, ajustée selon la tension diurne, avait une meilleure valeur prédictive de décès que la pression diurne. Elle a été associée à 983 décès au total, à 387 d'origine cardio-vasculaire et à 560 d'origine non cardio-vasculaire. Le ratio jour/nuit avait pour sa part une bonne valeur prédictive des mortalités totale, cardio-vasculaire et non cardio-vasculaire. En revanche, en ce qui concerne le critère combiné événements fatals et non fatals, les mesures tensionnelles diurnes et nocturnes font jeu égal. Sur ce même critère, le ratio jour/nuit perd sa valeur pronostique. Les chercheurs constatent également que les patients au ratio jour/nuit égal ou supérieur à 1 étaient dans l'ensemble plus âgés, à risque de décès majoré, et qu'ils mouraient plus vieux que ceux au ratio compris entre 0,8 et 0,9.
Les données, explique l'équipe, suggèrent que la chute la moins prononcée de pression artérielle nocturne pourrait ne représenter qu'un marqueur d'une affection préexistante ou intercurrente.
Une remarque prend dans cette étude une valeur fondamentale. Ces diverses associations perdent leur significativité chez les patients traités. Les antihypertenseurs représentent un facteur de confusion trop puissant pour pouvoir ajuster les résultats en fonction de cet élément. Cependant, dans les populations étudiées, la majorité des hypertendus n'étaient pas traités.
Plusieurs hypothèses explicatives sont proposées. L'élévation du risque cardio-vasculaire, en cas de pression nocturne majorée, pourrait être liée à des modulations d'origine sympathique de la TA, à un dérèglement de la sensibilité des barorécepteurs, à des apnées du sommeil ou à une sensibilité majorée au sel.
N'est peut-être pas généralisable.
Ce travail connaît quelques limites. Même s'il a été mené auprès de 6 populations sur 3 continents, il n'est peut-être pas généralisable. D'autant que les participants étaient différents tant physiquement que par leur mode de vie. La définition, aussi, des événements cliniques sur le long terme peut manquer de précision. Ensuite, la méthode de mesure ambulatoire n'était pas standardisée entre les centres. Et, enfin, les auteurs n'ont pu ajuster leurs résultats en fonction des traitements reçus. L'étude s'achève sur la notion de chronothérapie.
« Lancet », vol. 370, pp. 1219-1229, 6 octobre 2007.
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