DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
CHAQUE ANNÉE, on constate une augmentation de l'implantation de prothèses pour contrecarrer les altérations articulaires liées à l'allongement de l'espérance de vie. Pourtant, les groupes les plus âgés ne sont pas les consommateurs exclusifs de prothèses totales au sein de la population.
Entre 1980 et l'an 2000, si le recours à la prothèse totale a fortement augmenté dans toutes les tranches d'âge, c'est chez les 50-60 ans et les moins de 50 ans que l'augmentation a été la plus forte. Dans ces groupes on va jusqu'à constater plus de 500 % d'augmentation ; cet accroissement au sein d'un groupe d'âge particulier peut être diversement interprété : simple biais statistique (groupe de référence initial numériquement très faible), évolution de la demande des patients, altérations articulaires plus nombreuses du fait de la démultiplication de la pratique sportive et/ou de la chirurgie reconstructrice qu'elle suscite…
A titre comparatif, il est curieux de constater que l'âge moyen des séries historiques, c'est-à-dire avec des reculs d'une vingtaine d'années, s'établit à 64 ans pour les prothèses de hanche alors qu'il est de 69 ans pour les prothèses de genou. La tendance récente recensée d'augmentation d'utilisation de la prothèse de genou dans les tranches d'âge plus jeune risque d'inverser ces discordances entre la prothèse de hanche et la prothèse de genou.
Des opérés de plus en plus actifs.
Les exigences d'activité physique des sujets atteints de gonarthrose et candidats à une intervention rendent les chirurgiens nord-américains de plus en plus utilisateurs de prothèses totales de genou. L'argumentaire avancé, plus ou moins discutable, est qu'aucune des alternatives que l'on propose au patient n'est irréprochable : la rééducation fait tôt ou tard la preuve de son avantage limité ; les cures anti-inflammatoires génèrent une morbidité/mortalité équivalente voire supérieure au risque de complication chirurgicale ; les arthroscopies de nettoyage articulaire restent de portée limitée ; enfin, les ostéotomies techniquement délicates sont peu populaires aux Etats-Unis.
Les plus fervents partisans de la prothèse totale ont donc des arguments plus ou moins convaincants pour s'adapter à une population à forte exigence d'activité.
Cependant force est de reconnaître que, après la mise en place d'une prothèse de genou réussie, les patients opérés sont souvent très actifs mais sélectionnent sérieusement leurs activités sportives : bicyclette plutôt que sport d'impact.
Si dans l'ensemble une très vaste majorité d'opérés est satisfaite du retour d'activité permis par l'implantation prothétique, certains d'entre eux relèvent quelques limitations : mise à genou, accroupissement, déplacements latéraux, pivotage. Ces limitations entraînent inévitable- ment l'élimination de certains sports, parfois pratiqués avec assiduité avant la prothèse. Il importe également de constater que 16 % des patients opérés n'obéissent pas aux recommandations de la Société nord-américaine de chirurgie du genou du point de vue des restrictions à s'auto-imposer après la prothèse.
Des perspectives changeantes.
Dans la région de la Mayo Clinic (Minnesota), la polyarthrite rhumatoïde, qui représentait plus du tiers des indications de prothèse totale de genou, représente à présent moins de dix pour cent de telles indications. Cette réduction spectaculaire est sans doute à mettre à l'actif de la mise au point de stratégies thérapeutiques plus précoces et mieux ciblées et à l'introduction de protocoles médicamenteux innovants (biothérapies anti-TNF alpha…) contre cette maladie autrefois grosse pourvoyeuse de destructions articulaires.
Quant à l'innovation thérapeutique technique proprement dite, elle fait l'objet d'efforts de recherche louables mais exige une forte indépendance d'esprit pour en confirmer ou non l'utilité réelle : par exemple, la chirurgie prothétique dite « mini-invasive » n'apparaît guère concluante dans ses résultats cliniques ; l'usage de l'assistance informatisée à l'implantation (navigation) présente des avantages plus théoriques que pratiques. Enfin, la robotique d'implantation prothétique totale, bien qu'intéressante comme voie de recherche, n'en est pour l'instant qu'à ses balbutiements sans incidence pratique réelle.
Une réunion organisée à Calvi. Avec les Prs et Drs D. Diduch, P. Aglietti, C. Yiannakopoulos, D. Backstein, F. Almquist, F. Cushner, V. Fitz, M. Kelly, B. Violante, P. Neyret, M. Bonnin, H. Clarke, D. Berry, K. Berend, N. Scott, J.N. Argenson, P.O. Pinelli, M. Pagnano, B. Stulberg, G. Scuderi, B. Booth, K. Vince, M. Soudry, C. Msika, R. Windsor, J.M. Aubagnac, C. Hulet, Y. Catonné (Etats-Unis, France, Italie, Grèce, Israël, Autriche).
Les héritiers de John Insall
Les prothèses totales de genou continuent de susciter une recherche clinique et fondamentale enthousiaste pour conserver l'image de succès qui s'est forgée tout au long de leur histoire. L'un des pionniers historiques de cette révolution médico-chirurgicale qui a fortement contribué à la « non-dépendance » de grands groupes de population gériatrique fut le britannico-américain John Insall. Les élèves de John Insall, à présent prestigieux chefs d'école à travers le monde pour la plupart d'entre eux, perpétuent cette tradition de perfectionnisme de la chirurgie prothétique du genou ; ces « héritiers de la pensée de John Insall » se réunissent, en moyenne tous les ans, alternativement aux Etats-Unis et en Europe, pour mieux préfigurer l'évolution de cette discipline.
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