UN NOUVEAU VACCIN anti- Pseudomonas aeruginosa pourrait limiter les conséquences des infections chez les patients souffrant de mucoviscidose. On estime actuellement que les jeunes malades sont infectés pour la première fois par cette bactérie vers l'âge de un an. L'épaisseur du mucus pulmonaire ne permet pas une bonne diffusion des neutrophiles circulants, ce qui contribue à une mauvaise élimination bactérienne. L'infection devient chronique et, avec l'utilisation d'antibiotiques, des souches résistantes apparaissent. Vers l'âge de 13 ans, 80 % des personnes atteintes de mucoviscidose sont porteuses chroniques de P.aeruginosa. Bien que le diagnostic et le traitement antibiotique de cette infection se soient améliorés au cours des dernières années, la mise au point d'un vaccin pourrait limiter les conséquences à long terme du portage bactérien.
L'équipe du Dr Gerd Döring (Tübingen, Allemagne) a élaboré en 1991 un vaccin monovalent en utilisant le flagelle de P.aeruginosa. Les travaux publiés à cette époque confirmaient la sécurité d'emploi et l'immunogénicité de cette approche préventive. L'injection intramusculaire du vaccin s'accompagnait, en effet, de l'apparition d'anticorps antiflagelle (IgG et IgA) et d'IgA sécrétoires.
Pas encore porteuses de P.aeruginosa.
Le nouveau travail présenté dans les « Proceeding of the National Academy of Sciences » (« Pnas ») par l'équipe allemande avait pour objectif d'évaluer l'intérêt de ce type de vaccination chez des personnes atteintes de mucoviscidose qui n'étaient pas encore porteuses de P.aeruginosa. Les auteurs ont utilisé un vaccin bivalent contenant des antigènes de flagelle (Fla1210 et Fla5142).
Les 239 malades qui ont reçu au moins une injection vaccinale et les 244 témoins étaient âgés en moyenne de 7,5 ans (de 2 à 18 ans). Leur capacité pulmonaire était quasiment normale au moment de l'inclusion et ils ne présentaient pas de signes d'insuffisance staturo-pondérale. Au total, l'analyse a été menée chez 189 enfants qui ont reçu les 4 injections de vaccin (3 à 1 mois d'intervalle et un rappel après 1 an, soit une durée totale de 14 mois) et sur 193 témoins qui ont été suivis pendant au moins 2 ans. D'une façon générale, le vaccin a été bien toléré et moins de 5 % des patients se sont plaints d'une douleur au point d'injection.
Les auteurs ont d'abord analysé l'immunogénicité du vaccin. Le taux d'anticorps contre les antigènes s'est élevé rapidement après les premières injections intramusculaires et des IgG ont pu être détectés jusqu'à 2 ans après la dernière injection de rappel. A l'issue de la période de suivi, P.aeruginosa a été identifié chez 19,6 % des patients vaccinés (37 sur 189 enfants) et chez 30,7 % des témoins (59 sur 192 enfants).
Les auteurs ont ensuite procédé à une analyse bactériologique des souches isolées dans les deux groupes. Chez les enfants vaccinés, le portage des deux souches incluses dans le vaccin était significativement moins important que chez les témoins.
Inhiber l'adhésion bactérienne aux cellules hôtes.
Différents mécanismes pourraient être à l'origine de l'efficacité de ce vaccin qui ne produit que des antigènes dirigés contre le flagelle. Les anticorps pourraient inhiber l'adhésion bactérienne aux cellules hôtes. Ils pourraient aussi interagir avec différents types de molécules impliquées dans la réaction inflammatoire de l'hôte contre les bactéries et qui conduisent à une diminution des capacités d'invasion de ces pathogènes. Enfin, les anticorps pourraient induire une opsonophagocytose.
A l'avenir, les auteurs envisagent de mettre au point un vaccin pentavalent qui pourrait permettre de couvrir un spectre beaucoup plus large de P.aeruginosa. Avec le développement des stratégies d'antibiothérapie préventive et curative, il pourrait donc être possible de reculer la date de primo-infection et de l'infection chronique par ces souches. On peut aussi imaginer qu'une moindre utilisation des antibiotiques pourrait s'accompagner d'une plus faible pression de sélection sur les bactéries qui resteront plus longtemps sensibles aux molécules actuellement disponibles. Ce type de prise en charge pourrait, à terme, diminuer le taux de mortalité en rapport avec P.aeruginosa.
« Proceedings of the National Academy of Sciences », édition avancée en ligne.
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