Des hypertendus et des hypertensions

Savoir adapter la prise en charge

Publié le 02/05/2007
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L'INDIVIDUALISATION du traitement de l'hypertension artérielle dépend avant tout de son caractère essentiel. Les paramètres qui en sont les déterminants éventuels sont l'hyperactivité sympathique, l'existence d'un débit cardiaque élevé, un excès en chlorure de sodium, une rétention hydrosodée, une dysfonction endothéliale, une obésité abdominale, une insulinorésistance, des modifications vasculaires et le niveau de rigidité artérielle.

Plusieurs essais cliniques contrôlés récents ont porté sur l'hypertension artérielle essentielle. Les patients qui ont été inclus avaient des caractéristiques cliniques variables en termes d'âge – de 67 à 76 ans en moyenne – et d'atteinte vasculaire, dont la fréquence variait de 9 à 79 %. Les caractéristiques de leur pression artérielle étaient également variables selon les travaux, avec par exemple une pression pulsée qui s'échelonnait de 62 à 76 mmHg selon les études.

Globalement, les patients inclus dans les essais cliniques peuvent être classés en trois catégories. Les sujets de la quarantaine ont volontiers une hypertension artérielle diastolique. Les hypertendus de la cinquantaine sont caractérisés par un diabète, une intolérance au glucose et/ou une insuffisance rénale. Les patients de la soixantaine ont, quant à eux, une pression pulsée supérieure à 60 mmHg.

En cas de néphropathie, notamment diabétique, les recommandations de la Haute Autorité de santé, actualisées en 2005, préconisent l'emploi d'un inhibiteur de l'enzyme de conversion, ou d'un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II, ou encore un diurétique thiazidique. En cas d'insuffisance coronaire, les mêmes recommandations préconisent l'emploi d'un bêtabloquant ou d'un inhibiteur calcique de longue durée d'action.

Les trois « visages » de la maladie.

Le « visage » de la maladie peut lui aussi varier. Les facteurs conduisant au développement des différentes formes d'hypertension – systolique isolée, systolo-diastolique ou diastolique isolée – sont peu connus. A partir des données issues de la population de l'étude de Framingham, S. S. Franklin et coll. ont très récemment précisé les déterminants de l'hypertension artérielle et les relations entre les différentes formes de la maladie (1). Cette étude a porté sur 3 915 sujets non traités par des antihypertenseurs et sans antécédents cardio-vasculaires. Ils ont été inclus entre 1953 et 1957 et la durée de la période de suivi a été de dix ans. Selon les auteurs, l'hypertension diastolique isolée a tendance à survenir chez les plus jeunes, en moyenne 50 ans, et la forme systolo-diastolique de la maladie survient à 53 ans en moyenne. L'hypertension systolique isolée est plus tardive, et est observée chez les sujets de 59 ans en moyenne. Par ailleurs, elle survient essentiellement chez des sujets normotendus (la fréquence de conversion étant de 7,9 % par an) ou ayant une hypertension systolo-diastolique, avec une fréquence de conversion d'une forme à l'autre de la maladie de 6,8 % par an. En revanche, la fréquence du passage à la forme systolo-diastolique de la maladie est de 5,1 % par an chez les sujets antérieurement normotendus. L'augmentation de l'indice de masse corporelle est un facteur prédictif d'hypertension systolo-diastolique, alors que l'âge plus élevé, le sexe féminin et l'augmentation de l'indice de masse corporelle sont prédictifs de la survenue d'une hypertension systolique isolée.

L'HTA se présente en effet sous trois formes cliniques principales. L'hypertension « familiale » prédomine sur la diastolique et concerne des sujets habituellement âgés de moins de 50 ans. Son traitement permet d'éviter la survenue de complications cardio-vasculaires à court terme. Mais, à terme, la maladie hypertensive se modifie avec l'augmentation progressive de la systolique. La pression pulsée augmente. Cette hypertension « vasculaire » matérialise l'atteinte artérielle athéromateuse et la perte de la compliance des gros troncs artériels. Par ailleurs, l'hypertension « métabolique » s'observe chez des patients ayant une obésité abdominale, une dyslipidémie, un diabète et/ou un syndrome inflammatoire. Enfin, l'hypertension « endocrinienne » regroupe toutes les formes secondaires de causes rénales et/ou surrénales.

L'essai français TACTIC, très récent (2), a précisé ces données au sein de la population hypertendue. Chez les patients non traités, la fréquence de l'hypertension familiale passe par exemple de 30 à 16 % après l'âge de 60 ans, alors que celle de l'hypertension vasculaire passe de 38 à 60 %. Selon la même étude, après la mise en oeuvre du traitement, le contrôle des chiffres tensionnels atteint 43,5 % chez les patients ayant une hypertension familiale, alors qu'il n'est que de 25,7 % en cas d'hypertension métabolique et de 2 % seulement en cas d'hypertension vasculaire.

Les recommandations de la Haute Autorité de santé rappellent que les classes thérapeutiques préconisées chez le sujet âgé, en dehors des cas particuliers, sont les diurétiques thiazidiques ou les inhibiteurs calciques de type dihydropyridine de longue durée d'action. En deuxième intention, une bithérapie sera instaurée en cas de réponse insuffisante au traitement initial. Il est recommandé de choisir des associations efficaces, bien tolérées et validées, conformément à la méthode des « paniers thérapeutiques » et ainsi de faire appel à un bêtabloquant, à un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II ou à un IEC. Le choix d'une association comportant un antagoniste calcique semble être particulièrement judicieuse.

D'après la communication du Pr Xavier Girerd, pôle endocrinologie et prévention, unité de prévention des maladies cardio-vasculaires, groupe hospitalier de la Pitié-Salpêtrière, Paris.
(1) Franklin SS et coll. Circulation 2005; 111 (9): 1121-7.
(2) Girerd X et coll. 17th ESH meeting, Milan.

> Dr GERARD BOZET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8159