En France, le cancer du col affecte environ 3 400 femmes et est responsable de près de 1 000 décès chaque année. Le pic d'incidence est à 40 ans et le pic de mortalité à 50 ans (rapport de l'InVs 2006). La persistance de l'infection par lepapillomavirus(HPV) est l'étape préalable nécessaire au développement du cancer. Les HPV 16 et 18 sont responsables de 70 % des cancers du col.
Dans les pays riches, le frottis de dépistage a transformé le cancer du col d'une maladie mortelle en une pathologie rare. Cependant, sa performance est limitée par une sensibilité imparfaite, l'absence d'évaluation du risque, et par la nécessité de respecter un calendrier de stricte régularité de 20 à 65 ans ; autant de conditions expliquant que la maladie bien qu'évitable n'ait pas été éliminée. D'où l'intérêt suscité par la vaccination. Le premier vaccin, Gardasil, dirigé contre 4 types d'HPV (6, 11, 16 et 18), des Laboratoires sanofi-Pasteur MSD, est disponible sur prescription médicale depuis novembre 2006. Il a fait la preuve de son efficacité et de sa bonne tolérance dans d'importants essais cliniques sur plus de 20 000 femmes dans le monde. Administré chez les jeunes filles avant tout rapport sexuel, il assure la prévention de près de 100 % des dysplasies de haut grade du col de l'utérus, de la vulve et des verrues génitales associées au papillomavirus de type 6, 11, 16 et 18. Un deuxième vaccin, Cervarix, des Laboratoires GSK, devrait être prochainement mis sur le marché. Les résultats des essais cliniques montrent également son excellente efficacité et sa bonne tolérance. Il agit contre les HPV 16 et 18.
Les recommandations du Cshpf ont été publiées en mars dernier. Il s'est donc écoulé un certain temps après la mise sur le marché du premier vaccin anti-HPV. «Nous avons passé en revue toutes les données disponibles sur la vaccination, et nous avons attendu les résultats d'une modélisation des effets de la mise en oeuvre d'une vaccination généralisée réalisée par l'Institut de veille sanitaire. Cette modélisation a apporté la preuve du bénéfice à long terme de la vaccination des jeunes filles sur la mortalité par cancer du col de l'utérus, à condition que le dépistage par frottis soit renforcé. Cette condition est fondamentale et doit être rappelée aux femmes, mais aussi au corps médical.»
Le rôle clé des gynécologues.
Les médecins, et tout particulièrement les gynécologues, vont avoir un rôle clé dans l'information des patientes. Ils vont devoir expliquer l'intérêt du vaccin, préciser sa cible et les raisons pour lesquelles les jeunes filles, avant le début de leur activité sexuelle, sont les principales concernées. Pour les jeunes de 14 ans, ce sont le plus souvent les parents qu'il conviendra de convaincre. «Il faudra être très vigilant pour que personne ne pense que ce vaccin protège contre les infections sexuellement transmissibles ou contre le VIH (HPV, VIH, ces sigles risquent d'entraîner une certaine confusion). L'autre volet de cette information concerne donc le dépistage qui est, selon les termes du communiqué du Cshpf, indissociable du vaccin.»«Le dépistage qui n'est pas organisé en France (sauf dans quelques rares régions) reste tout à fait insuffisant, souligne le Pr Perronne, il ne faudrait pas que la généralisation de la vaccination s'accompagne d'une désaffection pour le dépistage, mais au contraire que celui-ci soit renforcé», insiste-t-il. Les firmes pharmaceutiques ont d'ailleurs l'obligation dans leur information d'associer systématiquement dépistage à vaccin, et de rappeler que le vaccin ne protège que contre 70 à 80 % des cancers du col, autrement dit, qu'il n'a aucun effet préventif pour 20 à 30 % de ces cancers.
Pharmacovigilance et études sérologiques.
Une étroite surveillance est mise en place pour évaluer la tolérance du vaccin. En effet, même si les essais cliniques ont porté sur un grand nombre de femmes, d'éventuels effets rares ne pourront être mis en évidence que par une surveillance en situation réelle et à long terme.
Des études sont aussi en cours pour évaluer la durée de la protection. «Le recul actuel permet d'affirmer que le vaccin confère une efficacité pendant une durée minimale de cinq ans; les taux d'anticorps élevés après plusieurs années laissent présager une protection prolongée, mais il faudra le démontrer avant de savoir s'il faudra ou non un ou des rappels.» Enfin, une surveillance virologique est prévue, afin de détecter une éventuelle émergence de nouveaux virus. Sans oublier l'évaluation de la couverture du dépistage.
(1) D'après un entretien avec le Pr Christian Perronne (hôpital Raymond-Poincaré, Garches), président du comité technique des vaccinations et président de la section des maladies transmissibles du Cshpf.
Le choix de l'âge
Le choix de l'âge de 14 ans a été largement discuté. C'est un âge raisonnable, d'une part, parce que seulement 3 % des jeunes filles ont des rapports sexuels avant 15 ans, d'autre part, parce que la durée de la protection est encore inconnue, donc, il est préférable de ne pas vacciner trop tôt. Pour certains, 11 ans aurait été préférable. Le choix de 14 ans pourra néanmoins être remis en cause, si la durée de protection se révèle très prolongée ou si le taux de couverture vaccinale stagne. La vaccination est également recommandée pour les jeunes filles de 15 à 23 ans, à condition toutefois qu'elles n'aient pas eu de rapports sexuels ou qu'elles n'en aient eu que depuis moins d'un an. Les indications seront sans doute modifiées dans l'avenir en fonction des résultats des études encore en cours et des programmes de surveillance.
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