LES PATIENTS porteurs d'une maladie cardiaque sont particulièrement vulnérables. Un stress émotionnel est à même de provoquer des arythmies, voire d'être à l'origine d'une mort subite, ce que l'on sait depuis longtemps. On a désormais la notion que le cortex cérébral est impliqué dans une boucle d'amplification des activités proarythmogènes, et notamment celles induites par le stress. La boucle d'activité comprend le myocarde, les barorécepteurs, les centres de régulation du tronc cérébral et le cortex au niveau temporal et latéro-frontal.Autrement dit, aux réponses réflexes face au stress peuvent s'ajouter une amplification de la réponse, induite par la représentation du stress.
Une étude collaborative de chercheurs d'un laboratoire de neurosciences (laboratoire d'imagerie fonctionnelle à l'University College) et d'un centre de cardiologie confirme l'hypothèse préexistante d'un rétrocontrôle en boucle entre le coeur et les régions supérieures du cerveau.
Une boucle d'amplification.
Des recherches avaient en effet suggéré que le cortex, qui assure la régulation des fonctions cérébrales complexes, telles que la lecture et l'apprentissage, reçoit aussi des informations afférentes du coeur. Et que ces régions corticales peuvent participer à une boucle d'amplification avec feed-back qui peut amplifier les événements cardiaques induits par le stress. Un potentiel évoqué des battements cardiaques (HEP pour Heartbeat Evoked Potential) a été identifié en utilisant conjointement l'IRM fonctionnelle et l'ECG. Cet HEP a même été localisé au niveau du cortex frontal et central. Et on a constaté que son amplitude est prédictive de différences interindividuelles dans les perceptions des mouvements cardiaques (conscience interoceptive).
Marcus Gray et coll. ont mesuré les activités cardiaques et cérébrales chez des individus présentant une maladie cardiaque et soumis à une tâche modérément stressante, connue pour faire augmenter le rythme cardiaque.
L'étude a permis d'identifier «un potentiel exprimé à la surface du cerveau qui reçoit des informations afférentes sur la fonction myocardique et donne une mesure des risques d'événements cardiaques induits par le stress».
Le travail a été mené chez des hommes âgés en moyenne de 59 ans, recrutés dans une consultation de cardiologie. Ils présentent une insuffisance coronaire et sont traités pour cela : bêtabloquants, inhibiteurs calciques et IEC (chacun prend une, deux ou les trois catégories de médicaments).
Ils ont été soumis à une série de tâches dont on sait qu'elles provoquent des modifications cardiaques et vasculaires par augmentation du tonus sympathique. Pour la tâche stressante, on les a encouragés à compter rapidement à l'envers de 7 en 7, en leur demandant de se dépêcher et en soulignant chaque erreur. A l'inverse, une tâche de stress minimal a consisté à les faire compter à l'endroit, à voix haute, de 1 à 50, de manière régulière et relaxante.
Deux enregistrements – ECG (12 électrodes) et EEG (128 électrodes, pour recouvrir l'ensemble du scalp) – ont été réalisés.
Les résultats font état d'une représentation cardiaque au niveau cortical qui reflètent la réponse myocardique au stress mental en recueillant les influx afférents. A l'intérieur de cet échantillon de patients, le stress mental a été associé avec une augmentation du tonus sympathique et une augmentation des réponses myocardiques, qui se sont traduites par des modifications du débit cardiaque (en plus ou en moins). Et ces modifications fonctionnelles sont associées à des changements d'amplitude d'un HEP localisé à la région temporale, constate-t-on. Ce qui est cohérent avec une représentation corticale d'informations provenant du myocarde relayées par les barorécepteurs.
« Proc Natl Acad Sci USA » édition avancée en ligne.
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