EN L'AN 2000, les Nations unies ont établi un défi pour la santé des plus jeunes dans le monde : abaisser de deux tiers la mortalité des moins de 5 ans entre 1990 et 2015. En Thaïlande, en raison de l'amélioration du niveau moyen de santé infantile, ce taux est passé de 160 pour 1 000 entre 1950 et 1960 à 40 pour 1 000 en 1990. Réduire encore la mortalité selon les termes retenus par les Nations unies apparaissait donc comme une gageure. Mais au cours des vingt dernières années, la Thaïlande a changé de façon radicale : la Banque mondiale estime en effet que la proportion de personnes vivant avec moins de 1 dollar par jour est passée de 18 % en 1988 à 6 % en 1992, et elle est même descendue à moins de 2 % en 2000. Le revenu moyen par habitant a augmenté de 3 % entre 1990 et 2000, et il s'établit à 6 402 dollars.
Outre cette amélioration du revenu de la population, le gouvernement thaïlandais a oeuvré de façon très significative à l'amélioration du niveau moyen de la santé des habitants. Dès le début des années 1970, une partie des frais médicaux des plus jeunes a été prise en charge. En 1975, les plus pauvres ont pu bénéficier d'une couverture maladie partielle. En 1983, les soins de périnatalité ont été administrés de façon gratuite dans le cadre de programmes expérimentaux mère- enfant, et cette mesure a été élargie à tous les moins de 12 ans en 1993. Enfin, en 2001, un système de couverture maladie universelle a été mis en place.
Le gouvernement thaïlandais a également mis en place des mesures d'accès aux soins de la population et des structures locales qui ont permis à 95 % de la population de consulter un professionnel de santé dans leur communauté (contre 66 % en 1987). Le nombre des consultations dans ces centres de santé a quadruplé en dix ans.
Vaccination.
Par ailleurs, le taux de vaccination DTP-coqueluche des nouveau-nés est passé de 20 % en 1980 à 90 % en 1990, et un examen de santé est désormais obligatoire avant l'âge de 5 ans. Enfin, le taux de fertilité est passé de 2,41 par femme entre 1980 et 1985 à 1,95 entre 1995 et 2000.
Ces mesures ont-elles permis de faire diminuer la mortalité des moins de 5 ans et ont-elles contribué à minorer les différences entre les classes aisées de la population et les plus pauvres ? Pour répondre à cette question, le Dr Patama Vapattanawong (Bangkok) et coll. ont mis en place une étude comparative de mortalité entre deux années : 1990 et 2000. Ils ont évalué les différences de statut économique dans la population au cours de cette période. «Globalement, le revenu moyen des familles a été nettement majoré entre les deux dates choisies et les inégalités de ressources ont été minorées. Le taux de mortalité des moins de 5ans a baissé de 30% entre les deux dates choisies, et c'est dans la population à moindre revenu que cette baisse a été la plus importante (réduction de 55 %) », analysent les auteurs. Mais, en dépit de ces chiffres, il subsiste une disparité entre les plus riches et les plus pauvres en termes de mortalité infantile, puisque chez 1 % de la population la plus pauvre, 40 nouveau-nés sur 1 000 n'atteindront pas l'âge de 5 ans.
Les auteurs soulignent que cette étude ne prend pas en compte l'effet de la crise économique de la fin des années 1990 et ses répercussions immédiates sur la santé des plus jeunes et des plus pauvres. Elle ne permet pas non plus d'établir avec précision la mortalité dans certains groupes à risque, tels que les tribus de la région frontalière avec le Laos ou les migrants asiatiques qui vivent dans le pays (des Chinois, majoritairement).
Dans un éditorial, le Dr Zulfiqar Bhutta (Pakistan) précise que d'autres données ne peuvent être prises en compte par ce type d'étude, et notamment l'impact de l'ethnie de naissance et du sexe. Il propose que de nouveaux indicateurs soient évalués, notamment le taux de fausses couches, qui reflète à la fois l'état de santé de la mère et celui de l'enfant.
« The Lancet », vol. 369, pp. 804-806 et 850-855, 10 mars 2007.
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