DE NOTRE CORRESPONDANT
L'UNE DES DIFFICULTÉS de l'analyse de la relation entre stress et diabète est la grande diversité des sources de stress au travail (du surmenage aux conflits interpersonnels, en passant par le harcèlement sexuel, pour n'en citer que quelques-uns). Les chercheurs israéliens ont concentré leur analyse sur le « burn out », une catégorie de stress caractérisée par un épuisement généralisé, physique aussi bien que moral, et affectant jusqu'aux capacités intellectuelles de l'individu. De plus, la grande constance dans le temps de cette forme de stress en fait un candidat idéal pour l'analyse d'éventuelles associations pathologiques.
L'équipe de l'université de Tel-Aviv a mis au point un instrument de mesure du burn out (le Shirom- Melamed Burnout Measure, Smbm [2]) qui avait déjà permis d'établir une association positive entre ce type de stress et des concentrations élevées en glucose sanguin ou (Grossi et coll., 2003) en hémoglobine glycosylée A1c.
Des cadres supérieurs aux travailleurs indépendants.
L'étude d'aujourd'hui a permis de suivre, entre 1998 et 2003, 677 sujets d'âge moyen (42,6 ans en moyenne ; 76,5 % d'hommes) ; un sous-groupe de 507 sujets avait des mesures tensionnelles exploitables. Les situations professionnelles des sujets enrôlés englobaient 5 catégories, allant des cadres supérieurs aux travailleurs indépendants.
Au total, 17 employés (2,5 %) ont développé un Dnid, mais l'incidence du diabète était beaucoup plus marquée dans le groupe « burn out » (3,2 %) que chez les autres (1,8 %). L'association entre stress et diabète était confirmée en analyse multivariée, après contrôle de diverses variables confondantes (âge, sexe, indice de la masse corporelle [IMC], tabagisme, prise de boissons alcoolisées, activité physique, catégorie professionnelle et durée de suivi). Le risque relatif (RR) de Dnid lié à la situation de burn out a ainsi été estimé à 1,84 (IC 95 % : 1,19-2,85), soit près de deux fois supérieur à ce qu'il est en l'absence de stress.
On notera avec intérêt que, chez les sujets pour lesquels on disposait de chiffres tensionnels, l'incidence du Dnid était plus basse (2,0 %) que dans l'ensemble de l'échantillon de population, alors que le RR était plus important dans ce sous-groupe (4,32 ; IC 95 % : 1,75-10,63). De plus, l'association entre Dnid et pression artérielle systolique (PAS) était moins forte (1,09) que celle avec le burn nout. Il n'existait pas, toutefois, de différence significative en ce qui concerne les chiffres diastoliques. Ces observations suggèrent : 1) qu'il n'y a pas de corrélation entre le burn out et les chiffres tensionnels ; 2) que le facteur de risque de diabète représenté par le stress au travail ne s'explique pas par un effet du stress sur la tension artérielle.
L'étude israélienne met, donc, en évidence de façon claire le rôle du stress de type burn out comme facteur de risque indépendant de Dnid.
Elle n'en explique cependant pas le mécanisme.
Obésité abdominale.
Les auteurs admettent, en outre, que dans leur étude l'obésité viscérale ou abdominale (qui assure une meilleure prédiction de risque de diabète que l'IMC) n'a pas pu être mesurée. En outre, l'absence de données complètes sur l'histoire familiale des participants limitait sa prise en compte comme facteur confondant dans l'analyse multivariée. Les antécédents de diabète étaient toutefois connus chez 428 sujets. La proportion d'antécédents de diabète n'était pas significativement différente dans le groupe « burn out » (22,2 %) et chez les autres sujets (18,2 %).
(1) S. Melamed, A. Shirom, Sh. Toker, I. Shapira. Burnout and risk of type 2 diabetes : a prospective study of apparently healthy employed persons. « Psychosomatic medicine », 68 : 863-869 (2006).
(2) Le Smbm (14 critères) comprend trois rubriques : épuisement moral, fatigue physique et altération des facultés intellectuelles.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature