LES RÉSULTATS DE L’ÉTUDE de Joel Gelfand et coll. ont une implication pratique : il faut rechercher chez les personnes souffrant d’un psoriasis des facteurs de risque cardio-vasculaire modifiables dans le but d’obtenir leur modification.
Le psoriasis est une maladie dermatologique assez fréquente, touchant entre 2 et 3 % de la population des adultes. Environ 6 à 11 % des patients souffrant de psoriasis ont une arthropathie associée (arthropathie psoriasique).
Sur le plan physiopathologique, le psoriasis est la maladie immunitaire impliquant les lymphocytes T helpers de type 1 (Th1) la plus courante. Il existe une amplification des phénomènes de présentation des antigènes, une augmentation du recrutement des Th1 et de la libération de leurs cytokines ; le résultat est l’apparition des plaques rouges et l’accroissement du turn over des cellules des couches supérieures de l’épiderme. Témoin de l’inflammation, la protéine C réactive est souvent augmentée.
Des caractéristiques inflammatoires et immunitaires.
Ces caractéristiques inflammatoires et immunitaires existent par ailleurs dans le cadre des maladies cardio-vasculaires.
De fait, il existe un certain nombre de travaux qui ont fait associer le psoriasis à la survenue d’infarctus du myocarde. Une notion qui a été recherchée dans le cadre d’études en milieu hospitalier. Joel Gelfand et coll. (Philadelphie) ont mené leur investigation dans le cadre de la population générale.
La cohorte était constituée de personnes âgées de 20 à 90 ans présentes dans la base de données constituée par les médecins généralistes du Royaume-Uni (General Practice Research Database). Les chercheurs ont comparé les profils évolutifs dans cette cohorte, entre 1987 et 2002 (la durée moyenne du suivi a été de 5,4 ans), entre les patients porteurs de psoriasis et les autres.
Ce travail a permis d’étudier 556 995 témoins, 127 139 patients souffrant d’un psoriasis léger et 3 837 personnes ayant une forme sévère de psoriasis (définie sur la notion de la prise d’un traitement systémique).
Les résultats montrent la survenue de 11 194 infarctus du myocarde (2 %) dans la population témoin, contre 2 319 (1,8 %) et 112 (2,9 %) infarctus du myocarde respectivement dans les groupes ayant un psoriasis léger et sévère.
Les incidences pour 100 années-personnes pour les témoins, les psoriasis légers et sévères sont de 3,58, 4,04 et 5,13 respectivement.
Les patients souffrant de psoriasis ont un risque relatif ajusté d’infarctus du myocarde qui varie selon l’âge. Par exemple, une personne de 30 ans ayant une forme légère ou sévère a un RR d’infarctus du myocarde respectivement de 1,29 ou de 3,10. Les RR à l’âge de 60 ans sont de 1,08 ou 1,36 selon la forme.
«Le psoriasis peut donc conférer un risque indépendant d’infarctus du myocarde», concluent Gelfand et coll. Ce risque se manifeste plus fortement chez les jeunes gens ayant une forme sévère du psoriasis ; il s’atténue ensuite avec l’âge. Mais il demeure élevé, même après des ajustements pour les facteurs de risque cardio-vasculaire classiques.
«Les résultats démontrent un effet “dose-dépendant”, compatible avec l’hypothèse qu’une activité immunitaire accrue dans le psoriasis est liée à un risque plus élevé d’infarctus du myocarde.»
L’implication des Th1.
Les résultats confirment par ailleurs les notions d’implication des Th1 dans l’infarctus.
Pourquoi ce risque est-il accru chez les jeunes ? «On sait que le psoriasis est une maladie hétérogène. Ainsi, on a observé que, lorsqu’elle débute précocement (avant 40 ans) , la forme est souvent plus sévère et il y a plus fréquemment une association avec l’antigène HLA-Cw6.»
Par ailleurs, il est possible que le lien entre le psoriasis et l’infarctus passe par d’autres facteurs que l’inflammation, par exemple le stress ou la sédentarité.
« Jama », 11 octobre 2006, vol. 296, n° 14, pp. 1735-1741.
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