On sait de longue date qu'il existe des familles où le cancer de la prostate (CP) frappe plus fréquemment que ne le veut le hasard. Les analyses de ségrégation ont par la suite montré l'existence d'allèles actifs et dominants, qui confèrent un risque élevé de CP. En s'appuyant sur ces bases, les chercheurs ont réalisé une étude de liaison génétique chez des familles présentant des CP héréditaires. Les résultats ont d'abord montré l'implication de plusieurs loci de susceptibilité. L'un d'eux est situé sur le bras long du chromosome 1 (locus 1q24-25, nommé HPC1).
Plusieurs gènes ont été associés à la région HPC1, dont un gène codant pour une ribonucléase, le gène RNASEL. La RNase L (enzyme qui donne son nom au gène) est une endoribonucléase responsable d'une activité antivirale et proapototique d'un système interféron (la voie 2-5A). Le gène RNASEL est considéré comme un gène candidat suppresseur de tumeur.
Rate, thymus, grêle, colon, leucocytes
La protéine RNASEL est exprimée dans la rate, le thymus, la prostate, l'utérus, l'intestin grêle, le côlon et les leucocytes périphériques.
En analysant des membres de familles à CP, ils décèlent deux mutations sur RNASEL (une mutation non-sens et une autre portant sur un codon d'initiation de la transcription du gène).
La recherche confirme l'implication du locus HPC1 dans la susceptibilité au CP et le rôle du système protéique RNASEL.
Ils démontrent qu'il existe une perte de l'allèle sauvage (donc codant pour une protéine RNASEL fonctionnelle) dans les tumeurs des sujets qui présentent la mutation germinale (exprimée sur toutes les cellules de l'organisme), avec une perte totale de la fonction de la protéine correspondante. Une microdissection des tumeurs montre en effet une perte de l'hétérozygotie et une abolition de la protéine RNASEL. Chez des individus hétérozygotes (comparativement à des homozygotes de la même famille), l'activité de la protéine RNASEL est réduite dans les leucocytes périphériques. Par ailleurs, les auteurs indiquent que « la faible fréquence basse des mutations suggère une grande hétérogénéité moléculaire dans le cancer de la prostate ».
Perte de l'allèle sauvage et cancer
Au total, le gène RNASEL est un gène de susceptibilité au CP, et dans les tumeurs des sujets malades, la perte de l'allèle sauvage a induit la cancérisation, du fait de la perte de la protéine pro-apoptotique et régulatrice de la prolifération cellulaire.
« L'identification d'autres mutations fonctionnellement significatives du gène RNASEL doit être faite pour confirmer son implication dans la susceptibilité familiale au cancer de la prostate », indiquent les auteurs. Cela pourrait être intéressant pour le diagnostic précoce et les approches thérapeutiques éventuelles. La voie 2-5A serait alors un terrain de recherche désigné.
« Nature Genetics », publication on line du 22 janvier 2002.
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