Depuis quelques semaines, le «Quotidien» a permis à de nombreux lecteurs de s’exprimer à propos de l’éventuelle réforme sur l’AME. Loin de moi de vouloir polémiquer sur ce sujet qui divise la communauté médicale. Cette question a néanmoins donné le change sur un autre problème : la prise en charge de certains soins en France dans les cliniques (mais aussi dans certains hôpitaux).
Les praticiens de secteur 2 ont une pratique très coûteuse pour le patient. Ainsi, nous savons tous qu’il est parfois indispensable de mettre la main à la poche lorsque nous souhaitons être pris en charge par certains spécialistes (le plus souvent des chirurgiens) dans des cliniques. En fait, ces confrères sont en secteur 2, et demandent pour tout acte chirurgical un dépassement d’honoraires (il est valable aussi bien pour le chirurgien que pour l’anesthésiste). Par voix de conséquence, la facture est parfois très salée (1 à 2 mois de salaire pour le smicard).
On peut critiquer nos confrères qui agissent de la sorte, mais avant tout, il faut les écouter pour mieux appréhender la situation.
Ces derniers nous expliquent que pour avoir une prise en charge de qualité, et du matériel le plus adapté à certaines situations, il est nécessaire d’investir. Or nos organismes sociaux distribuent « l’aumône » pour la réalisation de soins complexes ; somme qui ne permet pas de rentabiliser le matériel et rémunérer de manière décente le praticien. De ce fait, il est impératif pour ces derniers de demander un supplément d’honoraire.
Cependant, comme tout médecin le confrère en secteur 2 doit accepter les patients ayant la CMU ou l’AME. Un refus est antidéontologique, et peut conduire à un déconventionnement. Ces patients en CMU et AME vont avoir une prise en charge identique à celle du patient qui a dû « s’offrir » les soins du praticien en dépassement d’honoraire.
Le plus inique dans cette situation, c’est le fait que le patient ayant un petit salaire va devoir économiser pour lui permettre de se soigner de manière convenable, cela alors qu’il cotise pour une mutuelle privée qui devrait en théorie lui rembourser les suppléments demandés par le confrère. La réalité est bien différente, et ces personnes qui travaillent (parfois de manière difficile) peuvent présenter la facture aux mutuelles qui rétorquent qu’ils avaient le choix du praticien avant de se faire opérer.
Le plus difficile à concevoir dans cette situation, c’est le comportement de ces patients « de l’ombre » qui ont payé parfois des sommes importantes, et qui sans réelle animosité viennent nous raconter, à nous les généralistes, cette mésaventure.
« La lutte contre les inégalités sociales est le grand dessein collectif qu’une nation devrait se donner ». De Bourbon Busset J.
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