Les stratégies thérapeutiques de l’ostéoporose restent l’objet de débats. Elles sont importantes à considérer dans l’optique d’une prise en charge à long terme : séquences et associations de médicaments ont déjà été évaluées par le passé. Pour ces dernières, l'association d’analogues de la parathormone, dont le tériparatide avec les bisphosphonates (alendronate ou acide zolédronique) n’a pas d’avantage par rapport à la monothérapie. Inversement, dans l’étude DATA (Denosumab And Teriparatide Administration), l’association de tériparatide et dénosumab permet une augmentation plus importante de la densité minérale osseuse (DMO), une amélioration de la microarchitecture et une augmentation de la résistance osseuse par comparaison avec la prise isolée d’un des deux médicaments (1,2).
Évaluer une forte dose de tériparatide ?
Dans DATA, l’étude de l’évolution des marqueurs biochimiques du remodelage osseux indique que l'efficacité de l’association est probablement due à la capacité du dénosumab à bloquer complètement les effets du tériparatide sur la résorption tout en permettant la stimulation de la formation osseuse. Les investigateurs de DATA ont donc évalué l’efficacité d’un stimulus anabolique plus puissant (tériparatide à plus forte dose) combiné avec le dénosumab sur une courte durée (3).
Dans cet essai DATA-HD, randomisé contrôlé de phase 4, 76 femmes ménopausées ont reçu une dose standard (20 μg/jour, n = 39) ou une forte dose (40 μg/jour, n = 37) de tériparatide pendant 9 mois. Après 3 mois, toutes les femmes ont reçu le dénosumab (60 mg/semestre) pendant 1 an.
Une DMO augmentée avec 40 µg
À 15 mois, la DMO lombaire a augmenté plus dans le groupe 40 µg (17,5 % ± 6,0) que dans le groupe 20 µg (9,5 % ± 3,2). Au col fémoral et à la hanche totale, la DMO a également augmenté davantage dans le groupe 40 µg (respectivement 6,8 %± 4,1 et 6,1 % ± 3,4) que dans le groupe 20 µg (4,3 % ± 3,7 et 3,9 % ± 2,9). On note également une amélioration de la résistance mécanique estimée au rachis lombaire et à la hanche, significativement plus importante dans le groupe 40 µg.
La tolérance de ce traitement a été bonne dans l’ensemble, sans excès d’événements indésirables dans le groupe tériparatide forte dose. En effet, il a été observé, dans le groupe 20 μg, des douleurs articulaires (38 %), des crampes musculaires (38 %) et de la fatigue (31 %) et, dans le groupe 40 µg, de la fatigue (38 %), des nausées (43 %) et des douleurs articulaires (46 %).
Vers de nouvelles stratégies thérapeutiques ?
Ces données et l’évolution des marqueurs biochimiques dans les deux groupes suggèrent que le tériparatide à forte dose accentue davantage le découplage entre résorption et formation que la dose habituelle et que le dénosumab maintient sa capacité à inhiber la résorption osseuse, même en présence de tériparatide à forte dose.
En l’absence de données sur les fractures, ces résultats sont plus intéressants d’un point de vue conceptuel que pour notre pratique clinique. Cependant, l’émergence de nouveaux agents anaboliques, tels que le romosozumab qui vient d’obtenir un avis favorable des autorités européennes (4), nous invite à réfléchir à d’autres stratégies d’utilisation, séquentielle ou combinée, des médicaments anti-ostéoclastiques et ostéoformateurs afin de diminuer encore l’incidence des fractures ostéoporotiques.
Hôpital Lariboisière, Paris
(1) Tsai JN, Uihlein AV, Lee H, et al. Teriparatide and denosumab, alone or combined, in women with postmenopausal osteoporosis: the DATA study randomised trial. Lancet 2013;382:50–6.
(2) Tsai JN, Uihlein AV, Burnett-Bowie SM, et al. Effects of two years of teriparatide, denosumab, or both on bone microarchitecture and strength (DATA-HRpQCT study). J Clin Endocrinol Metab 2016;101:2023–30.
(3) Tsai JN, Lee H, David NL, Eastell R, Leder BZ. Combination denosumab and high dose teriparatide for postmenopausal osteoporosis (DATA-HD): a randomised, controlled phase 4 trial. Lancet Diabetes Endocrinol 2019;7:767-75.
(4) https://www.ema.europa.eu/en/medicines/human/summaries-opinion/evenity