* On n’a jamais oublié l’heureuse formule de Jean Anouilh défendant « En attendant Godot » dans les colonnes du « Figaro » : « Les pensées de Pascal jouées par les Fratellini ». En découvrant la manière dont Alain Françon dirige les comédiens dans la plus célèbre des pièces de l’écrivain d’origine irlandaise, on se dit que l’auteur du « Voyageur sans bagage » avait touché quelque chose d’aussi profond qu’essentiel. Françon aborde « En attendant Godot » avec autant de simplicité que de subtilité. Il y a longtemps que l’on n’avait pas reçu avec autant d’évidence ce texte que Beckett n’était pas certain de maîtriser, composé directement en français entre 1948 et 1949.
Il y a du concret et même beaucoup de concret dans cette œuvre pourtant métaphysique. Nulle leçon. L’attente de ceux qui sont embarqués. Les cinq interprètes sont exceptionnels. Talentueux, disciplinés, irrésistibles. Dans la farce comme dans les bouffées tragiques. Vladimir, Gilles Privat, avec une dégaine idéale et un visage d’une expressivité cocasse autant que déchirante, est formidable. Comme l’est son frère de destin, Estragon, André Marcon, extraordinaire dans la sincérité, on ne sait quel abandon à la fatalité. Ils s’adressent à nous : les spectateurs sont pris à témoin, mais nous sommes aussi la tourbière, à l’infini. Marcon est comme neuf ! Incroyable. Pozzo a l’autorité agressive de Guillaume Lévêque, jusqu’au désespoir. Une interprétation rare. Le Lucky d’Éric Berger, pathétique, bouleversant, nous interpelle, déchirant. Quant au frêle jeune garçon, Antoine Heuillet lui prête sa grâce gracile, comme s’il allait se rompre. On rit beaucoup et on a le cœur serré. Du Beckett pur. (La Scala, jusqu’au 8 avril)
* Devenu un habitué des personnages de l’écrivain, Denis Lavant est Clov, homme à tout faire, âme damnée de Hamm, épinglé dans son fauteuil, derrière ses sombres lunettes d’aveugle. Frédéric Leidgens est cet homme inquiétant et vulnérable. À l’arrière, dans les poubelles, les parents de ce dernier : Peter Bonke, Nagg, Claudine Delvaux, Nell. On est dans « Fin de partie », sous le regard pénétrant de Jacques Osinski, qui a déjà mis en scène plusieurs œuvres de Beckett. Une pièce très difficile, peu aimable. Atroce. Mais ces êtres humains ont peut-être appelé leur maman, la nuit. Il y a des chagrins d’enfance, dans cette grande pièce, déprimée, sarcastique, pas drôle, mais saisissante, que l’interprétation de Frédéric Leidgens, subtil et nuancé, et de Denis Lavant, tendu et sobre, illumine. (L’Atelier, jusqu’au 16 avril)
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