Après l’été arrive la rentrée, et avec elle son lot de demandes de certificats médicaux pour tout, et surtout n’importe quoi : entrée à l’école maternelle, tournoi de pétanque… Déjà en difficulté pour soigner leur patientèle dans une amplitude horaire décente, les médecins pestent et s'organisent contre ces démarches chronophages, qui s’avèrent souvent sans fondement légal ou sanitaire.
Il faut remonter à 2011 pour trouver une circulaire ministérielle « relative à la rationalisation des certificats médicaux » qui détaille par le menu les différentes situations auxquelles le médecin peut être confronté dans son quotidien. Le certificat médical peut ainsi être réclamé pour constater une maladie contagieuse, un décès, un handicap ou des lésions et traumatismes. Mais le patient ne peut en aucun cas exiger d’en obtenir un pour « attester une absence d’allergie, une activité scolaire, la réintégration d’un enfant dans une crèche » ou pour une folklorique demande sans raison médicale et non prévue par un texte de loi, par exemple des « travaux à réaliser dans une HLM ».
Apprendre à dire non tout en faisant de la pédagogie
La circulaire datant un brin, le conseil départemental du Nord de l'Ordre des médecins a mis en ligne deux tableaux très complets des demandes légalement justifiées ou non pour les patients majeurs mais également mineurs. Objectif : apprendre à dire non tout en faisant de la pédagogie.
Un lycée requiert-il un certificat d'absence d'allergie pour une formation en CAP, le médecin peut répondre à la famille requérante qu’aucun texte de loi ne rend obligatoire la présentation d'un certificat médical, quel qu'il soit, pour une inscription en CAP. Il est par ailleurs impossible de statuer sur une absence d'allergie a priori.
À l’inverse, en cas d’allergie nécessitant un régime alimentaire spécial, un certificat médical est nécessaire pour que le lycéen puisse être correctement nourri en cantine scolaire.
L’Ordre nordiste éclaire aussi les praticiens sur des certificats bien obligatoires, comme pour une première demande ou pour un renouvellement d'agrément d'assistant maternel.
Autre outil efficace pour les professionnels : le site certificats-absurdes.fr déployé par le Collège de la médecine générale. Sur lequel il est par exemple expliqué que, dans les clubs affiliés à une fédération sportive, il n'est plus nécessaire pour les mineurs de produire un certificat médical depuis le décret du 7 mai 2021 pour obtenir, renouveler une licence, s'inscrire à une compétition. Un tel certificat est requis seulement « lorsque les réponses au questionnaire de santé du mineur conduisent à un examen médical », précise le site.
« Il faut responsabiliser chacun, avoir conscience que la demande doit être fondée pour ne pas compromettre le temps médical », insiste le Dr René-Pierre Labarrière, à la tête de la section Exercice professionnel du Cnom.
Pas de certif pour le rugby mais pour la pétanque, oui
En attendant que patients, fédérations sportives, établissements scolaires mais également parents comprennent que demander des certificats à tire-larigot est contre productif, les médecins rivalisent d’anecdotes sur les demandes les plus ubuesques.
« Ça tourne à l'inventaire à la Prévert », décrit à l’AFP le Dr Jérôme Marty, généraliste à Fronton (Haute-Garonne) et président de l’UFML-S, confronté au cas du « type qui fait du rugby à qui on réclame un certificat pour jouer au ping-pong ».
Une généraliste parisienne rapporte cette requête de « certificat pour entrer en maternelle, sachant que les enfants ont déjà un carnet de santé avec les vaccins obligatoires notés dessus ». On la sollicite souvent, raconte-t-elle encore, pour justifier l'absence à l'école d'un enfant malade « pour que les parents puissent se faire rembourser un jour de cantine ». « Un certificat d'aptitude pour la pétanque ou les échecs, ça m'est arrivé », complète le Dr Labarrière, par ailleurs généraliste à Annecy (Haute-Savoie).
« On marche sur la tête à une époque où des gens qui sont malades, insuffisants cardiaques, diabétiques, n'arrivent pas à avoir de rendez-vous », renchérit le Dr Luc Duquesnel. Le président des Généralistes de la CSMF cite ces cas qui relèvent de l'automédication : « Vous avez un enfant qui a 38-39 °C de fièvre, vous donnez du Doliprane, mais quand l'enfant est chez la nourrice, elle exige un certificat médical pour en donner, détaille-t-il. Moi et beaucoup de confrères refusons parce qu'en fait, c'est la responsabilité des parents. »
Sollicitée par l'AFP sur les besoins de certificats, la Fédération française sports pour tous, qui réunit un large réseau de clubs, d'animateurs et de bénévoles, n'a pas donné suite.
L’Académie de médecine veut assouplir les accès directs à certains spécialistes pour réduire les délais
Les maillages départementaux, échelons intermédiaires indispensables de l’attractivité médicale
L’obligation de solidarité territoriale pour les médecins effective « dès septembre », confirme Yannick Neuder
« Les syndicats sont nostalgiques de la médecine de papa », tacle Dominique Voynet, seule médecin ayant voté la loi Garot