Les recommandations de la dernière conférence de consensus de Maastricht sur la prise en charge d’Helicobacter pylori paraîtront début 2012. Elles s'intéressent en premier lieu au problème des résistances aux antibiotiques et proposent un nouveau schéma thérapeutique, avec un traitement désormais en deux étapes.
« Aujourd'hui, un problème majeur se pose dans l'infection à Helicobacter pylori : celui de réussir à traiter, malgré les résistances aux antibiotiques » indique le Pr Francis Mégraud, bactériologiste au CHU de Bordeaux, et membre de l'European Helicobacter study group. La trithérapie associant IPP et deux antibiotiques (amoxicilline + clarithromycine) pendant 7 à 14 jours – qui était de mise lors de la précédente conférence de consensus européenne, et indiquée dans les recommandations françaises* - était donc à revoir. En effet, l'augmentation des résistances, notamment vis-à-vis de la clarithromycine, entraîne une diminution de l'efficacité du traitement. « Quand la souche est sensible, le succès atteint 90 % ; si elle est résistante, il baisse à 20 %. Ce qui porte l'éradication avec la trithérapie à 60 %, un taux bien trop bas » souligne le Pr Mégraud. La prévalence de la résistance à la clarithromycine se situe entre 20 et 25 % en France, et il est déconseillé d'utiliser un antibiotique au-delà de 20 % de résistance (sauf si on met en évidence une sensibilité du germe à l’antibiogramme).
Adieu à la trithérapie conventionnelle
Le traitement séquentiel, traitement probabiliste de première intention quand on ne connaît pas la sensibilité bactérienne, sera désormais recommandé. Il consiste en l'association d'un IPP et d'amoxicilline pendant 5 jours, pour faire diminuer la masse bactérienne, puis le remplacement de l'amoxicilline par la clarithromycine et le métronidazole pendant 5 jours. Le taux d'éradication est ainsi nettement meilleur qu'avec la trithérapie conventionnelle.
En cas d'échec, la lévofloxacine (une fluoroquinolone) sera utilisée selon la résistance rencontrée (à la clarythromycine ou au métronidazole). Mais des résistances peuvent survenir dans ce cas aussi. « On arrive à un taux de 15 % de résistance, c'est-à-dire dans une zone où l'efficacité du traitement décroît, s'inquiète le bactériologiste. Il est à noter que ces résistances ne sont pas liées qu'à l'usage des antibiotiques en traitement d’Helicobacter pylori, mais aussi dans les infections respiratoires ».
Le grand retour du bismuth ?
« Par ailleurs, on espère l'arrivée sur le marché du Pylera®, un mélange de sels de bismuth, de métronidazole, de tétracycline et d'un IPP, poursuit-il. Il n'y a en effet peu de résistance à la tétracycline et l'impact de celle au métronidazole est limité. » Cette association a reçu un avis positif pour une AMM au niveau européen et attend sa validation en France. L'ampleur de l'autorisation de prescription est encore inconnue : sera-t-elle réservée aux gastro-entérologues, voire seulement à certains d'entre eux, ou élargie aux médecins généralistes ? « Le bismuth inquiète à cause des épidémies d'encéphalites qu'il a provoquées par le passé. Mais les quantités utilisées dans Pylera® sont bien moindres, et le médicament fera l'objet d'un programme étroit de surveillance » précise le Pr Mégraud.
Des tests moléculaires efficaces, mais non remboursés
Côté diagnostic, il nécessitait jusque récemment une mise en culture et un antibiogramme. Mais des tests moléculaires se sont développés. Ils permettent de détecter en quelques heures la présence d'Helicobacter pylori et d'identifier la résistance à la clarithromycine et aux quinolones. Simples et rapides, ils ne sont cependant pas remboursés.
Qui traiter ?
Enfin, les recommandations de Maastrich abordent aussi la question des patients à traiter. Sans grand changement à ce niveau : ulcère gastrique ou duodénal, lymphome gastrique du MALT, dyspepsie, etc. Quant au traitement en prévention des cancers gastriques, la question n'est pas encore résolue et les populations à risque restent à définir » indique le Pr Mégraud. Aujourd’hui, on propose le traitement en cas d’antécédents familiaux de cancer gastrique au premier degré, ainsi qu’aux personnes présentant des lésions précancéreuses. « Une prévention systématique n'est pas prévue pour les populations où la fréquence du cancer gastrique est élevée (asiatiques par exemple), mais il y aurait une logique à le faire » remarque le bactériologiste.