Une seule injection de l’anticorps monoclonal nirsévimab (laboratoires MedImmune/AstraZeneca et Sanofi) avant l’épidémie saisonnière permettrait de protéger les nourrissons des infections à VRS. Ce sont les résultats de l’essai de phase 3 Melody, publié dans « The New England Journal of Medicine » chez 1 490 nourrissons de moins d’un an nés à terme ou petits prématurés (> 35 semaines d’aménorrhée).
« Nous savons que le VRS a connu une résurgence avec l’allègement des mesures de santé publique contre le Covid-19, explique le Dr William Muller, pédiatre à l’hôpital pour enfants Ann & Robert H. Lurie à Chicago et co-auteur de l’étude. Cela nous montre qu’une approche large d’immunisation est nécessaire pour amoindrir la charge mondiale substantielle que le VRS fait porter aux enfants, à leurs familles et aux services de soins. »
Le nirsévimab est un anticorps monoclonal recombinant humain IgG1 kappa qui se lie aux sous-unités F1 et F2 de la protéine de fusion et verrouille cette dernière en conformation pré-fusion afin de bloquer l’entrée dans la cellule.
Jusqu’à présent, seul le palivizumab (Synagis, AbbVie puis réversion des droits à AstraZeneca) est approuvé en prévention des infections sévères à VRS nécessitant une hospitalisation chez les enfants à risque élevé. Les indications ouvrant droit au remboursement sont plus restrictives dans les recommandations nationales, notamment en France. En culture cellulaire et dans les modèles animaux, le nirsévimab a montré un plus grand pouvoir inhibiteur du virus que le palivizimab.
Protection de 74,5 % contre l’infection
Dans cette étude, le critère primaire de jugement était la survenue d’une infection respiratoire basse à VRS nécessitant une consultation médicale dans les 150 jours après l’injection. Les nourrissons ont été répartis dans les groupes nirsévimab et placebo selon une randomisation 2:1, avec respectivement 994 et 496 enfants.
L’infection à VRS était confirmée par un test biologique. L’étude a été menée en 2019 dans 20 pays de l’hémisphère nord (150 centres) et en 2020 dans un pays de l’hémisphère sud (Afrique du Sud, 10 centres).
Au cours des six mois de suivi, une infection respiratoire basse à VRS a été observée chez 12 nourrissons du groupe nirsévimab (1,2 %) et chez 25 du groupe placebo (5,0 %), ce qui correspond à une efficacité de 74,5 %. Concernant le critère secondaire portant sur l’hospitalisation pour infection à VRS, l’efficacité était de 62,1 % : six enfants admis dans le groupe nirsévimab (0,6 %) et dans le groupe placebo (1,6 %). Les événements indésirables sévères n’étaient pas significativement différents dans les deux groupes (6,8 % dans le groupe nirsévimab et 7,3 % dans le groupe placebo).
À noter que la pandémie de Covid a mis un frein à l’inclusion en Afrique du Sud, le confinement fin mars 2020 s’étant accompagné d’une fin brutale de la circulation du VRS jusqu’en novembre 2020. Alors que l’inclusion ciblée n’a pas été atteinte, l’essai a eu moins de puissance que planifiée pour évaluer l’effet sur les hospitalisations ou les analyses en sous-groupes.
« Notre recherche s’est attachée à délivrer une prévention contre le VRS, la première de cette classe, à tous les nourrissons, explique Jean-François Toussaint, directeur mondial R & D des vaccins chez Sanofi. Nos résultats de la phase 3 Melody chez les enfants petits prématurés et les enfants nés à terme représentent une étape majeure vers cet objectif ». Le laboratoire AstraZeneca indique chercher à travailler avec les autorités de santé pour mettre à disposition le nirsévimab dès que possible.
(1) L. Hammitt et al, NEJM, mars 2022. DOI:10.1056/NEJMoa2110275