Cet été, j’ai osé porter une robe sous ma blouse. Un infirmier m’a sifflée tout en disant que j’étais « sexy aujourd’hui » ; et ce, devant des patient∙es.
Ça m’a rappelé toutes les remarques déplacées que j'ai reçues au CHU, de la part des soignants et parfois des patients. J’ai essayé plusieurs techniques : les reprendre, m’énerver, les ignorer… mais c’est encore pire. Cela fait de moi… une hystérique.
On me répond toujours la même chose : « C’est un compliment, c’est de l’humour ». Je trouve surtout que c’est lourd. Alors j’ai adopté la technique suivante : sourire et partir. Pourtant, ces pseudo-compliments ne me font pas plaisir. Si c’était réellement une marque de gentillesse, un simple « je trouve ça inapproprié » de ma part suffirait, je pense, à y mettre fin. Pourtant, cela provoque parfois une certaine agressivité, au point que je ne me sente pas en sécurité.
L’association Donner des elles à la santé (qui a pour objectif d’encourager le monde de la santé à sortir des stéréotypes sexistes, ndlr) a établi un baromètre Ipsos. Les chiffres ne sont pas très surprenants : 87 % des femmes médecins ont déjà été victimes de discriminations, 64 % sur le physique, l’apparence ou la tenue vestimentaire, 57 % sur les compétences professionnelles. De plus, 77 % des hommes ont déjà été témoins de comportements sexistes à l’égard des femmes.
Plusieurs thèses parlent du sexisme dans les études de médecine ; l’Isnar et l’Isni ont publié une enquête ; l’un de mes premiers papiers, paru dans une revue médicale, parlait du sexisme vécu par les externes. Le problème est visible, connu, et reconnu.
Alors, qu’est-ce qu’on attend pour agir ?
À mon sens, cela passe par l’enseignement. Chacun arrive avec son bagage socioculturel, et c’est le rôle des études de nous apporter les clefs pour évoluer dans ce métier. Une formation sur le sexisme (et les discriminations en général) est indispensable.
Les choses avancent un peu, certes. À Saint-Étienne par exemple, les étudiant∙es en Pass ont une conférence de sciences humaines et sociales sur le sexisme et les violences sexuelles et sexistes. J’interviens également pour parler de ce sujet dans plusieurs facultés, dans les écoles de kinés… Mais ce n’est pas encore obligatoire dans la formation des futur∙es soignant∙es.
Alors, on s’y met quand ?
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